Par Halima Ouanada

     Altérité,  Méditerranéité  et Citoyenneté sont trois concepts qu’il conviendrait, à notre sens, de repenser aujourd’hui dans une perspective de questionnement et partant de renouvellement. En effet, ces trois concepts et en dépit de la divergence apparente sont foncièrement liés, en raison justement de ce rapport à l’autre qu’ils impliquent, interrogent et exigent, que ce soit l’autre dans sa signification humaine absolue, culturelle ou de genre.

C’est en traitant, ou en invoquant ces concepts qu’on pourrait, en effet, envisager un rapport nouveau à l’autre et donc à la vie ensemble. D’ailleurs comme l’explique si bien Michel Foucault « Former des concepts, c’est une manière de vivre et non de tuer la vie ; c’est une façon de vivre dans une relative mobilité et non pas une tentative pour immobiliser la vie. »[1]. En interrogeant ce genre de concepts, érigés souvent en autant d’entités immuables, qu’on pourrait envisager un éventuel renouvellement, de faire tomber les cloisons et de proposer d’autres perspectives de dialogue et de convergence. Lequel dialogue ne peut se faire sans dépassement des différences, des paradoxes, des mythes et sans cette ouverture sincère dénuée de toute volonté de réduction ou d’assimilation.

C’est le concept de Citoyenneté qui doit être pensé d’abord dans son rapport à l’autre immédiat, tout proche qu’est la femme, et à ses droits. Ce qui nécessiterait impérativement d’interroger l’usage politique de l’histoire et le processus d’invisibilisation de l’existence de la femme en tant que partenaire et acteur de changement. Processus qui gagnerait à être revisité et interrogé pour en déceler les failles, lever les ambiguïtés et rectifier le tir dans l’intérêt de tous. Car, dans le contexte actuel pétri de conflit et de violence de tout genre, avant d’envisager un quelconque dialogue avec l’autre lointain, il serait plus urgent, de voyager dans nos fors intérieurs pour les débarrasser de mythes et complexes empêchant le vivre ensemble dans le respect de la citoyenneté de chacun.

C’est ensuite le concept de Méditerranéité, qui doit acquérir ses titres de noblesse et retrouver sa place dans l’objectif d’établir des liens en dehors des sentiers battus. Mais avant, il faudrait le distinguer absolument du terme Méditerranée. Car si les deux mots sont  évoqués souvent et à tort comme des synonymes, c’est le concept de « Méditerranéité » qui promet beaucoup car il porte en lui l’espoir d’un nouvel humanisme en raison justement de son étendue universelle.

Penser l’Altérité du temps présent, enfin, devrait faire l’objet enfin d’une réflexion profonde. En prenant pour point de départ le constat du malaise caractéristique du rapport à l’autre et source généralement d’incommunicabilité et de conflit, on devrait réfléchir ensemble à de nouveaux outils d’analyse, d’interroger les anciennes catégories et d’élaborer des catégories de pensée nouvelles permettant la compréhension, l’ouverture et l’instauration d’un réel dialogue entre individu libre et entre cultures.

A suivre …

Halima Ouanada

Michel Foucault, « La vie : l’expérience et la science », Dits et écrits, t.4, Paris, Gallimard, 1994, p.774-775.