L’affaire du réalisateur Issam Bouguerra défraie la chronique depuis plusieurs mois. Rahal Jallali, avocat du scénariste et réalisateur a assuré que la Cour d’appel de Tunis a décidé un non-lieu pour son client tout en confirmant le verdict en première instance de 15 mois de prison pour détention de stupéfiants dans un but de consommation. La Cour s’est contenté de la période passée ce qui signifie qu’il sera libéré. Bouguerra a été innocenté de l’accusation de culture dans un but de trafic de stupéfiants, lit-on sur le site de « Mosaïque FM « le 13 février 2023.

Le réalisateur tunisien Issam Bouguerra, emprisonné depuis le 24 août 2021, a été condamné le 24 novembre 2022 pour des accusations de consommation et détention de cannabis, qui n’auraient jamais dues être érigées en infraction. En raison d’un appel formé par le procureur, il a cependant été maintenu en détention alors qu’il avait déjà passé plus que la durée de sa sentence en prison, lit-on dans une déclaration publique intitulée « 16 organisations de la société civile tunisiennes et internationales demandent la libération immédiate d’Issam Bouguerra » publiée par Amnesty International le 13 février 2023.

16 organisations tunisiennes et internationales ont appelé à la libération immédiate du réalisateur

Selon la même source, les organisations et personnes signataires appellent les autorités tunisiennes à le remettre immédiatement en liberté, sa détention étant arbitraire en raison de la nature des accusations portées contre lui et de son maintien en détention, malgré le temps déjà purgé en prison. Issam Bouguerra a en outre besoin de toute urgence d’une assistance médicale qui ne peut lui être fournie dans la prison où il est incarcéré. Enfin, nous demandons également aux autorités tunisiennes d’entreprendre une révision complète de toutes les lois et politiques relatives aux stupéfiants, notamment la Loi n° 92-52, afin de dépénaliser la consommation et la détention de stupéfiants pour un usage personnel et d’étendre la portée du système de santé et d’autres services sociaux afin de traiter les risques liés à la consommation de stupéfiants.

Le jour de son procès, le 24 novembre 2022, le tribunal de première instance d’Ariana, à Tunis, a condamné Issam Bouguerra à 15 mois d’emprisonnement. Compte tenu du temps qu’il avait déjà passé en détention provisoire, il aurait dû être libéré à la suite du jugement, car il avait déjà purgé sa peine. Néanmoins, le jour même, le procureur du tribunal de première instance de Tunis a fait appel de sa condamnation, pour demander apparemment une sanction plus sévère, lit-on encore sur le site de l’organisation Amnesty International.

A noter qu’au cours de sa détention, Issam Bouguerra s’est vu refuser l’accès aux soins de santé urgents et adaptés dont il avait besoin. Son père lui a rendu plusieurs fois visite à la prison de Mornaguia, où il était détenu. Il a déclaré à Amnesty International que son fils souffrait de saignements depuis plusieurs semaines. Compte tenu de l’historique de cancer du côlon dans la famille, auquel la mère d’Issam Bouguerra a notamment succombé, le médecin de la famille a recommandé des scanners tous les six mois. Pourtant, depuis son arrestation, les autorités pénitentiaires ne lui ont pas permis de bénéficier de ces examens médicaux, car les installations médicales de la prison ne disposent pas des équipements nécessaires, comme un scanner ou le matériel pour réaliser une coloscopie.

Amnesty avait indiqué, également, Issam Bouguerra a demandé à voir un médecin compétent en dehors de la prison à plusieurs reprises depuis avril 2022, mais les autorités pénitentiaires
ont ignoré ses demandes. Le cas d’Issam Bouguerra est représentatif des souffrances qu’endurent des milliers de personnes privées de liberté en Tunisie pour leur seule consommation de stupéfiants, a

Plus de 2 500 personnes étaient détenues pour des infractions liées aux stupéfiants en 2019

D’après un récent rapport publié par Avocats sans frontières, plus de 2 500 personnes étaient détenues pour des infractions liées aux stupéfiants en 2019, dont 60 % uniquement pour la consommation de tels produits. La surpopulation carcérale est un problème de longue date en Tunisie, les prisons excédant déjà leur capacité maximale, avec 22 000 détenus pour 18 000 places, une grande partie de ces personnes étant incarcérées pour des infractions liées aux stupéfiants.

Des organisations de la société civile tunisiennes et internationales ont dénoncé le vaste éventail d’atteintes aux droits humains qu’entraînent les lois punitives en matière de stupéfiants, notamment des agressions physiques et verbales de la part de policiers, a ajouté Amnesty International.

Selon le deuxième article de la Loi n° 92-52 du 18 mai 1992 relative aux stupéfiants, sont absolument interdits la culture, la consommation, la production, la récolte, la détention, la possession, la propriété, l’achat, le transport, la circulation, la cession, l’offre, la livraison, le trafic, la distribution, le courtage, l’importation, l’exportation, la fabrication, l’extraction ou la contrebande des plantes naturelles narcotiques visées à l’article premier de la présente loi. Sont formellement interdites toutes les opérations agricoles, industrielles ou commerciales se rapportant aux stupéfiants, à l’exception des cas légalement permis, dans le domaine exclusif de la médecine, de la médecine vétérinaire, de la pharmacie et de la recherche scientifique, en vertu des textes législatifs et règlementaires en vigueur, d’après l’article susmentionné.

Ghada DHAOUADI