Kais Saïed a reçu lundi dernier le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, la ministre des Finances Me Nemsia et la directrice de la Douane Najet Jaouadi. Cette rencontre a porté notamment sur les moyens de lutte contre les infractions douanières. A cette occasion le chef de l’Etat n’a pas manqué de souligner la nécessité de traiter la totalité des dossiers qui se rapportent à ce genre d’affaires, insinuant par là-même que « certains dossiers tardent à être traités en évoquant les dossiers de 700 conteneurs appartenant à un réseau de contrebande qui ont tardé à être déférés devant la justice, en plus des infractions relatives aux devises ».
En fait les infractions douanières vont des simples contraventions, dont la sanction prévue par le code de douane est une simple amende, jusqu’aux différents délits et crimes qui sont constatés par les agents de douane. Il y a surtout les infractions liées à la contrebande des marchandises et dont l’importation et l’exportation sont interdites en vertu de l’article 39 du code de douane. Il y a aussi des marchandises dont l’exportation ou l’importation sont soumises à autorisation, que l’intéressé doit présenter aux douaniers.
Quels moyens de lutte ?
On dit que le douanier bénéficie d’un 6ème sens, celui de reconnaître très vite le contrevenant. Donc le meilleur moyen pour lutter contre les infractions douanières c’est la vigilance des douaniers. La majorité des douaniers sont corrects et vigilants. Bien plus il y a ceux qui subissent des agressions et même, qui risquent leur vie au cours de l’exercice de leurs devoirs. Le 29 juillet 2022, le sergent-major Majdi Cherif, affecté à la brigade de la Garde douanière d’El Fahs, a péri, lors d’une tentative d’interception du camion d’un contrebandier, qui l’a percuté avec son véhicule. Il faut dire que la contrebande est parmi les plus graves infractions douanières. Les contrebandiers sont imprévisibles et sont prêts à tout. Les douaniers essaient d’endiguer le flot de la contrebande, mais ils y parviennent difficilement, et pas totalement.
Selon ce qu’a affirmé le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine « Les dépassements et les crimes douaniers enregistrés durant des années ont coûté des milliers de millions à la Tunisie ».Le trafic de boisson alcoolisées à l’instar de celui d’un réseau démantelé en juin 2022. Une quantité importante de boissons alcoolisées. En interrogeant le commerçant sur la provenance de la marchandise, il a dit qu’il l’a achetée à des contrebandiers opérant sur la bande frontalière ouest de la Tunisie, et qu’il l’a transportée et stockée dans un magasin afin de la commercialiser sur le marché parallèle.
Il y a par ailleurs, le trafic de stupéfiants dont notamment celui de la Cocaïne. En collaboration avec la police, les douaniers parviennent à mettre la main sur des dealers, que ce soit dans les ports ou les aéroports. C’est surtout les grands trafiquants que les douaniers essaient d’interpeller, en collaboration avec la brigade des stupéfiants.
En fait il n’y a pas une stratégie déterminée, destinée à lutter contre les infractions douanières qui sont multiples et que les douaniers découvrent au jour le jour. Tous les moyens sont bons pour les trafiquants et les contrebandiers afin de faire passer des marchandises prohibées.
Le trafic de cigarettes …
Il y a également des affaires de trafic de devises sous forme par exemple d’acquisition de biens immobiliers à l’étranger. La direction générale de la Douane avait présenté, au pôle judiciaire économique et financier, « les résultats de l’enquête dans une affaire d’acquisition illégale de biens immobiliers à l’étranger, et d’opérations financières et commerciales, en violation des procédures légales, communément appelée l’affaire des biens immobiliers d’Alicante en Espagne « 43 personnes, de nationalité tunisienne, et résidant en Tunisie sont impliquées dans cette affaire. Les personnes impliquées sont soupçonnées d’infractions douanières, de blanchiment d’argent et d’acquisition illégale de biens immobiliers à l’étranger.
Des douaniers véreux, ça existe ?
Les douaniers complaisants voire complices et qui ne constituent heureusement qu’une minorité, ça existe aussi. Taoufik Charefeddine avait à un moment donné souligné que des douaniers sont suspectés d’avoir vandalisé et fait disparaître des documents du siège des renseignements douaniers pour dissimuler des infractions impliquant des personnalités et de hauts cadres de la douane.
Il existe vraisemblablement des dossiers de corruption qui remontent à 2011, dans lesquels des hommes d’affaires pas très nets voulaient se rattraper en demandant l’intervention de certains hommes politiquement influents à l’époque, qui ont fait le nécessaire auprès de certains douaniers. Eh bien ces dossiers qui ont été classés sans suite, sont à nouveau ouverts. Cela était de nature à suspecter certains douaniers. La mise à la retraite obligatoire de 21 officiers de la Douane a fait débat avec divers commentaires de plusieurs observateurs.
La nécessité de traiter la totalité des dossiers relatifs à la lutte contre les infractions douanières, soulevée par Kais Saïed lors de sa dernière rencontre avec le ministre de l’Intérieur est dans le but de combattre la corruption de quelque côté qu’elle se trouve. Les contrebandiers ont parfois malheureusement entraîné des douaniers véreux, pour commettre leurs méfaits. Fort heureusement ces douaniers se comptent sur les doigts d’une seule main. Avec une meilleure vigilance, la lutte contre les infractions douanières serait plus efficace. C’est d’ailleurs dans ce sens, que le ministre de l’Intérieur Taoufik Charfeddine, à la suite de sa visite lundi dernier au port de Bizerte, pour le suivi de l’affaire des conteneurs bloqués, a appelé à davantage d’efforts dans la lutte contre ce phénomène. Comme l’a souligné le Président de la République, les dossiers de ces conteneurs au nombre de 700, tardent à être déférés au Tribunal. Négligence, complaisance, ou manque de vigilance ? That is the question !
Quoi qu’il en soit, il est nécessaire de mettre fin à tout ce qui est de nature à faire obstacle à la lutte contre les infractions douanières, et ce, par une meilleure vigilance dans l’application de la loi, qui est la même pour tous.
Ahmed NEMLAGHI