Par Abbès BEN MAHJOUBA

Autant qu’il nous en souvienne, jamais la Tunisie n’aura connu une rentrée aussi morose que celle qui prévaut actuellement. A dire vrai, plus le temps passe, plus les horizons s’assombrissent et plus la sinistrose gagne inexorablement du terrain sur fond de crise qui n’épargne visiblement aucun domaine. Invoquer la paix sociale et l’appeler de tous ses vœux,  dans cette conjoncture inédite, c’est un peu semblable à l’appel au secours inaudible d’un naufragé en pleine tempête. C’est peu de dire que la paix sociale est menacée. Lorsque nous savons qu’il ne peut y avoir de relance économique sans une réelle paix sociale, les raisons d’espoir de lendemains meilleurs tendent à s’évaporer.

Déjà fragilisée par dix ans de postrévolution marquée par une gouvernance calamiteuse, la Tunisie a subi de plein fouet les effets désastreux de la pandémie du Covid 19. Les incidences malencontreuses engendrées par le conflit russo-ukrainien enclenché au début de l’année 2022 ont davantage exacerbé la crise qui est la nôtre.

Certes, face à des événements relevant d’une fatalité à laquelle on n’y peut rien, la marge de manœuvre des responsables est extrêmement faible, il n’en demeure pas moins que le pire est à craindre pour notre pays où visiblement domine le flou et où  l’on navigue à vue. Le tournant du 25 juillet 2021 sur lequel s’est bâtie l’espérance d’un décollage tarde encore à réaliser les attentes escomptées.

Minés par une économie à l’asphyxie et une croissance qui peine à s’envoler, les Tunisiens voient leurs conditions de vie se détériorer, ce qui se traduit  par un pouvoir d’achat se réduisant comme une peau de chagrin. Les mauvaises nouvelles véhiculées par les mass media  expliquent le moral en berne de la population sur fond de silence assourdissant de ceux qui sont censés tenir un discours  qui rassure et éclaire les lanternes.

Pas un domaine qui ne soit épargné par la sinistrose ambiante à la tête desquels il y a l’éducation nationale qui souffre de plusieurs lacunes : les problèmes d’infrastructure sont rien à côté du scandaleux manque d’enseignants que les nombreux écoliers, à leurs corps défendant , subissent un peu partout dans le pays. De son côté le syndicat de l’enseignement secondaire  se plaint de la dégradation socio-économique du corps enseignant. Cela sans compter, par ailleurs, toutes les peines que les élèves éprouvent à se déplacer en raison des moyens de transport en état piteux. La flotte de bus dont dispose la Transtu, étant en deçà du minimum requis, rend le quotidien des usagers un vrai calvaire. Au même chapitre transport, voilà qu’une mauvaise nouvelle assombrit davantage l’horizon de Tunisair : notre compagnie qui fut la fierté de la Tunisie ferait l’objet de saisies conservatoires sur ses comptes en banque, en raison des litiges qui l’opposent à ses fonctionnaires. Dans la foulée on apprend que le transport du phosphate a été entravé, jeudi 6 octobre, par une grève anarchique des conducteurs de la SNCFT. Inadmissible quand on sait la manne que représente la Compagnie des phosphates de Gafsa en termes d’exportation dans le secteur des mines. Difficile dès lors de ne pas croire qu’il existe bien des pêcheurs en eau trouble.

Ces exemples parmi tant d’autres ne sont pas de nature à inciter à l’optimisme d’autant que le taux d’inflation du mois dernier enregistre une nette augmentation pour atteindre 9,1 %. La hausse des prix des produits alimentaires explique ce taux élevé de croissance qui pourrait croître dans les mois viennent eu égard à la conjoncture internationale que nous connaissons. Et dans une atmosphère générale tendue où les risques d’implosion sont réels, et où plusieurs partis politiques annoncent le boycott des élections législatives de décembre prochain, une lueur d’espoir se laisse cependant entrevoir : celle des échos favorables quant aux négociations bien avancées entre le Gouvernement le FMI.