Neuf personnes -sept Tunisiens et deux Algériens-, ont comparu devant la justice algérienne après le report de la session prévue le 13 février. Ils ont été condamnés à 10 ans de prison pour avoir été accusés de contrebande de produits alimentaires subventionnés. La cour a réduit la peine de cinq ans de prison. Dans ce contexte, le président de l’Observatoire tunisien des droits de l’homme Mostafa Abdelkebir a précisé que l’Observatoire tunisien des droits de l’homme a exprimé sa désapprobation de cette peine et travaillera à faire appel de la décision en coordination avec toutes les parties concernées. Il appelle également les autorités tunisiennes à intervenir immédiatement auprès des autorités algériennes pour libérer des citoyens innocents qui n’ont commis aucun crime, leur seul crime étant leur pauvreté et les contraintes de leur vie qui les ont obligés à importer des produits pour subvenir aux besoins de leur famille, selon ses dires. Quelles sont les circonstances de cette affaire ? Et que prévoient, en effet, les lois algériennes et tunisiennes pour les crimes liés à la contrebande ? Tour d’horizon. 

Lobna, la femme d’un des détenus, a nié, dans une déclaration accordée à « Mosaïque FM » le 28 février 2023, que son mari et les autres condamnés aient été impliqués dans la contrebande de produits alimentaires. Elle a expliqué que les quantités de produits alimentaires saisies appartenaient à environ 50 Tunisiens qui étaient en voyage en Algérie et qui avaient acheté des produits alimentaires tels que des bouteilles d’huile et des produits divers. Selon Lobna,  l’organisateur du voyage avait acheté un deuxième bus pour transporter les produits alimentaires et que son mari et six autres Tunisiens se trouvaient à bord de ce bus, tandis que les autres passagers avaient pris un autre bus. Les accusés peuvent faire appel de la décision devant la Cour de cassation, mais Loubna a souligné que la procédure d’appel prendrait beaucoup de temps, jusqu’à un an. Elle a ajouté que le verdict avait été un choc pour les familles des accusés et pour les avocats de la défense, qui s’attendaient à une peine maximale de deux ans de prison avec sursis, lit-on sur le site de la radio susmentionnée.

En Algérie, l’ordonnance n° 05-06 du 23 août 2005 relative à la lutte contre la contrebande publiée au
Journal officiel de la République algérienne démocratique et populaire,  a pour objet de renforcer les moyens de lutte contre la contrebande à travers la mise en place de mesures préventives, un meilleur encadrement de la coordination intersectorielle, l’introduction de règles particulières en matière de poursuites et de répression et un dispositif de coopération internationale selon le premier article de l’ordonnance susmentionnée.

Selon le dixième article de cette ordonnance, toute contrebande de combustibles, carburants, grains, farine, substances farineuses, denrées alimentaires, cheptel, produits de la mer, alcool, tabac, produits pharmaceutiques, engrais commerciaux, œuvres d’art, patrimoine archéologique, articles pyrotechniques ainsi que de toute autre marchandise (…) est punie d’une peine d’emprisonnement d’un (1) an à cinq (5) ans et d’une amende égale à cinq fois la valeur de la marchandise confisquée.

Lorsque les actes de contrebande sont commis par trois (3) personnes ou plus, leurs auteurs sont punis d’une peine d’emprisonnement de deux (2) ans à dix (10) ans, et d’une amende égale à dix (10) fois la valeur de la marchandise confisquée. Lorsque la marchandise, objet de la contrebande, est découverte dans des cachettes, cavités ou tout autre endroit spécialement aménagé à des fins de contrebande, les auteurs sont punis d’une peine d’emprisonnement de deux (2) ans à dix (10) ans et d’une amende égale à dix (10) fois la valeur de la marchandise confisquée.

Les actes de contrebande commis à l’aide de tout moyen de transport sont punis d’un emprisonnement
de dix (10) ans à vingt (20) ans et d’une amende égale à dix (10) fois la valeur cumulée de la marchandise confisquée et du moyen de transport, d’après le douzième article.

En Tunisie, la spéculation illégale est tout stockage ou rétention de biens ou de marchandises, quelles qu’en soient la source et le mode de production, dont le but d’en provoquer une pénurie et une perturbation des approvisionnements au niveau du marché et que toute hausse ou baisse artificielle de leurs prix, de manière directe ou indirecte, ou par le biais d’intermédiaire, ou le recours à des moyens électroniques ou autres moyens frauduleux quelconques, d’après le Décret-loi n°2022-14 du 20 mars 2022, relatif à la lutte contre la spéculation illégale.

Est puni de dix ans d’emprisonnement et de cent mille dinars d’amende quiconque aura commis un des actes incriminés, au sens du présent décret-loi, comme étant une spéculation illégale. La peine est l’emprisonnement de vingt (20) ans et l’amende de deux cent mille (200.000) dinars lorsque la spéculation illégale a été opéré sur les produits subventionnés par le budget de l’Etat ou les médicaments et autres produits pharmaceutiques. Et d’ajouter que la peine est la réclusion criminelle à trente (30) ans et l’amende de cinq cent mille (500.000) dinars si les infractions mentionnées à l’article 3 du présent décret-loi, sont commises lors des situations exceptionnelles, l’apparition d’une crise sanitaire imprévue, la propagation d’une épidémie ou la survenance d’une catastrophe. La peine est la réclusion criminelle à perpétuité et l’amende de cinq cent mille (500.000) dinars si les infractions prévues à l’article 3 du présent décret-loi ont été commis par une entente, une bande ou une organisation criminelle, ou lors de la tenue de produits dans le dessein de les faire passer en contrebande à l’extérieur du pays.

Ghada DHAOUADI