Entamée depuis la mi-juin écoulée, la campagne de la récolte de la tomate maraîchère en plein champ bat son plein. Tout le monde est mobilisé pour les besoins de la cause et chacun se débrouille à sa façon. Déjà, les étals de nos marchés abondent de ces légumes rouges.

 La récolte s’annonce moyenne aux environs de 700 tonnes produites sur 10 mille hectares .70 mille ont été déjà transformées, annonce Anis Kharbech, agriculteur et membre à  l’Union tunisienne de l’agriculture et de la pêche qui   a précisé que les  superficies emblavées sont passées de 4500 hectares à 3500 ha en 2022 au Cap Bon, à cause des problèmes relatifs à l’irrigation et au manque d’eau mis l’accent sur la crise que traverse le secteur de la transformation des tomates en l’absence d’une stratégie et d’un tarif fixe.

Comme l’a indiqué, le secrétaire général de la Fédération régionale des tomates à Nabeul Mohamed Ben Hassen :« Le coût de production d’un kilo de tomate est trop élevé, y compris les coûts directs, indirects, les frais généraux et les coûts de la main-d’œuvre alors que le prix du kg de vente est en baisse. Nous sommes obligés de payer cher les semences, les plants, les engrais, les pesticides (fongicides, insecticides, herbicides et autres), la main d’œuvre, l’irrigation et l’énergie »

Les insectes s’y mettent eux-aussi

Dans ce sillage, Anis Kerbach  a également fait état de l’apparition de certaines maladies et insectes, telles que le mildiou et  la mineuse qui ont occasionné d’énormes dégâts aux organes végétatifs de la tomate : 70%  El Haouaria et entre 20 et 30% à Korba et Menzel Témime .Cette mineuse de la tomate peut attaquer les plantes à tous les stades, de la plantule à la plante adulte en production. Qu’est-ce qui provoque le mildiou ? La réponse simple serait : l’eau ! Mais en fait, encore une fois, l’eau doit être associée à d’autres facteurs qui vont aggraver la situation et conduire au développement du mildiou. On peut citer le changement climatique, responsable d’épisodes pluvieux plus fréquents, plus violents et plus longs. Ce qui revient à ajouter l’activité humaine comme cause de développement. Mais pour lutter contre cette cause, individuellement, les agriculteurs ne peuvent pas faire grand-chose. On remarque en revanche que les sols trop travaillés par l’homme sont aujourd’hui de plus en plus imperméables. C’est-à-dire que l’eau a plus de difficultés à s’infiltrer jusque dans les nappes phréatiques. En conséquence, les pluies abondantes ont un impact et augmentent l’humidité autour des plantes.La pluie fait intégralement partie du développement du Mildiou. En effet, le champignon se trouve donc aux pieds des plantes dans la terre humidifiée par les précipitations. Cependant, la force des gouttes de pluies qui rebondissent sur le sol projettent le mildiou sur les feuilles des cultures. Le mildiou a donc le champ libre pour infecter son hôte.Il est possible de prévenir les champignons de manière chimique par des produits phytosanitaires.

. Ali, fellah à Korba a estimé que  les grandes pertes qu’ont subies les agriculteurs de la région nécessitent une intervention de l’Etat à travers l’évaluation des sinistres et la compensation de ces pertes dues à cette maladie. Il ajoute que les producteurs des tomates vivent une crise financière aiguë, suite à l’augmentation du coût de la production et à l’accumulation des dettes, tout en appelant à réactiver le fonds des catastrophes naturelles  , évoquant la possibilité de déduire 5 millimes pour un seul kilogramme de tomates comme TVA sur la production et de l’exploiter dans la compensation des agriculteurs au cours de chaque saison.

Face à ce fléau, même les prix des produits phytosanitaires et de l’engrais ont explosé surtout pour les plus employés en raison de leur excellente efficacité. Salah de Tazarka ajoute : « On ne s’en sort plus avec les prix d’achat actuels des tomates sans compter le transport » Anis Kharbech ne mâche pas ses mots « Les fellahs vendent le kg de tomates à 500 millimes. Ces tarifs passent à 1d,500 dans nos commerces.  Les intermédiaires sont pointés du doigt qui détiennent le monopole et imposent ainsi leur diktat, ces derniers maîtrisent à leur guise toutes les combines possibles susceptibles de réguler le marché des légumes et procèdent en toute liberté à la hausse des prix de certains produits.Avec un endettement exponentiel des exploitations et des revenus incertains, les exploitants peinent à honorer leurs échéances de remboursement

Entre producteur et industriel, ce n’est pas la joie

La campagne de transformation des tomates a démarré le 20 juin dernier avec un stock de l’ordre de70.000 t. Dans le but d’absorber l’abondance de la production et diminuer la pression sur les producteurs, près de 22 usines ont commencé l’opération de transformation de façon précoce et avec une capacité maximale.  Le prix référentiel établi cette saison est de 270 millimes le Kg « C’est insuffisant. Ce prix devra passer  à 300 millimes vu le coût élevé de la production »  affirme Anis Kharbech. Il suffit de voir le nombre de tracteurs et camions remplis de tomates en train d’attendre leur tour pour vendre leurs produits à ces industriels. L’établissement du contrat de culture entre le producteur et l’industriel est une grande garantie pour les deux parties car le producteur doit garantir l’approvisionnement de l’industriel en tomates et l’industriel doit s’engager à assurer un prix planché pour le producteur et à s’acquitter du paiement dans un délai ne dépassant pas les trois mois. Ce qui les réconforte et évite certaines tracasseries. Toutefois, ces contrats de production ne touchent que 50% des fellahs. Ce qui est insuffisant à l’heure actuelle et là il faudrait généraliser ces contrats afin de produire plus. Les agriculteurs sont soumis à d’importantes contraintes qui pèsent lourdement sur leur activité et ont évoqué les désagréments causés aux gros tonnages, dont l’attente dans les files peut aller jusqu’à 48h. Une durée qu’ils assurent suffisante au pourrissement des tomates au vu des chaleurs régnantes surtout en cette période de pointe

Il est prévu, cependant, que la campagne actuelle de transformation soit clôturée avec la transformation de quantités oscillant entre 800.000 et 850.000 t de tomates. Les quantités transformées permettent la production de près de 130.000 t de concentré de tomate. Compte tenu du stock restant au niveau des usines et des prévisions de production, il est attendu que les quantités disponibles à la fin du mois d’août 2023 soient de près de 160.000 t  de concentré de tomate.

    Kamel Bouaouina