Par Raouf Khalsi

Référendum démocratique ? Oui, dans la mesure où les votants étaient libres de dire oui ou non. Plutôt conditionné, dans la mesure où il est désormais établi que ce fut bel et bien un plébiscite en faveur de Saied.

Il y aurait, cependant, à déplorer ce cafouillage au sein de l’ISIE, avant-hier soir. C’est ce qui arrive quand les instances « dorment » avant d’être remises sur pied (plutôt concoctées) comme dans une cocotte-minute.

Il faut bien qu’on intègre toute la symbolique d’une démocratie, née malgré tout en 2011, mais qui doit être sauvée, préservée, anoblie après tous les outrages qu’on lui a fait subir, et surtout depuis 2019.

Quand les puissances occidentales et nos pourvoyeurs de fonds s’inquiètent pour l’avenir de la démocratie, eh bien ils sont quand-même dans leur logique. La  Tunisie est condamnée à être la vitrine de la démocratie dans le monde arabe. Ils mettent donc la pression sur notre pays. Ils mettent surtout la pression sur Kais Saied. C’est que le paradigme révolutionnaire de Kais Saied ne cadre pas vraiment avec celui qui a façonné l’orthodoxie de la révolution. En d’autres termes, la seule démocratie viable pour la Tunisie serait celle qui réponde aux schémas classiques occidentaux. Et avec leurs implications sur le mode de gouvernance : la sacro-sainte séparation des pouvoirs.

C’est à ce niveau-là que se meuvent les appréhensions : les pouvoirs sont aujourd’hui concentrés aux mains du président : qu’en fera-t-il d’ici le 17 Décembre ? Le futur parlement sera-t-il à l’image de cette pyramide inversée ? Et cette pyramide inversée, qui sonnera la fin du multipartisme, ne sera-telle pas une espèce de Cheval de Troie ?

Interrogations somme toute légitimes,  sans vraiment devoir forcément épouser les thèses et les supputations occidentales.

C’est qu’il y a inévitablement à poser cette question : après ce réel « coup d’éclat », que fera Saied de cette première victoire ? Que fera-t-il de sa constitution ? Et, puisque les textes l’y autorisent, quelle sera la physionomie du futur code électoral ?

On peut aisément deviner les parties qui seront interdites de se présenter aux Législatives. Ces parties sont celles-là mêmes qui ont sabordé tout le processus démocratique. Et, alors, Saied qui veut réhabiliter les fondamentaux de la révolution, serait inspiré de réhabiliter ceux de la démocratie. Ce n’est qu’en ce moment-là qu’il aura accompli son œuvre. Parce qu’une démocratie bafouillée ne pardonne pas.