Alors que Pékin, furieux de la visite de Nancy Pelosi à Taïwan, multiplie les exercices militaires, la présidente de la Chambre des représentants américaine a assuré, vendredi, depuis Tokyo, que les États-Unis « ne permettront pas » à la Chine d’isoler l’île de 23 millions d’habitants. En représailles, Pékin a annoncé vendredi « imposer des sanctions » à l’encontre de Nancy Pelosi et de « sa famille proche ».
Après les menaces, les actes. En représailles à la visite de la cheffe des députés américains Nancy Pelosi à Taïwan, Pékin a annoncé vendredi qu’il allait lui « imposer des sanctions » ainsi qu’à sa « famille proche ». Nancy Pelosi s’est « gravement ingérée dans les affaires intérieures de la Chine et a porté atteinte à sa souveraineté et à son intégrité territoriale », a indiqué le ministère des Affaires étrangères, sans donner de détails sur ces sanctions. Les autorités chinoises ont également suspendu leur coopération avec les États-Unis sur plusieurs dossiers, notamment sur le changement climatique, le rapatriement des migrants illégaux, ainsi qu’en matière de justice, de criminalité transnationale et de lutte anti-drogue.
Ces dernières années, la Chine a imposé des sanctions à de nombreux représentants américains pour avoir agi, selon elle, contre ses intérêts et s’être exprimé sur les droits de l’Homme concernant Hong Kong et le Xinjiang (nord-ouest), parfois sans spécifier la nature de ces sanctions. En mars, Pékin avait appliqué des restrictions de visas à une liste non rendue publique de fonctionnaires américains qui auraient « inventé des mensonges sur des questions de droits de l’Homme impliquant la Chine ».
Nancy Pelosi, 82 ans, qui était au Japon – dernière étape de sa tournée asiatique – pour la première fois depuis 2015, a provoqué la colère de la Chine en se rendant deux jours à Taïwan. Pékin considère ce territoire autonome de 23 millions d’habitants comme faisant partie intégrante de son territoire, et a répliqué en lançant, jeudi, des exercices militaires d’ampleur inédite autour de l’île, tirant notamment des missiles balistiques dont certains seraient tombés dans la zone économique exclusive du Japon.
« Les Chinois ont procédé à ces tirs, utilisant probablement notre visite comme un prétexte », a commenté Nancy Pelosi lors d’une conférence de presse, vendredi, à Tokyo. Ils « ont essayé d’isoler Taïwan », a-t-elle ajouté, rappelant que Pékin avait, au printemps, rejeté l’appel des États-Unis à autoriser la participation de Taïwan à l’assemblée annuelle de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Mais « ils n’isoleront pas Taïwan en nous empêchant de nous y rendre. Nous avons eu des visites de haut niveau, des sénateurs au printemps, de manière bipartisane (…), et nous ne leur permettrons pas d’isoler Taïwan », a-t-elle lancé. « Ils ne décident pas de nos déplacements. »
« Cette tournée dans la région ne visait pas à changer le statu quo ici en Asie, à changer le statu quo à Taïwan », a assuré Nancy Pelosi. Cette visite, a-t-elle dit, « concernait le Taiwan Relations Act », loi votée par le Congrès américain en 1979 et qui caractérise les relations entre les États-Unis et Taïwan, mais aussi « la politique États-Unis-Chine, tous les textes de loi et accords qui ont établi ce que sont nos relations ». « Il s’agit de célébrer Taïwan pour ce qu’elle est, une grande démocratie avec une économie prospère, avec du respect pour toute sa population. »
Concernant les relations sino-américaines, elle a jugé que si les États-Unis « ne s’exprimaient pas au sujet des droits de l’Homme en Chine à cause de (nos) intérêts commerciaux, nous perdrions alors toute autorité morale pour parler des droits de l’Homme n’importe où dans le monde ». Depuis 1979, Washington ne reconnaît qu’un seul gouvernement chinois, celui de Pékin, tout en continuant à apporter un soutien aux autorités taïwanaises, notamment par le biais d’importantes ventes d’armes. Une posture qualifiée de manière quasi proverbiale d’« ambiguïté stratégique ».
(avec agences et médias)