À l’occasion de la Journée mondiale de lutte contre le sida, ce 1er décembre 2021, l’Association tunisienne de lutte contre les maladies sexuellement transmissible et le sida, section de Tunis (ATL MST/SIDA) a organisé une conférence à la Cité des sciences. La chargée de communication de l’association, Balkis Ben Gaga se penche, dans cette interview accordée au Temps News, sur l’état des lieux de la propagation du SIDA en Tunisie et sur les facteurs socio-psychologiques qui l’influent.

LE TEMPS NEWS – Quelles sont les principales missions de votre association ?

Balkis Ben Gaga :  L’association travaille principalement sur la prévention et la  diminution de risque pour les populations qui  en sont exposées (utilisateurs.rices de drogue ; travailleurs.euses de sexe…).

Nous réalisons, tout au long de l’année, des formations et des sessions de sensibilisation, des prises en charge et des activités qui relèvent du VIH. Nous faisons de l’accompagnement pour les personnes vivantes avec le VIH. Notre association mobilise 2 accompagnateurs qui travaillent sur terrain pour faciliter l’accès aux traitements à l’hôpital et aux suivis médicaux des personnes vivantes avec le VIH.

Combien de cas de Sida détectés en Tunisie ?

Cette année, on n’a pas de statistiques spécifiques, mais pour l’année dernière, 6400 personnes ont été  affectées par le VIH. Seulement 30% des personnes connaissent leurs sérologies.

Pour cette raison, nous travaillons sur le dépistage communautaire à Tunis ,à Sousse, à Gafsa et  à Nabeul. Nous avons, également, une application qui nous permet de localiser les centres de dépistage les plus proches. On dispose, aussi, d’un centre d’aide à distance.

Quelles sont les premiers symptômes du VIH ?

C’est une question qu’on nous pose souvent.  Il n’y a pas de symptômes spécifiques. En effet, le VIH attaque l’immunité de la personne. Lorsque la personne devient susceptible aux maladies opportunistes, le médecin l’oriente, directement, vers des analyses comportant le VIH.

Quelles sont les handicaps  subis par une personne  porteuse de  VIH ?

La première contrainte est psychologique. Il est difficile d’accepter qu’on  soit  testé positif. Pour cette raison, nous mobilisons des accompagnateurs pour aider les personnes à consulter un médecin et à  suivre un traitement.

De nos jours, on ne parle plus de personnes qui meurent avec le VIH. On parle, plutôt, de personnes qui sont vivantes avec le VIH. Ce n’est plus une maladie qui tue mais qui nous accompagne toute la vie.

Quel effet  le Covid -19  a-t-elle pu avoir sur le traitement contre le SIDA ?

Pendant cette période du covid-19, on a eu beaucoup moins de visibilité pour certaines de nos activités. Plusieurs personnes vivantes avec le VIH ne peuvent pas quitter leurs maisons à cause du risque d’attraper le virus.

Peut-on dire que la situation du VIH a évolué ces dernières années ?

La situation des personnes vivantes avec le VIH a beaucoup évolué au niveau de traitement. En Tunisie, le traitement est gratuit. Il y a beaucoup d’associations qui travaillent sur la prise en charge, que ce soit sur le plan social, juridique ou psychologique de ces personnes. Malheureusement, il y a toujours une grande partie qui est encore stigmatisée et  en proie à la discrimination.

Quelles sont les principaux préjugés en relation avec le SIDA en Tunisie ?

Généralement, pour les personnes vivantes avec le VIH on croit souvent que c’est une maladie qui s’attrape tel que le covid-19, alors que cette maladie se transmet uniquement par 3 moyens : par le contact avec du sang contaminé, par des rapports sexuels non protégés ou de la mère à son enfant par l’allaitement ou quand elle accouche.

Est-ce que le Sida reste, encore, un sujet tabou ?

Je suis mitigée.

D’un côté, tout le monde en parle aujourd’hui, lors de la Journée mondiale de lutte contre le Sida.

D’un autre côté, on ne parle pas d’éducation sexuelle, ni d’éducation reproductive, tout au long de l’année. Les rapports sexuels non protégés représentent encore un tabou. On ne discute pas de ce sujet avec nos enfants, par exemple. Parlez avec vos enfants, venez faire le dépistage et appelez le numéro d’aide à distance si vous avez des questions. La prévention c’est notre responsabilité à tous.

Interview réalisée par Ghada Dhaouadi