Les responsables politiques européens sont confrontés à une multitude de chocs sans précédent qui frappent l’économie, notamment la stagflation, la guerre en Ukraine et les vagues de chaleur record de l’été dernier. Ensemble, ces chocs ont eu un impact sur les marchés européens de l’énergie et de l’électricité. Le gaz produit 20 % de l’électricité en Europe (voir graphique) et, surtout, il est souvent le producteur marginal, de sorte que les prix du gaz déterminent les prix de l’électricité. En effet, les prix de l’électricité ont grimpé en flèche en Europe et battent de nouveaux records, atteignant plus de 10 fois leur moyenne de la dernière décennie.
Production d’électricité en Europe, par source
(%, 2021)
En juillet, les membres de l’Union européenne (UE) ont convenu de réduire la consommation de gaz en Europe de 15 % jusqu’au printemps prochain par le biais du plan européen de réduction de la demande de gaz. Ce plan s’est toutefois révélé insuffisant, car la Russie a continué à réduire et même menacé de continuer à interrompre le volume de gaz livré à l’Europe. Les dirigeants politiques cherchent donc désespérément des réponses politiques efficaces.
Dans l’article de cette semaine, nous examinons les différentes propositions politiques envisagées dans l’UE afin de comprendre leur impact potentiel ainsi que la probabilité de leur mise en œuvre dans un avenir immédiat.
Les responsables politiques européens ont formulé trois propositions principales, allant de taxes exceptionnelles à des plafonds de prix et à des mesures d’aide.
L’un des concepts envisagés dans toute l’Europe est une taxe sur les entreprises qui ont réalisé des bénéfices élevés inattendus grâce aux prix élevés de l’énergie. Néanmoins, il n’y a pas d’accord au sein de l’UE sur les entreprises qui devraient être visées par cette taxe et sur les sources (c’est-à-dire pétrole/gaz/nucléaire/énergies renouvelables) à inclure. Si certains pays, comme l’Espagne, la Grèce et l’Italie, ont déjà introduit de telles taxes, d’autres, comme la Belgique, l’Allemagne et l’Autriche, ne l’ont pas encore fait. Ces taxes laissent le mécanisme de réaffectation aux consommateurs ouvert, avec un effet peu clair sur l’intention souhaitée. En outre, leur conception et leur mise en œuvre pourraient ne pas être harmonisées entre les pays de l’UE et, par conséquent, faire l’objet de contestations constitutionnelles potentielles au niveau de chaque pays. Cela limite également l’idée de réinvestir les bénéfices dans la transition énergétique des combustibles fossiles vers des sources d’énergie plus propres et durables.
L’idée d’un plafonnement des prix consiste à fixer un plafond maximum pour le prix que les entreprises énergétiques européennes peuvent facturer à leurs clients. Cela limiterait en principe le niveau d’inflation dû aux prix élevés de l’énergie à première vue pour les consommateurs, tant les ménages que les entreprises. Si les plafonds de prix peuvent contribuer à contrôler les effets de la hausse des prix de l’énergie, ils négligent toutefois l’effet de richesse des consommateurs. Les consommateurs les plus riches ont moins de pression et d’incitation à réduire leur consommation d’énergie par rapport aux consommateurs ayant un niveau de revenu et de liquidité plus faible. Par conséquent, l’effet est limité car, dans la plupart des cas, la règle des 20/80 s’applique, les plus grandes entreprises et les ménages les plus riches ayant la plus forte contribution à la consommation d’énergie. En outre, les plafonds de prix ne constituent pas un frein au prix de l’énergie lorsqu’il s’agit de répondre à certains besoins de base de la consommation d’énergie. Les responsables politiques allemands ont souligné que le plafonnement des prix réduirait les bénéfices excessifs des entreprises énergétiques et limiterait donc l’effet des taxes exceptionnelles.
Enfin, les plans d’aide sont des mesures ciblées qui apportent un soutien financier aux ménages à faibles revenus, aux petites entreprises et aux industries essentielles afin de réduire les dommages économiques causés par la flambée temporaire des prix. Les mesures d’aide sont ciblées et plus susceptibles d’entraîner des avantages économiques plus importants que les autres solutions envisagées. Les mesures d’aide sont susceptibles d’être plus efficaces car elles incitent les utilisateurs à réduire leur consommation.
En conclusion, les mesures proposées jusqu’à présent pour découpler les prix de l’électricité des prix de l’énergie semblent insuffisantes et inefficaces pour réduire la consommation d’énergie, protéger les consommateurs contre la hausse des prix et éviter le rationnement de l’offre afin d’empêcher un ralentissement significatif de la croissance économique. Les prix élevés de l’énergie devraient durer au moins jusqu’au printemps prochain, voire plus longtemps. Cela représente un risque économique non négligeable pour l’Europe, avec une inflation accrue et une faible croissance, car il sera difficile et long de trouver un consensus mutuellement bénéfique entre des régions économiques très dispersées.