La contrebande de cigarettes a connu un essor considérable ces dernières années selon, ce qu’a affirmé la Douane qui a indiqué par exemple par rapport aux années précédentes que 11.575.976 paquets de cigarettes d’une valeur de 28.575.630 dinars ont été saisis en 2019.

Le commerce illicite des cigarettes  a permis la florescence du marché parallèle . c’est du côté des recettes des finances qu’il faut pousser les investigations, car c’est là qu’est gérée la distribution des cigarettes qui est parmi les produits monopolisés.

Ce sont les gouvernorats de Médenine et de Tataouine qui occupent les premiers rangs en matière de saisie de tabac distribué par des circuits illégaux, suivis du Grand Tunis, de Sfax et de Sidi Bouzid. Ce qui a eu de graves conséquences  sur l’économie nationale.

Contrebande et perte inestimables pour la RNTA

La Régie nationale des tabacs et allumettes (RNTA), a subi ces dernières années, par l’effet de la contrebande, des pertes estimées à 1,4 milliard de dinars dont 995 Millions de dinars provenant du Maassel (tabac pour chicha) vendu en dehors des circuits formels, et 400 millions de dinars générés par la vente de cigarettes introduites illicitement dans le pays.

Selon  le président de la Chambre syndicale des Grandes surfaces,  « des études récentes ont révélé que les fumeurs tunisiens dépensent quotidiennement un million de dinars de plus que le coût réel des cigarettes sur le marché ». Autrement dit, « chaque année, par l’effet de la vente des cigarettes à un prix supérieur aux prix fixés légalement pour le marché, les fumeurs dépensent 360 millions de dinars de plus qu’ils ne le devraient »

Que ce soit concernant les cigarettes tunisiennes ou étrangères, les trafics existent toujours et ce sont ces réseaux qui importent clandestinement des pays avoisinants, les cigarettes étrangères. Ce sont des mafieux à la tête de ces réseaux qui commandent le marché. Les prix augmentent d’une façon vertigineuse par les mafieux qui prennent de larges marges bénéficiaires dans lesquelles tous les membres du réseau trouvent largement leur compte, au détriment du consommateur.

Un  trafic qui  profite aux «  Hammas »

Le circuit est le suivant : Les recettes des impôts en Tunisie dans les différents gouvernorats distribuent  les cigarettes à ceux qui ont une licence de débit de tabac, selon un quota déterminé. Or c’est là que le bât blesse, car même à ce niveau il y aurait des préférences et une pratique des deux poids deux mesures. En outre, bien souvent la situation d’indisponibilité de cigarettes, surtout pour défaut de paiement des fournisseurs initiaux surtout concernant les cigarettes étrangères, fait le bonheur des intervenants du circuit de la contrebande. Ce qui se passe c’est que certains parmi ceux qui ont une licence,  qui  viennent s’approvisionner  raflent toute la quantité disponible, c’est-à-dire sans tenir compte du quota.  A leur tour ils refilent aux revendeurs détaillants tels que les propriétaires de kiosques (Hammas) qui mettent le prix qu’il faut, pour revendre au consommateur à un prix astronomique. Or, ni l’agent des recettes fiscales, ni le détenteur de licence n’ont droit de procéder de la sorte. L’agent des recettes fiscales n’a pas le droit de vendre au-dessus du quota au détenteur de débit de tabac et ce dernier n’a pas le droit de refiler toute la quantité aux détaillants. Seulement ils sont obnubilés par le gain illicite. D’autant plus que plusieurs hauts fonctionnaires de la régie de tabac, bénéficient chaque mois de 170 paquets de cigarettes, à titre de prime de dégustation, qu’ils ont le droit de vendre bien entendu.

Pénurie due à la grève des employés des recettes des finances

Quoi qu’il en soit d’autres facteurs ont aggravé davantage le trafic de tabac, tels que les grèves observées de temps à autre par les employés des recettes de finances. Comme ces dernières monopolisent les voies d’approvisionnement officielles des vendeurs de cigarettes, il y a eu une pénurie qui a fait augmenter les prix de 30 à 40% tant concernant les cigarettes locales qu’étrangères. Là aussi interviennent les revendeurs qui appartiennent aux réseaux de marché parallèle et de contrebande pour faire augmenter les prix davantage. A un moment donné le prix de cigarettes étrangères qui est fixé normalement à 7 d 800 millimes, a atteint les 10 dinars.

Actuellement, on n’en est pas loin même si on a dépassé la pénurie et que le prix du paquet n’a pas augmenté. Cela est dû au marché parallèle qui commande toujours les prix au vu et au su, aussi bien de la recette des finances que de la régie du tabac.

A un moment donné, l’Etat aurait autorisé la vente de cigarettes dans les grandes surfaces et ce, dans le cadre d’un accord conclu entre la Régie nationale du tabac et la manufacture des tabacs de Kairouan. Ce qui aurait pour but de libéraliser la vente du tabac et éviter par là-même le trafic. Il serait mis en application début septembre 1021. Cet accord pourrait-il aboutir?  Pourquoi pas ? à moins que  les grands manitous du marché parallèle  s’interposent avec leurs grands moyens….

Ahmed NEMLAGHI