Par Badreddine BEN HENDA
Même si l’on ne partage pas les vues de Kaïs Saïed, il faut reconnaître que, depuis ses décisions du 25 juillet 2021, il a sorti la vie politique en Tunisie d’une certaine torpeur ! Avant cette date, la chose publique et les discours qui y avaient trait devenaient soporifiques. Même les vacarmes quotidiens de l’ex-Assemblée des Représentants du Peuple ne réveillaient plus personne de son sommeil politique. Au contraire, plus on piaillait sous la voûte de l’hémicycle, plus les citoyens ronronnaient. Parce qu’en réalité, le charivari des uns et des autres dans ce temps-là, c’était une forme de ronronnement contagieux. Tout le monde disait à peu près la même chose à propos de tous les sujets.
Les partis politiques ronronnaient, les télévisions ronronnaient, les rues aussi et les cafés et les bars et les salons de chaque maison. Puis, Carthage qui ronronnait aussi, ou qui faisait semblant de ronronner, se mit à sautiller, à bondir, à gambader, à cabrioler ! Et la vie politique de se réveiller en sursaut ! Depuis sept mois, c’est devenu trépidant, vivant, effervescent, agité ! Il ne se passe pas un mois sans nouveau rebondissement, sans tumultueuse relance ! Ça semble cahoter par moments ! On a l’impression d’être soulevé puis immédiatement lâché ! Mais sans heurter outre mesure les corps et les esprits. Les Tunisiens ont salué le remue-ménage et méninges à son début. Ensuite, ils ont failli se remettre à ronronner. Alors Kaïs Saïed s’est remis à « faire du bruit » ! Le scénario fut le même chaque fois que le ronronnement risquait d’assoupir la foule.
Récemment et depuis une quinzaine de jours, c’est la dissolution du Conseil Supérieur de la Magistrature qui a galvanisé l’ambiance. On n’en finit pas de se dégourdir et de se désengourdir depuis juillet dernier. Ça désennuie, ça décarcasse, ça empêche de s’assoupir. C’est bien, en somme ! A propos de « somme » justement, les Tunisiens n’ont rien -non plus- contre quelques petits instants de ronronnement ! Ils adorent roupiller ! Un somme n’a jamais fait de mal à personne. Au contraire ! La sieste, ah ! la sieste ! La grasse matinée, ah ! la grasse matinée ! Nous aimons somnoler ! Nous adorons Morphée et ses bras ! Alors, nous réveiller de temps en temps, d’accord ! Mais ne nous privez pas de ronronner la plupart du temps. Car nous sommes devenus des « ronronneurs » dépendants.
Ce qui nous convient le mieux, en politique comme en tout, c’est le « lentement le matin, pas trop vite le soir » ! En fin de compte, la trépidation n’est pas toujours bonne pour nos corps et nos esprits. Nous appréhendons certains tumultes et certaines effervescences car elles risquent de finir en explosions. Nous n’aimons pas les explosions; même les explosions de joie nous font peur. Notre rythme préféré se situerait entre les deux extrêmes que sont le ronronnement et la trépidation. Alors, de grâce, ménagez nos cœurs et roulez tous lentement et raisonnablement ! Nous en avons assez des excès de… vitesse !