Par Raouf KHALSI
C’est la question qui doit être posée. Faut-il les ennoblir ? Faut-il les brûler ? Faut-il les appauvrir pour que les pauvres s’enrichissent ? Faut-il, encore, les persécuter, les surplomber d’impôts, après que la machine gargantuesque post-révolution les eût soumis au racket des nouveaux « saigneurs » du pays ?
Nous vivons décidément une époque surréaliste. Déroutante. Nous sommes, de surcroît, dans un paradigme nouveau : hommes d’affaires, mais affublés du masque de Satan. La diabolisation atteint des proportions déroutantes, lorsque le Capital prend les connotations péjoratives initiées par Marx.
Dans quelques jours, l’IACE tiendra ses assises, pour se réfléchir, pour comprendre, pour scruter l’avenir. Avec le florilège de nouveaux concepts de l’investissement social, les nouvelles théories du localisme, il n’est pas dit que les hommes d’affaires ne puissent pas y jouer un rôle de locomotive.
Le Président s’est voulu rassurant en recevant M. Bayahi et ses deux adjoints. Une formule en a émergé : «Non à l’économie de rente ». Sauf que les hommes d’affaires honnêtes-et la plupart sont honnêtes- ne sont pas dans ce créneau. Tout juste, demandent-ils l’assainissement du climat des affaires. Ils demandent un cadre juridique et fiscal clair, sur lequel est en train de travailler le ministère des Finances et de l’Appui à l’investissement.
Croire que le Président Saied a une sainte horreur du Capital et des hommes d’affaires serait faux. Tout juste, veut-il faire place nette, nettoyer le monde des affaires des fortunes nées dans une profusion de malversations et d’enrichissement illicite.
Quelque part, Saied rappelle un certain Roosevelt qui a su tempérer le libéralisme décapant pour sortir l’Amérique des années noires. A ses heures, De gaulle a adopté la même démarche pour que naissent les 30 glorieuses.
En tous les cas, le Président a bien réconforté le Président de l’IACE et, à travers lui, nos hommes d’affaires : l’économie tunisienne ne sera toujours que libérale.
Dans ce même ordre d’idées, on voit mal le fameux PPP (partenariat –public- privé) relégué aux oubliettes et on voit mal le Public et le Privé continuer à se regarder en chiens de faïences.
Dans le contexte actuel, un contexte annonciateur de grands changements institutionnels, le Président Saied ne saurait être autre chose que le garant des deux. Un Etat régulateur et un secteur privé garant du libéralisme, là où se meut la croissance.
Au fond, Keynes, le grand théoricien de la macroéconomie a fini par épouser des théories alternatives, se rapprochant, avant terme, du libéralisme économique initié par Friedman.
Et on a bien vu que la symbiose a eu lieu. Et elle a lieu chez nous.