Depuis son arrestation, Amal Aloui a gagné le soutien de beaucoup non seulement de ses camarades, sa famille et ses amis, mais aussi des citoyens et des habitants de Tabarka, ce qui est pratiquement inhabituel lorsqu’il s’agit des responsables et des représentants élus. En la défendant, les phrases les plus fréquentes étaient : « Elle nous ressemble et elle nous représente réellement ! .. La cause de Amel est une cause nationale !.. »
Il convient de noter, à cet égard, que son affaire a suscité aussi l’intérêt d’un grand nombre de médias et a fait l’objet d’un suivi remarquable et continu.
Qui est Amal Aloui ?
Née en 1987 et une maman de deux enfants, Amal est et a été élue maire de Tabarka en mai 2022. Avant la révolution, elle a commencé, en tant qu’étudiante à l’Institut de presse et des sciences de l’information, son combat de lutte pour la justice sociale et les libertés. Et même après la révolution, elle était toujours présente et active pour les mêmes causes. Par ailleurs, son image dans la mémoire de plusieurs Tunisiens est restée liée à l’icident de la tentative d’un jeune salafiste de remplacer le drapeau national tunisien par un autre drapeau «djihadiste» à la Mannouba. En fait, ce salafiste a été empêché par deux jeunes étudiantes : Khaoula Rachidi et Amel Aloui qui ont été par la suite accueillies au palais de Carthage et ont été également honorées par la présidence de la république.
Quelques heures avant son arrestation, Amel a partagé sur son compte Facebook une publication exprimant sa certitude que son audience et son accusations s’agissent d’un certain règlement de compte. « Aujourd’hui, c’est mon procès et celui de tous ceux qui veulent servir le pays. Me faire accuser de fausses accusations devient très facile lorsqu’ils ne me trouvent pas d’entrée pour le vol et la corruption et lorsque je dérange les voleurs.. Je sais très bien que ces accusations visent à nous effrayer et à nous inciter à démissionner.. », a-t-elle noté.
Campagnes d’appui et de dénonciation lancées par différents activistes
Suite au mandat de dépôt émis le 09 août 2022, contre la maire de la commune de Tabarka pour « avoir attribué de licences dépassant le nombre autorisé dans l’espace maritime public», un nombre d’activistes ont dénoncé cette décision considérant qu’il ne s’agit pas de corruption mais plutôt d’un règlement de compte ou d’accusations fabriquées.
L’avocat Abdennaceur Laouini a publié un statut Facebook affirmant que la maire a été arrêtée sur la base d’accusations fabriquées. « Amal Aloui, maire de Tabarka, ancienne militante étudiante de l’Union générale des étudiants tunisiens et prisonnière politique que j’ai eu le privilège de défendre et ses camarades avant le 14 janvier 2011, est pointée du doigt par le lobbyistes de la corruption dans la ville de Tabarka… On sera à l’heure pour vous suivre en justice et vous exposer », a noté Abdennaceur Laouini.
D’autre part, Wael Naouar l’ancien secrétaire général de l’Uget et l’un des fondateurs du mouvement Resist, a mentionné, le 09 août 2022, que la véritable raison derrière son arrestation est son action contre l’acquisition de l’espace à la plage à travers la fixation des parasols à louer et même l’exigence de la consommation de la part de certains hôtels. « Amel a travaillé sur cette affaire et les propriétaires des hôtels lui ont envoyé des messages pour qu’elle se retire, mais elle n’a pas lâché prise », a-t-il expliqué.
À son tour, la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme représentée par son président Jamel Msallem a également chargé un avocat pour la défendre et prendre en charge toutes les procédures nécessaires. Dans le même contexte le membre du bureau exécutif de l’Union des diplômés chômeurs (UDC) a appelé à sa libération soulignant qu’avant d’être une maire « Amel est une combattante qui a passé sa vie à se battre pour une autre Tunisie meilleure » en ajoutant : «Amal n’est pas seule et ne sera pas seule»
D’autres activistes politiques et dans la société civile ont, en outre, appelé à une réunion le 10 août 2022, au siège de la Ligue tunisienne pour la défense des droits de l’homme (LTDH) à 17h afin de négocier ce qui est possible à faire dans le but de la soutenir. Après cette réunion, un premier communiqué dénonçant son arrestation et appelant à sa libération a été publié et signé par un groupe de ses camarades et ses amis ( environ 32 signataires). Ensuite, une pétition électronique a été lancée et signée par plus de 500 activistes et personnalités publiques.
Le 13 août, dans le même cadre de solidarité et conjointement avec la fête nationale de la femme tunisienne, une protestation s’est déroulée devant le théâtre municipal de Tunis.
Notons dans ce contexte qu’une manifestation pareille a été organisée pendant la matinée du même jour devant le siège de la municipalité de Tabarka.
Lundi 15 août, une caravane de solidarité s’est dirigé à 6h du matin du centre ville de Tunis vers Jendouba et Tabarka où les participants ont organisé deux protestations devant le tribunal de première instance de Jendouba et devant le siège de la municipalité.
Soutien de la Société civile et politique
Dans un communiqué publié le 15 août 2022, le Mouvement Echaab a considéré que la maire arrêtée de Tabarka fait face à une injustice par les « les lobbies de corruption » et qu’elle a été emprisonnée à la base « d’accusations fabriquées », tout en exprimant la solidarité absolue du Mouvement avec elle et en appelant à sa libération.
L’association tunisienne des femmes démocrates (ATFD) a annoncé à travers un communiqué publié le 12 août 2022 sa solidarité absolue avec Amel Aloui, tout en tenant « l’autorité politique actuelle» responsable vu qu’elle « n’a pas mis fin à la criminalité des lobbyistes de la corruption».
D’autre part, l’UGTT à Tabarka a publié, le 11 août 2022, un communiqué appelant à la libération de la maire arrêtée et soulignant qu’elle ne peut pas être impliquée dans des crimes de corruption.
Le parti des travailleurs tunisiens et son organisation de femmes « Égalité » ont notamment publié des communiqués de solidarité similaires.
En revanche, la Fédération nationale des communes tunisiennes (FNCT) a publié le 09 août 2022 un communiqué considérant, d’une part, que l’accusation portée contre la maire de Tabarka n’est qu’une accusation malveillante qui n’a aucun fondement juridique, et annonçant de l’autre côté l’adhésion de la Fédération à tous les mouvements prévus être organisés par la société civile dans le but de soutenir Amel Aloui.
Rappelons, dans ce contexte que la FNCT a participé à la caravane nationale et les protestations tenues le 15 août courant.
Rym CHAABANI