Selon des juristes très crédibles, ce qu’a fait (et dit) Oussama Khélifi à la Conférence mondiale des présidents de parlements, à Vienne, constitue une « haute trahison » et est même passible de cinq ans d’emprisonnement. En fait, qu’il parle au nom de Rached Ghannouchi, cela constitue à la limite un non-évènement. On sait bien que « le cheikh suprême » est habile à fédérer les perroquets autour de lui. Mais, là, n’est pas notre propos.

Tous ceux que Kais Saied a gelés (en dehors de ceux parmi la nomenclature politique acquise à sa cause, mais avec des nuances) se mettent aujourd’hui dans la psychologie des « militants ». Trop grand mot et qui ne leur sied guère. N’est pas « opposant » qui veut et le militantisme, le vrai, surtout pour les nobles causes, procède d’abord des constantes idéologiques et non des constances.

Dès temps de Bourguiba, puis de ceux de Ben Ali, les opposants condamnés à l’exil écumaient les sièges des ONG, ceux des droits de l’Homme, plaçaient des tribunes contre le système, mais aucun d’eux (mais alors aucun) n’a appelé une quelconque force étrangères à renverser le régime tunisien. Bien entendu, il leur arrivait (surtout des temps de Ben Ali) à descendre en flammes le régime (et surtout sur Al Jazeera, l’attrape-nigauds par excellence), mais une quelconque intelligence avec des forces étrangères, on n’en a pas eu vent.

Ahmed Ben Salah, Mohamed M’zali, Mohamed Masmoudi, puis après eux Hamma Hammami ou encore Moncef Marzouki (qui a pourtant vendu son âme à Méphisto) et bien d’autres concevaient leur combat pour les libertés et la démocratie, et non pas pour  favoriser l’invasion du pays. Seules les islamistes le souhaitaient. Mais ils auront réussi à le faire de l’intérieur. On a même eu notre lot d’acoquinement burlesque (le Mouvement du 18 octobre), cet acoquinement tissé par une singulière connexion gaucho-intégriste.

Les régimes passent, les opposants restent. C’est un fait. Et ces opposants ont la spécificité d’être interchangeables. En tous les cas, Oussama Khélifi et Féthi Ayadi qui ont su quitter le pays à temps, ne pourront en aucun cas accéder à ce statut. On le sait d’ailleurs : quand le navire coule, ce sont les rats qui le quittent les premiers. Ceux qui se dressent à l’étranger contre Kais Saied n’en seront pas pour autant ennoblis. Pire, un personnage de cirque tel Oussama Khélifi, ne se ravise même pas de procéder à une introspection. Ils ne sont guère conscients, lui et ses compères, que ce sont eux qui ont rendu « le phénomène Saied » possible. Aujourd’hui, ceux qui ont échappé aux mailles de cette opération mains blanches, vont galérer à la recherche d’un statut de réfugiés. Ils n’en bénéficieront pas. Même pas en Turquie, ni au Qatar. Tout simplement parce qu’Ankara et Doha les a utilisés pour leurs basses besognes. Aujourd’hui, ils n’en ont plus besoin. C’est qu’on n’héberge pas les traîtres, fussent-ils nos « alliés ». Principe inflexible, érigé en axiome par un certain Kissinger, habile à noyauter les régimes anti-américains de l’intérieur.  Une fois le boulot fait, il jetait ses « collabos » en pâtures.

Raouf khalsi