Par Raouf KHALSI

Pirandello nous en avait prévenus : « dans votre vie, vous rencontrerez beaucoup de masques et très peu de visages ». Et quand ces masques gravitent autour de l’espace public et dans les sphères du pouvoir, les visages sont encore plus camouflés, même si la société bienpensante essaie de nous montrer le contraire.

Est-on sûrs, aujourd’hui, que ce peuple trouvera son compte dans un dialogue hypothétique et qu’à supposer même que celui-ci soit mis sur pied, y adhèrera-t-il de bonne grâce ? S’il a boudé les législatives, fatigué qu’il est par ce théâtre de la vanité qui se déroule devant ses yeux et dans lequel on veut lui donner un rôle de comparse, toutes les résurrections d’un Quartet sans lendemain ne chatouilleront guère en lui une once de nostalgie, ni d’empathie.

Le peuple n’en finit pas de boire le calice jusqu’à la lie. Plus que jamais, maintenant que la loi de finances, celles-là mêmes qui présidera à ses choix de vie, il est dans la logique de qui se sent assiégé.

Les experts ont sorti le grand jeu des théories apocalyptiques. Ceux qui ont concocté cette Loi, disent qu’au contraire, elle est sociale par excellence.

Comment a-t-on fait pour recenser les familles nécessiteuses ? Le chiffre correspond-il à la réalité d’un peuple en proie à de graves disparités sociales et régionales. C’est que la pauvreté s’urbanise, tandis que de l’autre côté de la barrière, on ne vit pas : on meurt chaque jour un peu plus.

Dialogue maintenant ? A quoi bon ! Surtout que ceux qui le revendiquent ne sont même plus certains de pouvoir fédérer toutes les sensibilités autour d’une même et unique thématique. Et, là où ça grince, ce dialogue, ceux qui s’y accrochent le veulent fondamentalement politique, mais avec une petite supercherie d’habillage socioéconomique. A supposer même que le pouvoir y consente, il répondra à ses « interlocuteurs » (il ne les considèrera jamais comme tels) que c’est l’Etat qui insufflera le social et les équilibres économiques. Pour Saied, fidèle à son slogan, c’est la volonté du peuple !

Or, il manque la dialectique à ce slogan : le peuple qui ne veut plus des partis, ne souhaiterait-il pas voir réémerger une société civile plus proche de lui, mais loin des anciens paradigmes ? Une autre façon d’exercer la liberté en somme. Contrepoids aussi à un Parlement dont il craint un clientélisme d’un autre type.