Par Samia Harrar

« Dites-le à vos gouvernements ! » a été l’injonction aux accents, presque désespérée d’un spécialiste en médias, anglais, qui avait encadré il y a un quart de siècles, au Liban, un groupe de journalistes issus de tous les pays arabes. Dont la Tunisie.

La mémoire qui flanche, empêche de donner un nom à ce vénérable monsieur, qui était d’un âge assez avancé à l’époque, mais elle n’a pas su étouffer le souvenir de son geste, qui nous avait paru alors insolite, lorsque, en guise d’au-revoir à la fin de la mission, il nous avait tendu un dossier, truffé de tous les chiffres et statistiques qui regardent l’eau dans le Levant. Mais pas que. En nous expliquent brièvement, mais avec insistance qu’il y avait un problème, et qu’il était sérieux.

Et qu’en fait d’expansionnisme, et de colonisation, particulièrement dans ce Moyen-Orient qui n’a de cesse de ressembler à une « poudrière », le véritable enjeu, celui qui est majeur, et qui délimite et décide de tout, ce n’était pas le pétrole ou autres gisements mais bien l’eau. Ces paroles prophétiques nous avaient interpellés en posant des questionnements sur la nature angoissée de cette injonction, qu’il n’avait sûrement pas dû, lancer au hasard à notre adresse.

Le sujet du dérèglement climatique, de la raréfaction des nappes d’eau, et du stress hydrique, n’étaient pourtant pas encore à l’ordre du jour. Et lorsque que quiconque, de par le monde, s’est habitué à tourner un robinet pour avoir l’eau à profusion lorsqu’il le désire et à chaque fois qu’il en a besoin, sans penser une seconde, qu’il pourrait un jour, rejoindre la cohorte de ceux qui n’ont jamais pu avoir un accès facile à l’eau, dans d’autres régions du monde, ou même, pas très loin de nous et sous nos propres cieux au jour d’aujourd’hui, il a du mal, forcément, à prendre pour comptant, des injonctions de cet ordre, que la mémoire a vite fait de remiser dans un « compartiment » oublié, pour ne pas avoir à s’encombrer le « cerveau », inutilement.

Jusqu’à ce qu’il y ait, pour ce qui nous concerne en Tunisie, ce « cinglant » rappel à l’ordre qui vaut mille mots. Et qui pourrait nous valoir si l’on n’y prenait garde, plus que mille maux. Si nous en sommes au stade, de quêter un miracle qui descendrait du ciel pour nous sauver la mise, en se rappelant, à point nommé, qu’il y a un ciel au-dessus de nous, et qu’il serait bon d’y jeter un œil de temps à autre, histoire de convoquer les hauteurs, c’est qu’au-delà de la portée spirituelle, il y a un enjeu et il est de taille. Il regarde notre survie. Ou notre « extinction » de la surface du globe. Alors oui, il se pourrait que mille guerres…