La publication du décret présidentiel n° 2022-516 du 1er juin 2022, relatif à la révocation de magistrats, n’a pas touché seulement les magistrats, mais aussi la société civile, les partis, les personnalités nationales et publiques et, bien évidemment, les juristes et les avocats.
Les différents points de vues et autres positions ont attisé la polémique et la controverse . Fort probablement , cela va évoluer pour provoquer aussi des divisions au sein de certaines structures professionnelles et associatives.
Un communiqué exprimant un nombre de positions a été publié mercredi soir, portant les signatures des 5 membres du bureau exécutif de l’Association Tunisienne des Jeunes Avocats (ATJA) suivants :
-Maître Haifa Dridi
-Maître Adnene Laabidi
-Maître Nidhal Salhi
-Maître Taher Dallali
-Maître Youssef Beji
Ces membres ont mentionné qu’exprimer des positions est devenu impossible dans le cadre ordinaire de l’association à cause de ce qu’ils considèrent comme une perturbation au niveau de la gouvernance démocratique participative au sein du bureau exécutif de l’ATJA.
Ce communiqué a souligné, en outre, le rejet ferme de la dernière déclaration de l’ordre national des avocats , considérant que le contenu de cette déclaration a dévié des normes basiques sur lesquelles les avocats ne peuvent pas être en désaccord, et a également entaché tous les principes de la profession en profondeur.
Dans le même contexte, les avocats signataires ont dénoncé le silence « suspect et déroutant» du barreau face au ciblage et à la privation d’exercer sa profession d’avocat à l’encontre de l’un de leurs collèges.
Pour sa part, Maître Nidhal Salhi a déclaré que l’association « mère» ne sera en aucun cas un foyer de division professionnelle, ni qu’elle ne saurait devenir l’extension du bras du Pouvoir actuel.
« Cette déclaration historique est écrite par les jeunes avocats fidèles à l’histoire de leur association. Dans les phases nationales, des déclarations pareilles deviennent une boussole pour ceux qui se sont éloignés des nobles principes de la loi » a-t-il ajouté.
Et concernant la controverse suscitée par la révocation de 57 magistrats, le membre du bureau exécutif de l’ATJA, Maître Nidhal Salhi avait déjà considéré que l’ordonnance présidentielle concernant cette affaire, prise sur la base de simples « délations »,décision unilatérale et sans fondement juridique avec usurpation des droits de la défense, représente une grave déviation du pouvoir et un pas en arrière.
« Nous avons été les premiers à demander l’activation des dispositions du décret 80 de la constitution tunisienne avec la conviction que la situation politique, sociale et économique du pays à l’époque n’était plus viable, et est devenue une menace sérieuse pour les droits du citoyen et pour la continuité de l’État en général. Pour cette raison que nous avons exigé, au cours du 14 janvier 2011, la dissolution des organes constitutionnels et des conseils mis à jour et l’activation de la responsabilité et de la responsabilité judiciaire qui soit réussie, équitable et visant à rétablir la considération du citoyen touché et à indemniser les dommages causés à l’état conformément aux droits de l’homme et aux principes juridiques établis par l’état des droits et les institutions démocratiques. Malheureusement, il y a eu des déviations. L’autorité dirigeante a adopté aujourd’hui l’approche de l’abus, de l’intimidation et du fait accompli d’une seule autorité en activant des punitions collectives visant à exploiter les organes de l’État pour s’attaquer aux opposants politiques.» a-t-il expliqué, soulignant que ça représente son opinion personnelle et n’engage personne d’autre.
Pour rappel, le communiqué du conseil de l’ordre national des avocats, datant du20 juin 2022, a appelé le ministère de la Justice et le Conseil suprême intérimaire de la magistrature à trouver des solutions urgentes et adéquates pour assurer la continuité des établissements judiciaires et pour garantir le droit des citoyens d’accéder à la justice.
Soulignant la position de principe du barreau refusant le jugement de civils par des tribunaux militaires, le Conseil de l’Ordre national des avocats tenait à mentionner, en outre, que les partis au pouvoir au cours de la dernière décennie sont pleinement responsables des conséquences de la non-réforme du système juridique.
« Tout en adhérant au principe de l’État de droit fondé sur la présomption d’innocence, le droit à la défense , la responsabilisation et l’impunité, le Conseil de l’Ordre considère que la poursuite de la grève des juges pour la troisième semaine consécutive, ainsi que son illégalité en termes de violation des lois applicables restreignant la grève, contredit également les exigences de l’exercice du droit syndical exigeant la continuité du fonctionnement de l’établissement public, et porte atteinte aux droits des citoyens à l’accès à la justice », indiquait le communiqué publié au nom du Conseil de l’Onat.
Rym Chaabani