De par son positionnement géographique, la Tunisie, pays situé en Afrique du Nord, dispose d’un potentiel considérable pour exploiter les énergies renouvelables, en particulier l’énergie solaire et éolienne. Grâce à son climat ensoleillé et ses vastes étendues désertiques, l’énergie solaire présente des opportunités significatives pour produire de l’électricité propre et réduire sa dépendance aux énergies fossiles. Or, ce qui se fait dans ce domaine est malheureusement loin de faire profiter le pays de cet avantage naturel…

Il est vrai que la Tunisie a déjà entrepris des initiatives pour promouvoir l’adoption des énergies renouvelables. Cela inclut la mise en œuvre de politiques et de programmes pour encourager les investissements dans les projets d’énergie solaire et éolienne, ainsi que le développement de nouvelles infrastructures pour accueillir ces sources d’énergie propres.

Cependant, malgré le potentiel élevé des énergies renouvelables, il reste encore des défis à relever et des « murs » à franchir. L’investissement dans les énergies renouvelables doit être soutenu et intensifié pour permettre une transition énergétique efficace et réussie. Les parties prenantes de ce gigantesque projet, essentiellement les entreprises et les investisseurs doivent collaborer pour faciliter le développement de projets d’énergies renouvelables à grande échelle et créer des emplois locaux dans ce domaine en pleine expansion.

En parallèle, la Tunisie doit continuer à investir dans la formation et le développement des compétences pour répondre aux besoins croissants du secteur des énergies renouvelables, d’autant plus que la main d’œuvre employée dans le secteur pétro-gazier, qui dispose souvent de compétences transférables, pourrait être formées pour travailler dans les domaines de l’énergie solaire et éolienne, renforçant ainsi le capital humain du pays dans le secteur des énergies propres.

Et il suffit de s’inspirer des exemples d’autres pays ayant réussi leur transition énergétique pour que la Tunisie puisse tirer parti des bénéfices des énergies renouvelables pour stimuler la croissance économique, créer des emplois durables et contribuer à l’effort mondial de lutte contre le changement climatique. En saisissant de telles opportunités, la Tunisie peut jouer un rôle majeur dans la transition mondiale vers un avenir énergétique plus propre et durable qui contribuera à renforcer la résilience du pays face aux défis climatiques et à améliorer la qualité de vie de ses citoyens grâce à un approvisionnement en énergie fiable et respectueux de l’environnement.

Un déficit largement évitable

D’après les chiffres dévoilés par le ministère de l’Industrie, de l’Energie et des Mines, actuellement sans véritable patron, les exportations des produits énergétiques ont enregistré une hausse de 62% accompagnée par un accroissement des importations en valeur aussi de 86% et ce, selon le rapport mensuel sur la conjoncture énergétique publié au mois d’août. Ainsi, le déficit de la balance commerciale énergétique est passé de 2011 millions de dinars (MD) à fin juin 2021 à 4121 MD à fin juin 2022, soit une augmentation de 105% (en tenant compte de la redevance du gaz algérien exportée).

En comptabilisant la redevance, le bilan d’énergie primaire fait apparaître à fin juin 2022, un déficit de 2.4 mégatonne équivalent pétrole (Mtep) contre un déficit enregistré à fin juin 2021 de 2 Mtep. Le taux d’indépendance énergétique, qui représente le ratio des ressources d’énergie primaire par la consommation primaire, s’est situé à 51% à fin juin 2022 contre 57% à fin juin 2021. Et si les chiffres de 2023 ne sont pas encore publiés, il ne faut pas s’attendre à des changements notables à ce niveau.

Néanmoins et face à l’ampleur du déficit énergétique, s’aggravant d’année en année, aucune mesure n’a été prise en matière d’économie d’énergie sachant que le besoin énergétique du pays est de 90.000 à 100.000 barils par jour alors que la production journalière du pétrole ne dépasse pas les 30.000 barils.

D’autre part, les barrières dressées par certains acteurs de l’énergie rendent la mission encore difficile. Selon un membre de l’association professionnelle des producteurs d’énergies renouvelables au sein de la confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie « Connect », nombreux projets de production d’électricité à partir d’énergies renouvelables sont encore inactifs et non raccordés au réseau du Société tunisienne d’électricité et de gaz (STEG).Elle estime que le blocage des projets de production de l’énergie électrique à partir d’énergies renouvelables est dû est principalement au refus du syndicat de la STEG de raccorder les projets avant d’introduire des révisions à la loi réglementant la production d’électricité à partir des énergies renouvelables permettant de préserver les intérêts de l’entreprise publique.

Seulement 2.5% de la production d’électricité proviennent des énergies renouvelables !

A fin juin 2023, la production d’électricité à partir des énergies renouvelables s’est située à 2.5%. Cette part d’énergies renouvelables dans le mix énergétique est composée de 0,41% d’énergie solaire, 2,1% d’éolienne et 0,01% d’hydraulique. Par ailleurs, 182 MW de toitures photovoltaïques ont été installées dans le secteur résidentiel et 304 autorisations ont été octroyées pour une puissance totale de 79 MW dans les secteurs industriel, tertiaire et agriculture. La STEG conserve toujours la part du lion dans la production électrique avec 99% de la production nationale à fin juin 2023. L’électricité produite à partir de gaz naturel (STEG + IPP) a enregistré une diminution de 8%.

En 2021, les énergies renouvelables ont déjà engendré plus de 12,7 millions d’emplois dans le monde, selon le rapport du think-tank REN21. Parmi les secteurs majeurs contribuant à cette croissance, le solaire et l’éolien ont joué un rôle clé en créant près de 13 millions d’emplois à l’échelle mondiale. Cette tendance prometteuse ouvre des perspectives économiques encourageantes, notamment pour la Tunisie, qui vise à saisir ces opportunités pour renforcer sa transition énergétique et son développement durable. C’est dire que face à de telles opportunités, le gouvernement doit faire beaucoup plus pour en profiter.

Kamel ZAIEM