Le premier tour de l’élection présidentielle française se tenait ce dimanche 10 avril. Il a vu le président-candidat, Emmanuel Macron, et la candidate d’extrême-droite, Marine Le Pen, se qualifier au second tour au détriment de Jean-Luc Mélenchon, troisième. En Tunisie, les 17 000 Français inscrits sur la liste électorale consulaire de Tunis ont placé l’actuel locataire de l’Élysée devant (45%) devant le leader de l’Union populaire (37,0%) avec un taux de participation évalué à 42,0%.
C’est sous un soleil de printemps que les quelque 17 000 Français résidant en Tunisie étaient appelés à voter pour le premier tour de l’élection présidentielle, en ce dimanche 10 avril. À Tunis, le collège Pierre Mendès France faisait office de bureau de vote à l’instar du Consulat général et de l’Ambassade de France.
Trois agents de sécurité sont plantés sur son parvis, échangeant entre eux en arabe. L’immense portail métallique blanc est ouvert laissant les votants s’avancer vers une longiligne femme blonde qui contrôle leur pièce d’identité. Il est conseillé de porter un masque même si celui-ci n’est pas obligatoire.
Dans la cour extérieure du lycée, Marie* attend son époux assise à l’ombre, abritée par un arbre. Cette retraitée, qui vit en Tunisie depuis un demi-siècle, a voté « Mélenchon ». Par conviction ? Pas tout à fait. « C’est pour barrer la route à l’extrême droite ». Elle, qui ne se considère ni de gauche, ni de droite, estime « qu’il ne pourra pas appliquer son programme au vu du contexte international ». Elle est rapidement rejointe par Moncef, son conjoint également retraité. « Il a voté comme moi » assure Marie. « C’est ce que tu crois ! » rétorque-t-il en éclatant de rire. « Les promesses électorales n’engagent que ceux qui les croient par ceux qui les donnent » lâche Moncef sur un ton caustique, avant d’ajouter, plus pragmatique « mais il faut voter ».
Le choix du vote utile
Même bureau, autre génération. Laila*, la trentaine, a trouvé la campagne « inquiétante, marquée par un débat identitaire et une fragmentation de l’électorat de gauche ». Elle a longtemps hésité entre deux candidats : Jean-Luc Mélenchon et Yannick Jadot. C’est finalement le leader de l’Union populaire qui a eu ses faveurs, invoquant un « vote utile ».
Vote utile également avancé par Moez. Pour faire barrage à Eric Zemmour, ce franco-tunisien a voté… « Marine Le Pen ». Électeur d’Emmanuel Macron en 2017, il a été « déçu » par le quinquennat du président. Il émet des doutes sur la capacité du futur locataire de l’Élysée à influer sur la politique nationale : « Les pays ne sont plus indépendants, ils sont pris en tenaille par l’OTAN, l’Union européenne… Il n’y a pas de candidats qui puissent répondre à cela ». Marine Le Pen garde, au moins, « une ligne conductrice claire » selon lui.
Des médias pas « à la hauteur de l’événement »
Pour Bruno*, professeur d’école, la campagne « va générer beaucoup d’abstention » et ceux pour plusieurs raisons : « Le ras-le-bol des Français, le traitement médiatique et le manque de confiance envers les hommes politiques ». S’il estime que l’extrême-droite a légitimement sa place sur l’échiquier politique, ce n’est pas le cas du « racisme, de la xénophobie et de l’homophobie ». « Ce ne sont pas des opinions, ce sont des délits ! » peste-t-il. Selon lui, les médias ont une part de responsabilité importante dans la montée de l’extrême-droite. « Certains journalistes ne bossent pas assez leur sujet quand ils s’attaquent à l’extrême droite. De l’autre côté, on sent qu’ils font le job, qu’ils connaissent leurs dossiers ». Son bulletin ira finalement pour Mélenchon même si quatre candidats sont « en cohérence avec ses idées ».
En ce jour de premier tour, les électeurs ont la dent dure contre les médias. « Le traitement médiatique français n’était pas à la hauteur de l’événement. On a plus parlé des petites phrases que des sujets de fond. On a eu beaucoup trop de désinformation et très peu d’information ! » Considère Luc*, qui ne souhaite pas révéler le nom du bulletin qu’il a placé dans l’urne.
En 2017, les Français de Tunisie avaient voté à 36,8% pour Emmanuel Macron suivi de très près par Jean-Luc Mélenchon avec 32,11% des voix. François Fillon était arrivé troisième (19,18%) loin devant Marine Le Pen (3,31%) pourtant qualifiée pour le second tour.
Théodore Laurent
Théodore LAURENT
* les prénoms ont été changés