Depuis deux semaines, le débat autour de la situation des subsahariens en Tunisie s’enflamme jour après jour. Des Tunisiens les ont appelés à quitter le pays, d’autres ont participé à une marche de solidarité avec ces migrants. On voit partout des vidéos de subsahariens qui indiquent que la situation est devenue « dangereuse » pour eux, certains d’entre eux affirment même qu’ils ne peuvent plus sortir de la maison à cause de leur crainte d’être agressés. Des ONG et des associations ont tiré la sonnette d’alarme dans une déclaration commune publiée sur le site officiel du FTDES (16 février 2023).

Les autorités tunisiennes réagissent Le 5 mars 2023, un communiqué publié sur les pages officielles de la présidence du gouvernement et de la présidence de la République. « La Tunisie rejette catégoriquement toute accusation liée à un prétendu racisme dans le pays », y lit-on.

La Tunisie lutte avec tous les moyens à disposition contre le crime de traite des êtres humains, subi par les Africains jusqu’aux temps présents. La Tunisie n’a jamais accepté et n’acceptera pas que les Africains soient victimes de ce phénomène condamnable où qu’ils soient, sur son sol ou à l’étranger, lit-on dans le communiqué susmentionné.

Mesures en faveur des migrants subsahariens

Certaines mesures ont été énoncées notamment faciliter le séjour des étudiants africains sur le territoire tunisien en leur délivrant des cartes de séjour pour une période d’une année, et en leur permettant de renouveler périodiquement leurs documents dans un délai approprié, prolonger l’attestation de résidence de trois mois à six mois, faciliter les départs volontaires pour ceux qui le souhaitent dans un cadre organisé et en coordination préalable avec les ambassades et missions diplomatiques des pays africains en Tunisie, exonérer les ressortissants africains du paiement des pénalités de retard encourues suite au dépassement de la durée de séjour autorisée et ce, dans le cadre du retour volontaire et renforcer l’encadrement et intensifier l’assistance sociale, sanitaire et psychologique à tous les migrants et réfugiés des pays africains à travers l’organisation du Croissant-Rouge tunisien et ses différents partenaires.

Réprimer toutes les formes de traite des êtres humains et d’exploitation des migrants en situation irrégulières en multipliant les campagnes de contrôle et en mettant en place un numéro vert à la disposition des résidents des différents pays africains pour signaler toute violation ou abus à leur encontre figurent, également, parmi les mesures en faveur des migrants subsahariens.

« Discours xénophobe »

Rappelons qu’un communiqué a été publié le 27 février 2023 dans lequel l’Union africaine s’est exprimée sur le discours du président de la République Kais Saied (21 février) qui a mis l’accent sur la nécessité de prendre des mesures urgentes pour mettre fin et « au plus vite » au phénomène de l’afflux massif de migrants irréguliers de l’Afrique subsaharienne vers la Tunisie. La rapporteuse spéciale sur les réfugiés, les demandeurs d’asile, les déplacés internes et les migrants en Afrique, Maya Sahli Fadel, a exprimé, dans le communiqué susmentionné, qu’elle est particulièrement préoccupée par les propos contenus dans cette déclaration et qui vont à l’encontre de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, notamment l’article 2 qui interdit toute discrimination basée sur la race et l’article 5 sur le respect de la dignité de tout être humain.

La commissaire a rappelé que « le discours xénophobe, outrageant, humiliant à l’endroit de la communauté subsaharienne des migrants est inapproprié de la part des plus hautes autorités et qu’il sert au contraire ce détonateur à la résurgence de tensions parmi la population aux conséquences souvent désastreuses ». Dans le même contexte, elle a demandé aux autorités tunisiennes de prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des migrants sur le territoire tunisien et mettre un terme aux comportement et discours de haine qui contribuent à la recrudescence du racisme et qui risque également de toucher les populations tunisiennes de couleur noire.

« La Tunisie est le premier pays en Afrique du nord et au moyen- orient à avoir adopté une loi sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale et qu’à ce titre elle demande aux autorités tunisiennes de reconsidérer ce discours d’exclusion à l’endroit de migrants, accusé d’être à la source de crimes, de violences et d’actes inacceptables, selon la même source. Et d’ajouter que tout le monde peut devenir migrant à n’importe quel moment et que le statut de migrant régulier ou irrégulier ne saurait priver une personne de la dignité qui lui est due en tant qu’être humain », lit-on dans le communiqué.

Ghada DHAOUADI