Des journalistes de Tunisie, d’Algérie et de Mauritanie ont récemment annoncé leur retrait d’un projet de la Deutsche Welle Akademie en guise de protestation face à ce qui a été qualifié à leur avis de double standard et de couverture médiatique biaisée en ce qui concerne ce qui se passe depuis environ 50 jours à Gaza. 

Les journalistes tunisien.nne.s : Slim Kacem, Najet Fekiri, Naouel El Rebii, Nouha Saadaoui, Bahira Ouji, Jihed Ben Slimen, les journalistes algériens : Yassmine Bou El Jedri, Majda Zouin et Chahreddine Berryah, et la journaliste mauritanienne Mariem Fadhel Abbas sont les signataires du communiqué annonçant ce retrait. La réalisatrice tunisienne Najla Trabelsi fait également partie des signataires. 

Dans le but d’avoir plus d’informations sur cette question, nous avons rencontré le journaliste et initiateur de la chaîne militante pour les droits humains « ROOTS TV », Slim Kacem, qui est aussi graphiste, directeur artistique et réalisateur audiovisuel et créateur de contenu. 

Lors de la déclaration accordée au Temps News, Slim Kacem a indiqué que les auteurs de cet acte protestataire ont constaté dès le début de l’agression sioniste à Gaza la prise de position clairement Pro Israël dans le traitement de l’information par la Deutsche Welle, ce qui a créé un profond malaise au sein du groupe. 

« Nous avons donc envoyé un courrier de protestation à la direction de la DW Akademie, leur rappelant la déontologie du journaliste, qui se doit de rapporter la vérité et rien d’autre que la vérité », a-t-il ajouté. 

D’après ses mots, la Directrice Afrique du nord de la DW Akademie a mentionné dans sa réponse s’agissant de cet acte que l’académie travaillait sur le développement international des médias mais qu’elle faisait partie intégrante du média Deutsche Welle, et qu’à ce titre, leur action respective s’inscrivait dans le même cadre éthique et des mêmes valeurs générales.

« Elle a également proposé un dialogue, mais qu’au final, elle a précisé qu’elle n’avait aucun contrôle et ne pouvait donc exercer aucune influence sur la ligne éditoriale des publications de Deutsche Welle, qui sont, je vous le rappelle, un organe émanant du ministère Allemand des affaires étrangères. Ceci a donc été décisif dans notre motivation de nous retirer du programme, car comment accepter de se faire former par des formateurs qui ne respectent pas la charte du métier ? », a-t-il expliqué. 

 DW Akademie est l’organe de la Deutsche Welle chargé du développement des médias internationaux, de la formation au journalisme et du transmission des compétences. 

Dans le même contexte, Slim Kacem a souligné que « le journaliste libre se doit de respecter l’éthique du métier ». Selon ses dires, le journaliste est souvent confronté au conflit d’intérêt et se doit d’être conscient du poids des mots ainsi que de leur pouvoir de manipulation. Et d’ajouter : « La couverture médiatique du conflit Israélo-Palestinien, a divisé la planète en deux : Des médias influenceurs et influencés par diverses Lobbys et des médias qui défendent la presse libre, indépendante, humaine et juste. D’un côté, nous assistons à un génocide, perpétré par une armée surpuissante, qui ne respecte pas le droit international, soutenue par la première puissance mondiale et complice de crimes de guerre, avec des armements interdits tels que les bombes au phosphore, (nocives pour des centaines d’années). Une douzaine de milliers de morts dont 42% sont des enfants. Des journalistes, des personnels du corps médical et de la protection civile, dans leurs ambulances et engins, sont visés et tués. Gaza est détruite …. Je fais partie du deuxième groupe, ainsi que, heureusement, mes collègues de Tunisie, d’Algérie et de Mauritanie, qui ont démontré leur courage et leur intégrité ».

« J’exhorte aussi tous les journalistes honnêtes à dénoncer la couverture médiatique tendancieuse pratiquée par les médias occidentaux et à se retirer de leurs programmes en signe de protestation … ». 

D’autre part, notre interlocuteur nous a déclaré qu’un concept d’Union des journalistes africains libres est en cours de développement en soulignant que le groupe veillant à l’achèvement de cette initiative compte affilier à la Fédération Internationale des Journalistes. Par la même occasion, Slim Kacem a adressé un appel à tous les journalistes africains à adhérer à cette initiative. À son avis, il est temps de « se libérer du joug des médias soumis aux Lobbies injustes et douteux ».

Il convient de rappeler à cet égard, que le journaliste tunisien, anciennement correspondant en Afrique du Nord de la BBC, Bassam Bounenni, a annoncé en octobre dernier sa démission de la BBC par respect aux règles déontologiques, d’après ses mots. Bassam Bounenni a eu le courage de prendre cette décision alors que la chaîne faisait l’objet d’un nombre d’accusations de manque d’objectivité et de partialité en faveur de l’occupation israélienne. Sa démission présentée dès les premiers jour de l’agression sioniste sur Gaza en un temps record traduit son attachement aux principes déontologiques et éthiques de sa profession. 

Rym CHAABANI