Une précision de taille avant de commencer : On ne dit pas « infractus » comme c’est communément prononcé par la plupart de nos pairs mais infarctus désignant une partie du muscle cardiaque ( myocarde) infarcie, perdue, nécrosée par manque d’apport d’oxygène.

Sommaire rappel anatomique

Le cœur est formé par quatre cavités (deux oreillettes et deux ventricules) par où transite toute la masse sanguine. Il s’agit d’une pompe mécanique composée de deux compartiments distincts gauche et droit. Le sang veineux riche en CO2 (bleuté) est reçu par l’oreillette droite, passe par le ventricule droit qui le propulse vers les poumons pour y être purifié et enrichi en oxygène. Retour (sang rouge rutilant) vers l’oreillette gauche, le ventricule gauche qui par le biais de l’aorte le dispache vers toutes les parties du corps. Curiosité, le myocarde ne puise pas son oxygène directement des masses sanguines qui transitent par ses cavités. De fines artérioles (coronaires) prenant leur naissance depuis l’aorte assurent l’irrigation de cet importissime muscle ou pompe. Ces artères coronaires peuvent s’obstruer « partiellement » lorsque du cholestérol (graisses) s’accumule, sous forme de plaques d’athérome sur leurs parois. Les parois artérielles durcissent (athérosclérose) et le cœur n’est plus suffisamment alimenté en oxygène. C’est la maladie coronarienne ou angine de poitrine ou Angor ou syndrome de menace. L’infarctus du myocarde survient lorsqu’une plaque se détache, puis se déplace et s’immobilise dans une artère coronaire. Un caillot de sang se forme autour de la plaque et interrompt l’apport de sang, privant ainsi le cœur d’oxygène. Cela entraîne la destruction d’une partie plus ou moins étendue du muscle cardiaque.

Angor : clignotants au rouge

L’angine de poitrine, ou angor, désigne une douleur thoracique qui apparaît généralement pendant un effort ou un stress. Elle survient le plus souvent chez des patients qui présentent une insuffisance coronarienne. Son apparition est favorisée par les facteurs de risque cardiovasculaires. C’est une douleur thoracique survenant derrière le sternum. Il s’agit d’une douleur constrictive avec l’impression que le thorax est pris dans un étau. Parfois la douleur est ressentie au niveau de l’estomac. Cette douleur survient le plus souvent pendant un effort ou lors d’un stress et cède en cinq minutes environ au repos. Les symptômes sont généralement évidents mais le diagnostic d’angor doit être confirmé par des examens complémentaires. Dans 90 % des cas, l’angine de poitrine est dû à l’athérosclérose qui diminue le calibre des artères coronaires. Le cœur n’est plus suffisamment irrigué et les apports en oxygène sont diminués : on parle alors de maladie coronarienne ou cardiopathie ischémique. Les manifestations d’angor apparaissent lorsque le diamètre artériel est réduit d’au moins 50 %. Ne pas prendre à la légère ces manifestations et entamer immédiatement les explorations d’usage faute de quoi, l’infarctus proprement dit de faire son apparition avec le pronostic vital mis en jeu ce coup-ci avec une personne sur dix perdant la vie dans l’heure qui suit l’attaque ! Le taux de mortalité étant de 15% la première année. En France, En moyenne 80 000 personnes font un infarctus du myocarde par an dont 12 000 perdant la vie.

Les facteurs favorisant l’Infarctus du Myocarde

L’infarctus du myocarde, comme les autres maladies cardiovasculaires (maladies du cœur et des artères), est causé par les dépôts de graisse sur les parois des artères. La maladie concerne surtout les hommes de plus de 55 ans et les femmes de 65 à 70 ans. Mais l’infarctus peut survenir plus tôt si les facteurs de risque cardiovasculaire sont cumulés.
*L’âge et le sexe
La probabilité d’avoir un accident cardiovasculaire augmente après 50 ans chez l’homme et après 60 ans chez la femme. Mais la proportion de femmes jeunes qui en sont victimes a toutefois tendance à augmenter, notamment en raison de l’augmentation du tabagisme féminin et du surpoids
*Les antécédents familiaux
Si un parent proche (père, mère, frère ou sœur) a présenté une maladie cardiovasculaire à un âge précoce (accident vasculaire cérébral avant 45 ans, infarctus du myocarde ou mort subite du père ou d’un frère avant 55 ans, de la mère ou de la sœur avant 65 ans), le risque cardiovasculaire est augmenté.
*Le tabagisme
Le tabac favorise le rétrécissement des artères, la formation de caillots et l’apparition de troubles du rythme cardiaque. Sur le long terme, le tabac abîme peu à peu les artères. Le risque d’infarctus du myocarde est proportionnel à la consommation de tabac, mais il n’y a pas de seuil de consommation au-dessous duquel le tabagisme est dénué de risque. Le risque est le même quel que soit le type de tabagisme : cigarettes avec ou sans filtre, pipe, cigare, narguilé, tabac à mâcher, électronique).Le tabagisme passif augmente le risque d’infarctus de myocarde d’un quart si la personne est exposée 1 à 7 heures par semaine et de 62 % pour une exposition de 22 heures par semaine.
*Le diabète
On parle de diabète lorsque la glycémie (taux de sucre ou glucose dans le sang) reste supérieure à 1,26 g/l à jeun, lors d’au moins deux mesures. Si le diabète est mal contrôlé, l’excès de glucose dans le sang peut endommager les parois des artères.
*L’hypertension artérielle (HTA)
La tension artérielle correspond à la pression exercée par le sang sur les parois des artères ; elle s’exprime par deux chiffres. On parle d’hypertension artérielle (HTA) si le chiffre supérieur (pression systolique) est supérieur à 140 mmHg ou 14 cmHg et/ou si le chiffre inférieur (pression diastolique) est supérieur à 90 mmHg ou 9 cmHg.
*Un taux élevé de cholestérol
Si le cholestérol est essentiel au bon fonctionnement de l’organisme, son excès est néfaste pour la santé. On distingue le mauvais cholestérol (LDL cholestérol) du bon cholestérol (ou HDL cholestérol). Une prise de sang, réalisée à jeun, permet de déceler un excès de mauvais cholestérol. En cas d’alimentation trop grasse, de surpoids ou d’obésité ou en l’absence d’activité physique, le mauvais cholestérol augmente et s’accumule sur les parois des artères sous forme de dépôts graisseux. Avec le temps, ces dépôts peuvent ralentir et bloquer la circulation du sang : c’est l’athérosclérose.
*Le surpoids et l’obésité
On parle de surpoids si l’indice de masse corporelle (IMC) est supérieur à 25 et d’obésité s’il est supérieur à 30. La présence de graisse au niveau abdominal est également un facteur de risque.
*La faible activité physique ou sédentarité
La sédentarité doit être combattue par au moins la pratique d’exercices physiques d’une durée inférieure à 30 minutes par jour ( marche rapide le cas échéant).
*L’alcool
Il n’est pas de consommation d’alcool sans risque. Ce dernier est métabolisé au niveau du foie et transformé en Glycogène ( une sorte de sucre) contribuant à obstruer les artères.

*Le stress

Il n’est pas rare que la tension excessive, la mise sous pression, le stress soient à l’origine d’un infarctus chez des personnes ne présentant aucun facteur de risque. Des sportifs du haut niveau en ont fait les frais. Les décharges successives d’adrénaline pouvant expliquer selon certaines écoles ces attaques chez les sujets apparemment en dehors de tous soupçons d’être atteints!

Batterie de Symptômes annonciateurs

Il s’agit d’une douleur sourde continue ne diminuant point avec le changement de posture. Elle est située juste derrière le sternum avec irradiation généralement vers le dos (transfixiante), l’épaule gauche, la mâchoire gauche, le bras gauche. Une douleur constrictive avec l’impression du cœur pris dans un étau. Parfois elle moins péjorative avec uniquement sensation de brulures thoraciques. Il est des infarctus silencieux, passés inaperçus et découverts fortuitement à l’occasion d’un électrocardiogramme pratiqué lors d’un bilan de santé. Un cortège de symptômes s’ajoute le plus souvent au tableau : Anxiété, sueurs profuses, vertiges, malaise, essoufflement, confusion avec troubles de l’élocution, nausées, vomissements, lassitude avec grosse fatigue soudaine, maux gastriques. Ces derniers peuvent induire en erreur car prenant le tableau d’un Ulcère gastro-duodénal quand il s’agit d’un infarctus dit postérieur ou inférieur. Il arrive qu’un second infarctus s’annonce quelques jours ou quelques heures à l’avance par les prodromes (signes annonciateurs) suivants : sensation de malaise, fatigue, nausées, problèmes de digestion, par exemple. Dans ce cas, il est important de consulter rapidement son médecin.

Attitude à adopter

Ne plus effectuer le moindre mouvement et interdiction absolue de bouger, agir le plus rapidement possible en alertant les secours (SAMU 190, Protection civile 197, Médecin de famille). Ne jamais conduire et rester calme en prenant de l’aspirine en attendant l’arrivée du corps médical. La position demi-assise est conseillée durant cette attente. Certains préconisent la pratique d’une salve incessante de toux provoquée. Eviter la panique car elle ne fait que compliquer la situation.

Diagnostic électrique et biologique

Feu Pr en cardiologie Ahmed Kaâbi enseignait à ses étudiants que le cœur assistait  » impassible » à sa crise ; Entendre, l’auscultation au stéthoscope par le médecin des battements du cœur ne révèle aucune anomalie de nature à mettre le praticien sur la voie de l’attaque cardiaque. Un effondrement de la Tension artérielle est possible mais ne peut être pathognomonique de l’Infarctus. L’électrocardiogramme ( ECG) et le bilan sanguin ( enzymes cardiaques) sont les seuls en première intention à pouvoir affirmer sans la moindre équivoque l’atteinte et surtout son siège ( tracé de l’ECG modifié selon la zone du myocarde concernée par l’infarcissement).

La  coronarographie (Coro) : Geste primordial et salvateur

La coronarographie est un examen capital permettant de visualiser les artères du coeur (artères coronaires). Il s’agit d’un examen d’imagerie utilisant la technique de la radiographie aux rayons X et l’injection d’un produit de contraste iodé. Cela nécessite la ponction d’une artère (le plus souvent l’artère radiale au niveau du poignet, plus rarement l’artère fémorale au niveau du pli de l’aine) et la circulation de sondes jusqu’aux artères cardiaques. »La coronarographie permet de visualiser précisément l’anatomie des trois artères coronaires irriguant le cœur, et de mettre en évidence les éventuels rétrécissements (sténoses) ou occlusions des artères par de l’athérome et/ou des caillots sanguins et d’évaluer leur sévérité. La coronarographie est l’examen réalisé en première intention lors de l’infarctus du myocarde, afin d’identifier l’artère responsable de « l’attaque cardiaque » Elle dure en moyenne entre  20′ et 30′. Les résultats peuvent être répartis en deux cas de figure.
*Dans le premier cas, il n’y a aucune anomalie ; il n’y a donc pas lieu de proposer de traitement spécifique.
*Dans le deuxième cas, des lésions sont mises en évidence. Selon les caractéristiques de la maladie coronaire, la revascularisation pourra se faire de deux manières : Dilatation de la ou des artères malades (angioplastie) et pose de stent(s), réalisées par le cardiologue interventionnel.

Lourdes charges

La société paie un lourd tribut par la faute à cette pathologie : Absentéisme prolongé voire arrêt définitif du travail, médicaments excessivement onéreux avec cette particularité : Le Clopidogrel, remède essentiel contre l’infarctus n’est pris en charge par la CNAM que pendant la première année (seulement le générique et pas le princeps). Dans plusieurs cas, les cardiologues le préconisent à vie, donc le pauvre patient doit se le procurer par ses propres moyens (73,500 d) et souvent passer outre faute de possibilité de se l’acheter ! Surcharge des hôpitaux avec des RDV pour les explorations (Coro) très éloignés. En privé, elle revient à quelques 800 à 1000 dinars. La pose de deux stents toujours en privé revient à quelques 20 000 dinars sans oublier bien sûr cette scandaleuse magouille de stents périmés ayant marqué de stupeur de de crainte des milliers de personnes (malades stentés et leurs parents et proches) dont l’enquête diligentée par qui de droit tarde encore à pointer du doigts les principaux malfaiteurs avides du lucre facile au détriment de la  » VIE » de nous autres.

Infarctus non programmé!

Une malheureuse et non moins triste anecdote vécue voilà une dizaine d’années : Un patient (médecin qui plus est) présente un infarctus du myocarde un samedi tard dans la nuit. Prise en charge immédiate dans une clinique de la place, coro et mise en place de deux stents. A la sortie, 48h après et quoique se prévalant d’une prise en charge intégrale de la CNAM, il est sommé de casquer la rondelette somme de …14 mille dinars ! Argument massue de la direction, votre attaque n’était pas programmée ! Pour la petite histoire, le cardio qui a procédé à la mise en place des deux stents l’avait fait gracieusement sans percevoir d’honoraires (confraternité oblige). Trois mois après et pour la mise en place de deux autres stents mais à froid et programmés ce coup-ci, il ne paya que 23 dinars. Sans commentaire !

Mohamed Sahbi RAMMAH