La saison estivale semblait bien engagée pour ces pros avec des premières tendances positives. Il est vrai que les touristes expriment un profond besoin d’évasion. En cette période de forte morosité économique,, plusieurs hôtels à Djerba, Sousse, Mahdia Tabarka et Hammamet , s’attirent en effet les faveurs des touristes tunisiens sans oublier les quelques touristes européens
L’heure des grands départs en vacances a sonné .Les Tunisiens ne renoncent pas aux vacances mais feront attention à leurs dépenses. Pour partir au meilleur coût, ils réservent de plus en plus tard et profitent ainsi des bons plans de dernière minute. Mais s’ils veulent partir en vacances, ils payeront chers juillet et août ,le pic de la saison .
Globalement, les hôtels font 80 % du chiffre d’affaires qu’on fait habituellement en juillet-août. Mais il nous manque quand même toute cette partie très internationale qui fait l’apanage de l’Europe d’habitude et qui manque à l’appel cette année.Les hôtels n’affichent pas complet. Jadis, en pareille période, les chambres libres dans certains hôtels de la côte de Hammamet étaient rares. Juillettistes et aoûtiens seront –ils nombreux cet été ?
Le Conseil national de la Fédération Tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) a affirmé, dans un communiqué, que la saison touristique n’est pas en mesure de reprendre son rythme normal. « L’absence de touristes russes, les moyens limités dont dispose le transport aérien et l’absence de l’appui gouvernemental, sont à l’origine de cette crise. Les hôteliers font face à un problème de manque de liquidités, en raison du refus des banques de financer le secteur et de l’absence de lignes de crédit exceptionnelles dédiées à cette activité. 30% des unités hôtelières n’ouvriront pas leurs portes au cours de cette saison. Cette crise survient sur fond de manque de visibilité, de hausse des prix, et du faible appui de l’Etat ».
Al Kantaoui et Djerba
Les avis des professionnels sont partagés. r Anis Meghirbi, directeur commercial à la chaîne Seabel Hôtels a estimé que « Juillet s’annonce bon à Port El Kantaoui et à Djerba. Il est indéniable que la réouverture des frontières avec l’Algérie le 15 juillet 2022, donnera une sacré bouffée d’oxygène pour les hôtels de la région du Cap-Bon en particulier, mais également pour les restaurants et autres commerces ».
Mouna Allani Ben Helima, hôtelière à Hammamet, n’est pas de cet avis «. Regardez les chiffres de juillet 2014 et vous serez surpris de l’effondrement de nos marchés traditionnels européens. Je pense qu’on tourne en rond depuis des années sans vouloir regarder en face le pilier de tout pays touristique qui se respecte : l’accessibilité aérienne. On continue à vouloir protéger une compagnie aérienne qui dispose d’à peine une quinzaine d’avions qui volent, au nom d’un dogmatisme et d’une bêtise sans bornes… On ne peut prétendre être une destination touristique tant que nous ne sommes pas desservis par les géants actuels de l’aérien : les compagnies low-cost. Les 3 destinations couvertes par Easy Jet (Londres, Manchester et Genève) c’est un début, mais très insuffisant pour faire face à l’énorme demande du marché européen pour la destination Tunisie. Je ne comprends pas comment, au nom d’une idéologie économique et sous le diktat des syndicats, on peut s’offrir le luxe de se passer de millions de touristes en demande de venir en Tunisie et qui ne trouve pas de places dans les avions, ou alors à des prix complètement irréalistes à cause de l’étroitesse de l’offre et de l’immensité de la demande. J’ai des clients français qui voulaient venir en juillet et qui ont différé leur séjour à septembre à cause des prix des billets d’avion. Eux sont retraités et peuvent changer de dates, mais plein d’autres iront ailleurs car ils ne peuvent prendre des vacances qu’en juillet. Quant aux algériens, ils commenceront à remplir nos hôtels d’ici une semaine.
Hausse des tarifs des séjours hôteliers
Moez Kacem expert en tourisme estime qu’il y a plusieurs facteurs qui expliquent ce manque de fréquentation des hôtels classiques, notamment le retour des marchés européens qui n’est pas total par rapport à la période avant covid19. Ce type de clients conventionnels est en deçà des niveaux habituels. Il est dû aux difficultés vécues par les compagnies aériennes, la hausse du taux d’inflation dans plusieurs pays européens et les mesures d’encouragement intra-européen. Les marchés maghrébins, libyen et algérien, n’ont pas repris leur rythme et les frontières sont toujours fermées. Ces deux marchés représentent plus de 45% des arrivées en 2019. Leur absence est certainement impactante. Le marché local est négativement influencé par la hausse des tarifs des séjours hôteliers. Étant conjuguée avec la baisse de la qualité des services et la dégradation de la réputation de certains établissements, la demande se trouve concentrée sur un nombre plus réduit d’unités. Ceci a conduit à une redistribution de l’occupation et des tarifs (des décalages flagrants apparaissant) . Ceci a boosté le tourisme alternatif où la quote-part des lits en exploitation réservée aux hébergements alternatifs a augmenté considérablement sur ces 3 années. Une bonne partie de la demande s’est orientée vers ce type en fuyant la masse, en cherchant des produits plus personnalisés et surtout en optant pour une qualité plus sobre Une hausse notable de la fréquentation est attendue à compter de la 2e quinzaine de juillet avec l’ouverture des frontières avec l’Algérie et le retour de la diaspora mais attention à l’effet retour de la manivelle. Une mauvaise expérience de voyage risque de générer une chute drastique des ventes pendant l’arrière saison »
La seule lueur d’espoir est le marché algérien
L’été s’installe avec ses températures caniculaires, ses longues journées et ses envies d’évasion. Des envies difficiles à satisfaire en ces temps de grandes incertitudes sur les plans social et économique. Les gens n’ont pas les moyens de s’offrir des vacances. Hatem Kéchine, hôtelier avoue que « les hôtels sont très peu remplis. Le marché Russe est fermé pour très longtemps. L’aérien est pénalisé. Le chaos se poursuit dans les aéroports européens avec encore plus de vols annulés ou retardés, de bagages perdus et de passagers en déroute. Le retour du COVID risque aussi de créer beaucoup d’annulations. La seule lueur d’espoir est le marché algérien qui vient de s’ouvrir avec beaucoup de retard .Mais attendons pour voir cette nouvelle donnée dans les prochains jours »
Il est vrai que familles algériennes optent pour la Tunisie en cette période estivale ,non seulement à cause des prix attrayants qu’elle affiche, mais aussi parce qu’elle est accessible par route et parce qu’elle répond à leurs attentes. Aux yeux des Algériens, avides de plages dorées, la Tunisie représente une destination très prisée. Pourquoi faire la queue devant les ambassades européennes, alors qu’on peut passer des vacances agréables, à moindre frais, chez les voisins. Il est très tôt pour évaluer les réservations, car le marché algérien est le marché de last minute par excellence. Cependant comme l’affirme Sami, un agent commercial « les algériens optent souvent pour la location des résidences. Sur un million, seulement 30% séjournent en hôtels. Mais leur impact commercial est important sur la population locale.»
Kamel Bouaouina