Coup de gueule d’une rare virulence de Samir Majoul, patron de l’UTICA, lors du 25ème congrès de l’UGTT : pas question d’ingérences étrangères, pas question de privatisation des entreprises nationales. Voilà qui apporte de l’eau au moulin de Noureddine Tabboubi qui est en train de négocier un virage déterminant pour sa survie et pour sa stature à la tête de la Centrale syndicale.

Il s’agit, en effet, de transcender les vieux conflits et de cesser de se regarder en chiens de faïences.  Il s’agit, surtout, de faire front aux injonctions du FMI et de la Banque Mondiale. Par ricochet, le gouvernement ne sera pas seul face aux deux mastodontes mondiaux.

Face à une situation économique complexe, il faut, en effet, y aller en rangs serrés. A ses heures, après la nationalisation des terres agricoles en 1964 et face aux coups de boutoirs d’un De Gaulle impérialiste dans l’âme, Bourguiba se retournait vers ces instances, mais appelant l’UGTT et L’UTICA à la rescousse. Celles-ci se sont, en effet, avérées de fines négociatrices.

Du reste, on voit mal le FMI refuser d’élargir le champ des intervenants. Parce que-souvenons-nous-des temps de Mechichi, le FMI a demandé à ce que nos deux organisations interviennent dans les négociations et qu’elles se portent garantes pour l’Etat tunisien.

Sans doute, le nœud gordien persistera-t-il. A savoir, la privatisation des entreprises publiques, et c’est là que la Centrale syndicale est appelée à faire preuve de pragmatisme et à assouplir ses positions, du moins, concernant celles que l’Etat continue de traîner comme des boulets.

Mais il y a aussi le deuxième volet : la surcharge des emplois dans la fonction publique. Là aussi, les moyens de décongestionner le secteur existent. Même si l’Etat ne saurait se départir de sa vocation de premier employeur.

Sans doute, la nouvelle sainte alliance entre les deux gardiens du temple, induira-t-elle une meilleure implication du secteur privé dans l’emploi des chômeurs et, particulièrement, les diplômés chômeurs…  C’est à ce niveau que Majoul est appelé à trouver le bon argumentaire pour convaincre les chefs d’entreprises. Encore faut-il que l’Etat fasse un bon geste, sur le plan fiscal surtout, et s’implique davantage dans la dédiabolisation des hommes d’affaires.

Changer de discours apaiserait les tensions. Un climat des affaires aussi tendu ne génère que repli et frilosité.

Maintenant, on attend de Saied qu’il s’ouvre au dialogue. Parce que les gardiens du temple sont avec lui. Ils ne sont peut-être pas du même bord, mais ils sont du même côté.

Raouf Khalsi