Deux semaines d’ici la fin de l’année et toujours pas de loi de Finances 2022 ! Entre la confiance des responsables et l’inquiétude des experts, on ne sait pas à quel saint se vouer.
La Professeure universitaire et Directrice du Laboratoire d’intégration économique internationale, Fatma Marrakchi Charfi, a déclaré que réellement, ça sera compliqué de structurer le budget 2022 sans l’accord du FMI : « Sincèrement, je ne vois pas comment sans un accord avec le FMI, on peut financer notre budget 2022. Même avec accord du FMI, je pense qu’il va y avoir des modifications au niveau des impôts. S’il n’y aura pas des modifications au niveau des barèmes pour les sociétés ou bien pour l’IRPP par exemple, il y aura certainement une augmentation au niveau de la TVA pour certaines activités ou un réaménagement quelconque au niveau des barèmes, même pour les droits de consommation. Certainement, je ne vois pas d’autres solutions mis à part un accord avec le FMI, qui n’est pas suffisant en lui-même, mais qui reste, tout de même, une locomotive pour drainer les autres ressources des autres bailleurs de fonds multilatéraux (BM, BAD, KFW…) ».
Mme Charfi a rappelé que 40% du budget vont aux salaires, une autre partie dédiée aux interventions des subventions qui ne dépendent pas de nous. Elle dépend, explique-t-elle, des prix internationaux qui sont en train de flamber (prix de l’énergie, frais du blé) : « Nous sommes obligés de subventionner, du moins en vertu du système actuel de compensation, en attendant le train de la réformes».
L’universitaire a fait savoir qu’il n’y a pas trente six mille solutions. Ce sont les recettes fiscales et non fiscales. Les recettes fiscales, c’est essentiellement de l’IRPP et de l’IS. Les recettes indirectes, c’est les taxations (les droits de douane, la TVA et les droits de consommation) ».
« Ça ne marche pas avec des slogans »
Sur ce, Mme Charfi estime que le Gouvernement devrait présenter un programme de réformes qui soit faisable. Le Gouvernement doit présenter sa volonté et la faisabilité des mesures proposées lors du programme de réformes. Et d’ajouter : « Même si on parvient cette année, par miracle à boucler les budgets 2021 et 2022, on n’est quand même pas sorti de l’auberge pour les autres exercices. Il faut absolument entamer les réformes pour assainir le budget de l’Etat, diminuer le trend de vie de l’Etat et réallouer autrement les dépenses de l’Etat tout en ayant un espace budgétaire suffisant pour stimuler l’investissement public. Sans investissement public, l’investissement privé et l’investissement direct étranger ne viendront pas ».
Fatma Marrakchi Charfi précise que ce Gouvernement provisoire doit donner un ensemble de réformes à engager ainsi que des signes au niveau d’une L.F 2022 avec des mesures concrètes qui doivent être mises en œuvre incessamment.
« Il faut que les choses ssoient sérieusement faites avec des ratios, des échéances et avec des objectifs clairs et surtout chiffrés. Les négociations avec le FMI ne marchent pas avec des slogans. De toutes les façons, le Fonds monétaire ne veut pas juste un accord avec le Gouvernement, mais aussi avec les partenaires sociaux », a-t-elle souligné.
« Il faut communiquer »
La Professeure indique qu’il faut communiquer, s’entendre avec les partenaires sociaux en toute transparence.
« Avant d’engager les réformes, une campagne de communication très importante est indispensable pour mettre les points sur les « i ». On ne peut pas emballer et emporter les gens dans un programme de réformes sans une communication suffisante», a-t-elle affirmé.
« Mauvaise chose »
En ce qui concerne le financement de la BCT du déficit du budget 2022, Mme Charfi a déclaré que « dans la loi de la Banque Centrale, il n’y a pas d’articles qui disent que l’Institut d’émission peut financer directement le budget de l’Etat, mais l’année dernière le Gouverneur de la BCT a eu l’accord de l’ARP. Je pense que cette année, l’accord doit être donné par le Président de la République. A mon sens, ce n’est pas quelque chose qui est souhaité. C’est une mauvaise manière de financer le budget de l’Etat ».
Khouloud AMRAOUI