Par Raouf KHALSI

Nadia Akacha a enfin écrit quelque chose. Elle n’est plus tenue du droit de réserve. Elle a donc usé de son droit à la liberté d’expression.

Or, comme le dit André Malraux : « La liberté n’a pas toujours les mains propres ».  Et lorsqu’une langue se libère soudain, sans aucune réserve, cette même langue qui empêchait celles qui l’entouraient de s’exprimer, le mystère s’épaissit tout simplement. Madame Nadia Akacha , à ses  heures , éminence grise de Kais Saied à Carthage, celle-là même que le Président érigeait au rang de décideur redoutable, continue d’entretenir le flou sur sa relation ambiguë au pouvoir. D’où tirait-elle ce pouvoir ? Du Président ? Des intrigues éternellement florentines du « Palais » ? Quelle était la réelle étendue de ce pouvoir ?

Rancœurs ? Sans doute. Parce qu’elle a appris sa mise à l’écart sur le JORT, comme nous tous. S’est-elle sentie trahie par celui qui la fabriquait à son image ? Jusqu’où pouvait aller la symbiose et l’adhésion au 25 juillet ?

Peut-être même qu’au-delà de l’effet d’osmose, il y a un jeu d’identification, de personnification outrancière de ce tournant dans la vie de la Nation. Il arrive en effet que les gens de l’ombre veuillent instinctivement sortir au grand jour. On a d’ailleurs bien vu que Hédi Baccouche et Habib Ammar se sont mis dans la peau des réels protagonistes du 7 novembre 1987. Ben Ali n’aura pas tardé à les éloigner et, même, à les réduire au silence…

Toute chose n’est pas systématiquement égale par ailleurs. L’axiome ne se vérifie pas toujours. Les cas de figures se ressemblent, néanmoins.

Pourquoi Nadia Akacha pense-t-elle que le 25 juillet a pris une mauvaise trajectoire ? Par la faute de qui ? De ceux qui se sont mis en travers de sa soif du pouvoir ? Qui vise-t-elle quand elle ne parle de « personnes dénuées d’honneur, de morale et de patriotisme » ?

Il est vrai que Kais Saied a un peu trop changé de conseilleurs au cabinet présidentiel. Mais, derrière chaque mouvement, l’ombre de cette femme omnipotente planait, surplombant le décor, avec des traits impassibles, sans émotion, sans empathie aucune, le tout sous un regard tantôt grave, tantôt narquois, sinon dédaigneux.

Le mystère s’épaissit encore plus lorsqu’on voit Youssef Chahed sortir de ses gonds. Il réagit. Contre qui, au fait ? Et, qui, vraiment, établit ce lien de cause à effet avec la publication de Nadia Akacha.

Un jour, on saura tout. Mais, pour le reste, on ne sort jamais du Palais sans y laisser des plumes.  Et, surtout, quand les éminences grises y jouent aux apprentis-sorciers.