Les professionnels tunisiens ont enfin le sourire. Leur saison estivale s’annonce en effet plutôt bien. Les réservations s’accélèrent en cette période estivale. Et pour cause, à partir de ce vendredi 15 juillet 2022, les voyageurs algériens seront autorisés à franchir la frontière terrestre pour se rendre en Tunisie. La décision de la réouverture des frontières terrestres entre la Tunisie et l’Algérie a été accueillie avec joie par les citoyens algériens et surtout par les professionnels du tourisme dans les deux pays et sera suivie par un rush des touristes algériens vers la Tunisie durant cet été.
La présidente de la Fédération tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) Dorra Miled a souligné l’impact de l’absence de plus de 3 millions d’Algériens sur le tourisme tunisien, depuis 2 ans, à cause de la fermeture des frontières terrestres entre les deux pays.93 % des touristes algériens passent par les frontières terrestres vers la Tunisie.
Un chiffre qui donne une idée sur les pertes subies par la Tunisie en raison de cette fermeture des frontières. Selon elle, les professionnels du secteur tablent sur la réouverture des frontières pour réussir la saison touristique 2022 en Tunisie, après deux années de crise due à la pandémie.
Depuis la fermeture des frontières, le nombre de touristes algériens en Tunisie a connu une chute drastique. Selon les chiffres de l’Office national tunisien du tourisme (ONTT), le nombre de touristes algériens ayant rejoint la Tunisie de janvier à mai 2022 n’a pas dépassé 36 000 touristes. Un chiffre qui révèle l’impact négatif de la fermeture des frontières terrestres sur le flux de touristes algériens. Ceux qui optent pour un voyage par avion sont confrontés aux prix exorbitants des billets .
Une véritable bouffée d’oxygène pour les deux pays
Le président de l’association « Tourism Labs 24 », Hedi Hamdi, a estimé que les Algériens aiment la Tunisie et les derniers chiffres enregistrés en sont la meilleure preuve. En effet, en 2019, pas moins de 3 millions de touristes algériens ont visité la Tunisie. 93% d’entre eux sont entrés par voie terrestre alors que 7% seulement sont venus par voie aérienne. A eux seuls, ces deux indicateurs sont suffisants pour montrer l’importance énorme de l’ouverture de la frontière terrestre avec l’Algérie… L’absence de nos amis algériens, durant les deux dernières années, a pesé lourd sur tout le pays, notamment sur la région du Cap Bon (notamment Nabeul et Hammamet) et celles de Tabarka, Sousse, Djerba
Mohamed Chaïb, président du Forum algériendes agences de voyages, confie à ce sujet qu’«on attendait avec impatience cette réouverture des frontières. Il n’est jamais trop tard pour bien faire». Il estime ainsi que cette annonce est une véritable bouffée d’oxygène pour les agences et les touristes algériens qui veulent souffler et ont besoin d’un peu d’évasion après deux ans marqués par la Covid». Il enchaîne qu’«il faut maintenant agir très vite par rapport au potentiel de la clientèle algérienne qui attendait également avec impatience la réouverture des frontières terrestres avec la Tunisie». Mohamed Chaïb tient ainsi à souligner que la destination Tunisie est très appréciée par les Algériens à cause «du coût relativement bas par rapport aux autres destinations».
Mohamed Amine Berredjem, président de l’Association algérienne des agences de voyage, a indiqué qu’«Le parc hôtelier en Algérie dispose de moins de 50.000 lits dans les zones balnéaires et nous avons une population de plus de 40 millions de personnes. Si 10% seulement de la population veulent trouver une place dans les hôtels, il est clair qu’ils n’en trouveront pas. Cela traduit que nous avons donc un grand déficit dans notre parc hôtelier. Ainsi, la cherté des hôtels est liée à la loi de l’offre et de la demande, et chez nous, la demande est bien plus élevée que l’offre. C’est ce qui explique que beaucoup d’Algériens choisissent la destination Tunisie car en Algérie le parc hôtelier est insuffisant, entre autres.».
Dans une déclaration au journal Echorouk algérien, le président du syndicat algérien des agences touristiques, Nadir Belhadj, a révélé qu’un million de touristes algériens vont visiter la Tunisie cet été.Les agences touristiques algériennes « se sont déjà préparées à lancer des offres touristiques attractives pour les Algériens dans les différentes villes tunisiennes . Les Algériens préfèrent se rendre en Tunisie où les prix des hôtels sont attractifs par rapport à ceux pratiqués en Algérie ». D’ailleurs, les agences de tourisme ont trouvé des difficultés pour les réservations, car « 80 % des hôtels en Tunisie affichent complet », ajoute le responsable du syndicat algérien.
Nacéra Moumen de l’agence algérienne Voyage du cœur, confie au site « Reporters » que «cette annonce est un véritable soulagement que ce soit pour les citoyens ou pour les agences de voyages». Elle ajoute dans ce sillage : «C’est vrai que la pandémie a permis aux Algériens de découvrir le tourisme local, malheureusement, avec un déficit flagrant d’hôtels, cela ne peut pas répondre à la demande de tous les Algériens. Cette réouverture est une véritable bouffée pour les Algériens et surtout les familles avec des enfants de passer des vacances en Tunisie dans des hôtels de dimension internationale en plus de meilleures prestations que celles que propose le tourisme algérien».Elle explique le soulagement des agences de voyages : «On est pratiquement restés deux années sans travailler en sachant que la Tunisie est une destination qui est beaucoup appréciée par les Algériens.»
La grande mobilisation
Neuf postes frontaliers qui ont été ouverts à la frontière avec la Tunisie, à savoir OumTeboul et Laâyoun au niveau de la wilaya d’El Tarf, Ouled Moumène et Lahdada dans la wilaya de Souk Ahras, Lamridj, Ras El Aâyoun, Bouchebka et Tebiba, au niveau de la wilaya de Tébessa, et Tayeb El Arbi au niveau d’El Oued, plus au sud. Les touristes algériens sont invités à se rendre vers ces différents postes frontaliers afin d’éviter la pression sur Oum Teboul. Une batterie de mesures spéciales afin de faciliter les formalités d’usage au niveau des postes frontières, en sus d’un ensemble d’autres mesures de sûreté afin d’assurer la sécurité des personnes et des biens. Des moyens matériels et des équipements sont en outre installés sur les lieux de transit afin de réduire au maximum le temps d’attente et accélérer le passage des citoyens.
Avec un tel dispositif, les touristes algériens ne seront plus contraints de passer la nuit sur le chemin de leur destination de vacances et d’échafauder moult scénarii pour gagner rapidement les portes de la Tunisie. Il sera exigé aux passagers algériens, en plus des documents habituels, le pass sanitaire avec les 3 doses de vaccin ou un test PCR de moins 72 heures
ll est vrai que la demande touristique algérienne reste marquée par la prédominance du tourisme familial, de santé et de shopping, le caractère tardif des réservations et la recherche du facteur qualité/prix. La plupart des algériens optent pour les résidences du 15 juillet au 15 septembre. Ce qui explique le nombre limité des nuitées. Les Algériens préfèrent les 3, 4 et 5 étoiles. La durée du séjour oscille entre 10 et 15 jours. C’est donc un marché porteur. La moyenne des dépenses de la famille algérienne est de l’ordre de 2500 euros.Ce tourisme a aussi ses exigences. C’est pourquoi plusieurs professionnels ont développé les appart’hôtels qui sont très demandés par les Algériens, adapter les services hôteliers aux besoins de cette clientèle et mettre des voyages organisés tout en leur offrant des prix préférentiels
En Tunisie, qui fait face à une cruelle crise économique faute précisément des rentrées de l’activité touristique, il y a eu des manifestations de joie à l’annonce du retour des touristes algériens. Depuis la fermeture des frontières au mois de mars de l’année dernière, notre activité a énormément baissé. On travaillait beaucoup avec nos voisins algériens, du coup, aujourd’hui, on ne travaille quasiment plus. Il arrive parfois que je ne vende aucune pièce pendant toute une semaine. », se plaignait un artisan tunisien.
«Nos voisins algériens font booster notre économie .Du coup, les hôtels fonctionnent, les magasins fonctionnent, et même les petits commerçants, les épiciers et les vendeurs de légumes profitent de cette clientèle algérienne», avait déploré cette dame qui avait insisté sur le fait que «depuis cette fermeture, les conséquences sont lourdes pour tout le monde».
Toutes les villes côtières attendent le grand rush de nos voisins algériens« A Nabeul, on se prépare pour l’accueil de nos voisins algériens. Nous attendons depuis mai l’ouverture des frontières entre les deux pays après une disette qui n’a que trop duré.» , commentait Am Salah qui attend cette période estivale pour louer ses trois studios
Kamel BOUAOUINA