La Tunisie a interdit d’entrée sur son territoire une délégation du Parlement européen, provoquant de vives réactions des eurodéputés qui ont pour certains réclamé la suspension de l’accord migratoire conclu entre l’UE et Tunis, rapportent des agences de presse internationales. La délégation composée de cinq eurodéputés, dont trois Français, devait se rendre à Tunis jeudi « pour mieux se rendre compte de la situation politique actuelle » et faire le point sur cet accord, précise l’AFP. Emmenée par l’Allemand Michael Gahler (PPE, chrétien-démocrate), elle devait rencontrer des membres de la société civile, des syndicalistes et des représentants de l’opposition tunisienne.

Dans une lettre adressée à la délégation de l’UE à Tunis, les autorités tunisiennes se contentent d’indiquer que ces députés de la commission des Affaires étrangères du Parlement européen ne seront « pas autorisés à entrer sur le territoire national ». « Cette attitude est sans précédent depuis la révolution démocratique de 2011 », ont réagi ces derniers, réclamant une « explication détaillée » à Tunis. Le groupe Socialistes et Démocrates du Parlement européen a réclamé dans la foulée la suspension « immédiate » de ce « partenariat migratoire ».

Signé en grande pompe en juillet à Tunis, ce partenariat est notamment censé faire baisser le nombre de départ de migrants depuis les côtes tunisiennes en échange d’une aide européenne de plusieurs centaines de millions d’euros.

Une porte-parole de la Commission, interrogée sur l’impact de la décision tunisienne, a fait part jeudi de sa « surprise », mais jugé que la poursuite du dialogue était « encore plus importante face aux défis sans précédent que nous rencontrons ». « C’est à la fois étonnant et exceptionnel », a réagi de son côté l’eurodéputé français Mounir Satouri (Verts), membre de cette délégation, interrogé par l’AFP. « J’attends des dirigeants européens une réponse ferme et un soutien franc à notre institution », a affirmé pour sa part un autre eurodéputé français, Emmanuel Maurel (gauche), également membre de cette délégation.

Lors de son discours sur l’état de l’Union mercredi, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen a cité en exemple ce partenariat, critiqué en revanche par une partie des députés européens. « C’est un modèle qui nous rend dépendant de systèmes autocratiques qui ensuite peuvent nous faire chanter », a ainsi déploré l’eurodéputé français Raphaël Glucksmann (groupe Socialistes et Démocrates). « On a déjà eu une expérience avec la Turquie. Avec ces accords on se met dans la main des Etats, et on ouvre la voie au chantage. Ce n’est pas la bonne solution », a déclaré l’élue française Valérie Hayer (Renew Europe, centristes et libéraux).

(avec agences)