Fermé sans aucune explication depuis juillet 2011, le Musée du Bardo est aux abonnés absents à la grande consternation du public et des professionnels. Pour le moment, les appels se multiplient pour sa réouverture alors que les pouvoirs publics restent confinés dans le silence.

Malgré plus de 500 jours de fermeture, le Musée du Bardo se porte plutôt bien. Beaucoup de travaux en souffrance, ont été accomplis et plusieurs zones ont été rafraîchie ou réaménagées. Après un temps de flottement, les collections muséales ont été prises en charge de manière professionnelle.

 Possible réouverture le 20 mars prochain ?

Bref, il y a quelques bonnes nouvelles à propos du musée national qui était sorti des radars depuis un certain 25 juillet 2021. Ainsi à la réouverture, plusieurs salles auparavant fermées seront de nouveau accessibles. Cela signifie que le musée va s’agrandir et proposer plus de pièces archéologiques et d’éléments d’information.

Hormis cette bonne nouvelle, rien à signaler sinon que la date de réouverture n’est toujours pas annoncée. Certains avancent celle du 20 mars pour une reprise encore hypothétique. D’autres, moins optimistes, se demandent si une ouverture à court terme est dans l’ordre du possible.

Une campagne spontanée pour la reprise

Entre temps, la polémique enfle avec de nombreuses protestations pour le moment limité aux réseaux sociaux. À l’initiative de l’archéologue et ancien conservateur du musée, Habib Ben Younes, des photos contre l’oubli circulent sur la Toile sur fond d’énumération des jours de fermeture et de commentaires souvent cinglants.

Cette campagne spontanée prend du volume depuis le début de l’année et continue à s’amplifier y compris à l’international. Rien pour l’heure ne laisse pressentir une structuration de ces quelques prises de position éparses et trop diffuses pour faire évoluer la situation.

Simultanément, des sources proches de ce dossier laissent entendre que la fermeture du musée n’est pas due à des motifs politiques. En effet, dans l’opinion publique, face à l’opacité des pouvoirs publics, tout le monde est convaincu que le musée a été fermé pour empêcher quiconque d’approcher l’Assemblée des représentants du peuple après sa suspension puis sa dissolution.

Entre raisons sécuritaires et politiques

Le fait est que les deux institutions sont voisines et constituent même deux corps du même édifice historique beylical. De plus, elles n’ont pas toujours été voisines puisque le Parlement a été instauré à la fondation de la République tunisienne.

Construire un mur entre les deux bâtiments est une solution préconisée par Habib Ben Younes qui considère que de la sorte, le problème serait résolu. Seulement, il est possible que l’hypothèse de départ ne soit pas nécessairement la bonne et qu’il ne s’agit pas de questions de voisinage.

Dans cette optique, nos sources affirment que la décision de fermeture du musée est strictement sécuritaire. Selon nos interlocuteurs, elle aurait été prise à la demande des forces de l’ordre qui considèrent qu’il est impossible de sécuriser le musée, ses abords et l’ensemble du périmètre. Et là aussi, la solution préconisée serait un mur de clôture hermétique pour la protection d’un musée ayant subi le précédent d’une attaque terroriste.

Un prêt de la Banque mondiale à rembourser

Si elle élude les considérations politiques, cette explication par le sécuritaire laisse tout en suspens et met hors-jeu le ministère des Affaires culturelles dont le mutisme sur ce dossier a de quoi surprendre. Reste que le fait nouveau est désormais constitué par l’impatience croissante du public et des professionnels.

Qu’attendre dès lors ? En premier lieu, la réouverture ne semble pas imminente mais pourrait avoir lieu le 20 mars prochain. Ensuite, les questions sécuritaires devraient rester prioritaires et continuer à prévaloir sur une reprise au Bardo. Enfin, des exceptions pourraient être consenties et permettre des ouvertures ponctuelles pour des visiteurs de marque ou des professionnels.

En attendant, le Musée du Bardo est condamné à rester fermé alors que sa rénovation avait occasionné le recours à un prêt de la Banque mondiale dont le remboursement est en cours et qui est indexé sur les prévisions de recettes désormais inexistantes. Au-delà, cette situation est inédite en soi car, toujours selon Habib Ben Younes, jamais en temps de paix, un musée n’est resté si longtemps fermé à travers le monde. Triste situation pour le Musée du Bardo alors que depuis sa fermeture en juillet 2021, aucune explication ni justification officielle n’a été donnée par les pouvoirs publics.

Hatem BOURIAL