C’est en grande partie grâce à la Révolution Industrielle que le sucre a connu un tel essor dans la société de consommation. Le développement de l’industrialisation mais aussi de la consommation dans l’esprit des gens ont permis au sucre, sous toutes ses formes, de proliférer dans le monde entier. Il occupe, de nos jours, une place prépondérante dans notre société et dans notre assiette. D’après le PDG de l’Office du Commerce de Tunisie (OCT), Elyes Ben Ameur, notre pays n’est pas producteur de sucre et pourtant ses besoins sont estimés à mille tonne/ jour et 360 tonnes de sucre/ an. Mais dans le cadre de la crise des pénuries d’aliments de base qui a empiré au fil des mois, le secrétaire général régional de la chambre syndicale du tourisme, du commerce et des industries alimentaires, à Ben Arous, Souhail Boukhris, a assuré que les usines de jus, de Yoghourt, de boissons gazeuses, ainsi que les biscuiteries vont s’arrêter à partir d’aujourd’hui.
Et ce pour manque de sucre. Il a précisé que la crise est générale et qu’elle concerne toutes les régions du pays. Et puis quoi encore ?! Combien de temps pourrions- nous encore résister à cette situation ?
On importe
Déjà que le pouvoir d’achat des Tunisiens s’est nettement détérioré, mais en plus, ils devraient faire face aux pénuries des aliments de base. Selon le directeur général de l’Office tunisien du commerce, Elyès Ben Ameur, l’Office attend l’arrivée d’au moins 50 camions chargés de sucre, en provenance de l’Algérie. Il a précisé qu’un premier lot d’environ 1,2 et de deux mille tonnes sera acheminé et sa distribution est prévue, durant ce week-end. Le responsable a noté que le retard de l’acheminement de la quantité sucre en provenance de l’Algérie qui avoisine les 20 mille tonnes, est causé par des procédures douanières du côté algérien. La facture pour cette quantité est déjà payée. “Un dysfonctionnement dans l’approvisionnement en sucre existe et les stocks ne suffisent pas pour la consommation ordinaire du pays”, a-t-il assuré.
Pourquoi tant de pénuries ?
Le ministre des Affaires sociales, Malek Zahi, a reconnu il y quelques jours que le pays était confronté à des pénuries, les imputant à des « perturbations des chaînes d’approvisionnement et la hausse des prix et des coûts du transport au niveau mondial », dans le contexte de la guerre en Ukraine. Mais l’expert économique tunisien Moez Hadidane estime que la crise est surtout due « aux problèmes financiers » de l’Etat tunisien et ses faibles réserves de devises. L’Etat n’a plus les moyens d’exporter, par défaut de paiements, la Tunisie n’est plus crédible auprès de ses fournisseurs étrangers qui exigent d’être payés avant de livrer la marchandise. Un constat dont témoigne Alexandre Arrobbio, réprésentant de la Banque mondiale en Tunisie dans une déclaration à l’agence TAP « Les navires chargés de céréales étaient bel et bien dans les ports tunisiens sauf qu’ils n’étaient en pas mesure de décharger leurs cargaisons car l’office était en difficulté financière ».
Des solutions en vue ?
La Tunisie projette d’importer près de 80 mille tonnes de sucre dont 50 mille tonnes durant la prochaine période et ce, dans l’objectif de faire face à la pénurie de ce produit de base subventionné. C’est ce qu’a déclaré le chargé d’information au ministère du Commerce et du Développement des exportations, Mohamed Ali Ferchichi, lors d’un point de presse tenu, au siège de l’Institut National de la Consommation (INC), selon l’agence (TAP). Et de faire savoir que les entrepôts de l’office du commerce -structure qui assure le monopole de l’importation du sucre, thé, café et riz en Tunisie- dispose actuellement de 7 mille tonnes de sucre.
Ferchichi avait appelé, en ce sens, les consommateurs à ne pas se laisser entraîner derrière les rumeurs et les fausses informations sur l’épuisement de stock des produits de consommation tels que l’huile végétale subventionnée, le café et le sucre. Et Pourtant, le fait est bien là ! Les usines qui dépendent du sucre vont fermer à cause de cette pénurie.
Mais puisque nous passons par une grave crise financière, surtout concernant les réserves de devises. L’Etat a-t-il songé à une stratégie nationale alternative pour éviter l’exportation du sucre en grande quantité et éviter le scénario des pénuries ? Au lieu de se diriger vers les fournisseurs étrangers, comme c’était le cas pour l’impression des manuels scolaires, pourquoi ne pas essayer de résoudre les difficultés de la grande usine tunisienne de sucre « Tunisie sucre » dont la capacité de production quotidienne s’élève à 1600 tonnes de sucre blanc raffiné ? Pourquoi ne pas chercher des solutions au niveau national, des solutions à long terme et qui peuvent en même temps être la source d’emploi pour des centaines de personnes ? Il est bien temps de limiter les mauvaises décisions et songer à des réformes et des stratégies efficaces. Sinon c’est bientôt la famine qui guettera notre pays…
Leila SELMI