L’indifférence des autorités face à l’amoncellement des ordures dans des décharges anarchiques à Sfax pousse la société civile à sonner la mobilisation pour sauver la deuxième ville et important poumon économique du pays d’une catastrophe écologique, à l’approche de l’été. Avec l’appui de plusieurs organisations de la société civile, l’Union régionale du travail a décrété une grève générale dans l’ensemble du gouvernorat.

Après avoir reporté sine die une grève générale régionale qui était prévue le 10 décembre 2021 pour donner aux autorités le temps de trouver des solutions durables à la crise des déchets à Sfax, les composantes de la société civile dans la région ont choisi de durcir leur mobilisation.

« La commission administrative de l’union régionale du travail de Sfax a décidé de décréter une grève générale dans la région », a déclaré Youssef Aouadni, le secrétaire général de l’antenne régionale de l’Union générale tunisienne du travail (UGTT).

« La date de cette grève générale sera annoncée le 2 juin à l’issue d’un rassemblement syndical présidé par le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi », a-t-il ajouté.

Le responsable syndical a également indiqué que le mot d’ordre de grève a été également approuvé par les diverses sections régionales des organisations nationales, l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat, la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme et l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche.

Affrontements

« A l’approche de l’été Sfax pourrait connaître une catastrophé environnementale majeure. Il n’y a plus de système de collecte de déchets depuis plus d’une année, et des décharges anarchiques ont été créées à l’intérieur du centre hospitalier universitaire Hédi Chaker, près des écoles et sur les plages », a-t-il détaillé.

Depuis plus d’une année, le gouvernorat de Sfax croule sous les ordures.  Des montagnes de sacs poubelle dégageant des odeurs pestilentielles et couverts de mouches, s’amoncellent dans différentes délégations et localités de la région, y compris à proximité des hôpitaux, des bâtiments publics et des écoles. Les municipalités de la région refusent de collecter les déchets depuis la fermeture de la décharge à ciel ouvert de Agareb, qui recevait 80 % des déchets des vingt-trois communes du gouvernorat de Sfax.

Symbole de plus d’un État défaillant et de l’échec d’une politique de gestion des déchets solides basée sur l’enfouissement, la crise des ordures à Sfax avait atteint son paroxysme en novembre 2021 avec des protestations populaires violentes à Agareb, où les habitants ont refusé la réouverture de la décharge d’El-Gonna, dont ils ont obtenu la fermeture en 2019 sur décision de la justice.

Lors de ces affrontements, un homme avait trouvé la mort, asphyxiée par les gaz lacrymogènes tirés par la police pour mettre fin aux manifestations.

Des représentants de la société civile à Agareb ont été ensuite reçus par le président de la République, qui n’a pas décelé dans la crise un échec total de la politique de gestion des déchets mais le résultat d’un complot ourdi par des forces occultes et malveillantes. Le locataire de Carthage avait notamment assuré que « certains refusent de ramasser les déchets pour noyer la Tunisie sous les poubelles ».

Le ministère de de l’Environnement, qui avait promis lors d’un déplacement à Sfax des solutions radicales, fait aussi preuve d’une grande indifférence depuis plusieurs mois.

                                                                             Walid KHEFIFI