Depuis plusieurs mois, le terme « souveraineté » se répète presque dans la plupart des communiqués et des discours du président de la République. Il ne rate aucune occasion pour exprimer son refus de « toute forme d’ingérence étrangère » dans les affaires internes du pays selon ses dires et pour rappeler que la Tunisie est « un pays libre, indépendant et souverain ». Pour sa part, l’oncle Sam exprime son inquiétude à maintes fois depuis le 25 juillet 2021 et envers plusieurs décisions prises par Saied notamment la dissolution du CSM, des mesures qui ont été prises à l’encontre des journalistes, en déplorant le recours aux tribunaux militaires dans les affaires civiles (7 octobre 2022) et de la révocation de 57 juges. Les responsables américains réitèrent leur appel à trois points qui se répètent lors des points de presse, des entretiens avec le chef d’Etat et dans des communiqués publiés sur le site officiel du Département américain ; un processus démocratique transparent, un parlement actif et une justice indépendante. Le soutien des Etats- Unis des élections libres et équitables figure, aussi, parmi les axes évoqués par la chargée d’affaires à l’Ambassade des Etats-Unis en Tunisie, Natasha Franceschi récemment.
Ces axes ont été évoqués, le 21 août 2022, lors d’un entretien entre le président de la République Kais Saied au palais de Carthage, avec une délégation du Congrès américain. La rencontre s’est déroulée en présence de Natasha Franceschi, chargée d’affaires à l’ambassade des Etats-Unis d’Amérique en Tunisie. A cette occasion, le chef de l’Etat a souligné que « les déclarations faites récemment par certains responsables américains sont inacceptables, car la Tunisie est un pays libre, indépendant et souverain. » La souveraineté nationale appartient au peuple qui a exprimé sa volonté lors du référendum du 25 juillet et va s’exprimer lors des prochaines élections « , a-t-il lancé. Et d’ajouter : » Celui qui regrette la dernière décennie est celui qui en a profité. Le détournement de fonds et le saccage des services public en est à cet égard, la meilleure illustration « , a-t-il encore dit.
Cité dans un communiqué, le président Saied a fait observer que « la démocratie est un esprit avant d’être des institutions formelles », ajoutant que la démocratie ne peut être réalisée « qu’à la lumière d’une justice sociale et d’un système judiciaire indépendant et juste dans lequel tous sont égaux ». Le chef de l’Etat a dit rejeter une campagne de « dénigrement » menée par des personnes connues pour leur appartenance politique, rappelant, dans ce contexte, les principes du droit international consacrés par la Charte des Nations Unies. Il a, à ce propos, cité « le respect de la souveraineté des Etats, l’égalité entre eux et la non-ingérence dans leurs affaires ».
Lors de cette rencontre, le Président Kais Saied a passé en revue les étapes historiques des relations tuniso-américaines qui datent de plus de deux siècles. D’autres volets liés à la coopération bilatérale ont été également abordés. Le 29 juillet dernier, le ministère tunisien des Affaires étrangères, a convoqué la chargée d’affaires par intérim de l’ambassade des Etats-Unis en Tunisie, et l’a informée du « profond étonnement » de la Tunisie face aux propos proférés par le Secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, concernant le processus politique en Tunisie.
Pour sa part, l’Ambassade des Etats-Unis en Tunisie précise, dans un communiqué rendu public le 22 août 2022, que l’ensemble des rencontres ont été l’occasion, pour les membres du Congrès de réaffirmer leur soutien à la Tunisie et aux Tunisiens qui aspirent à un gouvernement démocratique et transparent, répondant à leurs attentes, soumis au principe de redevabilité, qui respecte les droits et des libertés fondamentales et qui accorde une priorité absolue à l’avenir économique du pays.
Ils ont exprimé leur inquiétude au sujet du processus démocratique en Tunisie, soulignant la nécessité de hâter la promulgation, en y associant toutes les parties prenantes, d’un code électoral devant assurer une large participation aux prochaines élections législatives, selon la même source. Les membres du Congres américain ont, également, insisté, sur l’importance d’une justice indépendante et d’un parlement actif et efficace pour rétablir la confiance des Tunisiens en le système démocratique. Dans le même contexte, ils ont salué, le rôle vital de la société civile tunisienne dans d’un avenir politique inclusif.
Ce n’est pas la première fois que le président de la République réitère son refus de toute ingérence étrangère. L’ indépendance de la Tunisie et sa souveraineté sont au dessus de toute autre considération » a t-il martelé lors d’un entretien avec le ministre des Affaires étrangères le 29 juillet 2022. De son coté, le ministre des Affaires étrangères Othman Jerandi a officiellement convoqué, le vendredi 29 juillet 2022, la chargée d’affaires de l’ambassade américaine à Tunis, Natasha Franceschi, au siège du ministère, sur fond d’indignation tunisienne (autorités, société civile, communauté politique et population) suite au communiqué du secrétaire d’Etat américain concernant le processus politique en Tunisie
« La posture américaine ne reflète en aucun cas les liens d’amitié entre les deux pays et les relations de respect mutuel », a souligné Jerandi. « Des propos qui ne respectent pas les règles et les bases de l’accord de Vienne sur les relations diplomatiques. Il s’agit d’une ingérence inadmissible dans les affaires nationales. », a t-il indiqué.
Ghada DHAOUADI