Le mariage, autrefois considéré comme un jalon important de la vie, connaît un déclin chez les jeunes générations. De plus en plus de jeunes adultes choisissent de repousser ou d’éviter complètement le mariage. Cette tendance peut être influencée par plusieurs facteurs sociaux, économiques et culturels. Selon le dernier bulletin annuel de statistiques (INS), le nombre de contrats de mariage a enregistré une baisse remarquable durant les cinq dernières années 2016/2020. Il s’agit d’une baisse de 198 mille 125 contrats en 2016 à 65 mille 630 contrats en 2020, soit une baisse de 33%.

Toujours d’après l’INS l’année 2020 a enregistré une baisse du taux de mariage estimée à 21% pour atteindre 65 mille 630 contrats contre 83 mille 105 contrats en 2019. Cette baisse du nombre de contrats de mariage a été suivie par une baisse du nombre des naissances durant la période allant de 2016 à 2020, soit un taux de diminution estimée à 20.6%.

Indépendance personnelle ?

Une des raisons qui explique cette tendance d’éviter ou de repousser le mariage, est l’évolution des normes sociales. Les normes sociales en Tunisie ont évolué au fil des années, avec une plus grande importance accordée à l’indépendance personnelle, à l’éducation et à la carrière. Les jeunes Tunisiens cherchent souvent à atteindre leurs objectifs personnels avant de s’engager dans une relation matrimoniale. Ils aspirent à une plus grande autonomie et préfèrent établir leur identité et leur stabilité financière avant de se marier. Et puis l’ouverture sur l’occident et l’influence de la culture occidentale a également joué un rôle dans la façon dont les jeunes Tunisiens perçoivent le mariage. Les modèles de relations informelles, tels que le concubinage ou le partenariat de longue durée, sont devenus plus acceptés et certains jeunes préfèrent ces types de relations plutôt que de se marier officiellement. Mais même si certains désirent se marier, la contrainte majeure demeure dans les pressions économiques. Les difficultés économiques rencontrées par de nombreux jeunes Tunisiens peuvent être un obstacle majeur au mariage. Les coûts élevés associés aux mariages traditionnels, tels que les frais de cérémonie, les cadeaux, les bijoux et les dépenses liées à la vie conjugale, peuvent être difficiles à assumer pour de nombreux jeunes qui cherchent à stabiliser leur situation financière. Dans un contexte économique incertain, où les jeunes font face à des difficultés financières telles que le remboursement des prêts étudiants et l’accessibilité à la propriété, le mariage peut sembler moins prioritaire.

Et comme les temps ont changé et les générations ont évolué, les attentes en matière de relations ont aussi changé. Les jeunes Tunisiens ont souvent des attentes différentes en matière de relations amoureuses. Ils recherchent des partenaires qui partagent leurs valeurs, leurs intérêts et leurs objectifs de vie, et privilégient une communication ouverte, une égalité et une compatibilité émotionnelle. Certaines personnes estiment que ces attentes sont plus faciles à atteindre en dehors du cadre du mariage. Le concept de mariage peut sembler obsolète pour certains, alors qu’ils cherchent des relations plus informelles et flexibles, comme le concubinage… Et puis il ne faut pas oublier un facteur important qui est lié aux expériences familiales et influence de la génération précédente. Les expériences familiales peuvent également jouer un rôle dans la décision des jeunes Tunisiens de bouder le mariage.

Les divorces donnent le change

Le taux croissant et hallucinant des divorces ou des familles dysfonctionnelles peuvent les rendre méfiants à l’égard de l’institution matrimoniale. Ils peuvent préférer explorer différentes formes de partenariats ou choisir de ne pas se marier du tout pour éviter les conflits ou les déceptions vécues dans leur enfance.

Le choix de ne pas se marier ne signifie pas nécessairement un manque d’engagement ou d’amour, mais plutôt une préférence pour d’autres formes de relations ou un désir de se concentrer sur d’autres aspects de la vie. Cependant, il est également essentiel de considérer les implications de ce déclin du mariage. Le mariage offre des avantages juridiques et sociaux, tels que la sécurité financière, les droits parentaux et l’accès aux prestations sociales. En outre, le mariage peut offrir un soutien émotionnel et une stabilité dans les moments difficiles. Il est donc crucial de trouver un équilibre entre l’évolution des normes et des attentes sociales, tout en reconnaissant l’importance de l’engagement et de la stabilité dans les relations. Les gouvernements, les communautés et les institutions peuvent jouer un rôle en fournissant des alternatives au mariage traditionnel, telles que des partenariats enregistrés, des arrangements de vie commune…En fin de compte, le choix de se marier ou non reste une décision personnelle. Il est essentiel de respecter les choix individuels et de promouvoir des relations saines et épanouissantes, qu’elles soient basées sur le mariage ou d’autres formes d’engagement.

Leila SELMI