L’écho retentissant de la lutte contre la corruption a traversé les discours du Président de la République, Kais Saied, maintes fois. Une guerre déclarée, persistante, qui demeure ancrée dans l’actualité tunisienne. À chaque proclamation, une nouvelle pièce s’ajoute au puzzle complexe, rendant l’image plus nette tout en laissant planer un mystère persistant. Il semble que mettre définitivement fin à ce fléau insidieux qui touche plusieurs volets de la société, notamment la fonction publique, reste l’un des maux complexes de la Tunisie.

« Plusieurs infractions flagrantes de détournement de fonds publics ont été recensées »

En effet, le gouverneur de Monastir, Mondher Sik, a indiqué qu’un grand nombre de plaintes liées à la corruption ont été déposées auprès de la justice et que plusieurs infractions flagrantes de détournement de fonds publics ont été recensées. Les plaintes adressées à la justice se comptent par dizaines, si ce n’est par centaines (…) Et si nous n’agissons pas maintenant, nous serons des complices, a-t-il ajouté, dans une déclaration à l’agence Tunis-Afrique-Presse.
« Nous privilégions la réconciliation avec les contrevenants (…) et leur avons demandé un règlement avec l’Etat et non avec des personnes ou des partis politiques selon des modes non juridictionnels, comme cela s’est produit auparavant », selon Sik.
Il a, en outre, souligné que les permis et autorisations accordées doivent être basés sur des dossiers réels et non fictifs. Et d’ajouter que l’homme d’affaires ou l’investisseur ne doit pas non plus être soumis au chantage de personnes influentes, qu’il s’agisse de responsables politiques ou administratifs, ce qui était le cas. « Nous disposons de nombreuses preuves irréfutables dans ce sens », a-t-il dit.
Le gouverneur de Monastir a précisé que parmi les dossiers qui seront transférées devant la justice certains sont liés à « des contrats accordant des privilèges et avantages non justifiés, ou encore un favoritisme manifeste et préjudiciable aux deniers publics », lit-on sur le site de l’agence TAP.
Dans un autre contexte, le gouverneur a évoqué les atteintes à l’environnement et à l’urbanisme ainsi que les détournements de fonds, citant en exemple le projet des lotissements touristiques à Dkhila (gouvernorat de Monastir). Le gouverneur a aussi évoqué le terrain du Palais présidentiel de Skanès, cédé par l’Etat et acheté, à 42 dinars le mètre carré, par une société d’études sur la base d’un contrat établi avec le ministère des Domaines de l’Etat et des Affaires foncières, en vue d’y créer un complexe touristique. Ce projet n’a jamais vu le jour et la société a procédé au lotissement du terrain et vendu les lots à des particuliers réalisant ainsi des profits exorbitants, a-t-il déploré.

« Bataille de libération nationale… »!

Rappelons que la ministre de la Justice, Leila Jaffel, avait reçu, le 25 décembre 2023, un groupe de dénonciateurs de corruption. La nécessité d’offrir la protection nécessaire aux dénonciateurs de manière à ce qu’elle se concrétise dans la pratique a été abordée lors de cette réunion, selon un communique rendu public sur la page du ministère
L’objectif étant de s’aligner sur les dispositions de la loi et d’être en phase avec les choix et les orientations de l’Etat visant à faire face aux différentes formes de corruption, de détournement des fonds et d’atteintes à l’intérêt national supérieur.
La ministre a rappelé en outre que le processus de lutte contre la corruption et de dilapidation des fonds publics fait partie intégrante de la bataille de libération nationale prônée par le président de la République à maintes reprises, selon la même source.
Les dénonciateurs ont saisi l’occasion pour faire part de leurs soucis et préoccupations lorsqu’ils procèdent à la dénonciation de faits, actes ou agissements liés à la corruption ou pouvant porter préjudice à l’intérêt national dans certains domaines. Et d’ajouter qu’ ils ont pressé à ce titre le département de la justice à agir sur la voie de la révision du cadre juridique régissant la protection des dénonciateurs de corruption.

Ghada DHAOUADI