Par Samia HARRAR
On en est encore à ramasser les pelles et les râteaux. C’est dire que l’on n’est pas encore sorti de l’auberge. Et qu’il y a loin de la cruche à l’eau…
Comment se porte la Santé sous nos cieux si doux ? Elle pourrait se porter beaucoup mieux. Pour l’heure, anémique et livide, et munie cependant de bonnes intentions, elle essaie de marquer le pas. Mais lorsqu’elle ne se sait pas observée, elle claudique. Bancale, il n’est pas nécessaire de la soumettre à un œil exercé pour qu’il constate, d’emblée, qu’il faudrait, pour lui restituer jeunesse et vigueur, plus qu’un ravalement de façade. Elle est à la peine, et elle sait. Condamnant ceux qui s’en occupent, à se faire « porter pâles », avant de prendre la tangente pour ceux qui le désirent, le peuvent, et s’en donnent les moyens. Ceux qui restent, stoïques, attachés à leur poste, souffrent tous les jours de faire « parjure ». Car lorsqu’ils ont prêté sermon, ils n’avaient pas tout à fait conscience : dans l’enthousiasme et le « feu » de la jeunesse, qu’en lieu et place de l’aventure exaltante d’humanité, qu’ils ambitionnaient de vivre avec ce métier-sacerdoce, ils allaient devoir se résigner, petit à petit, à pratiquer bien souvent avec des « bouts de ficelle », et dans l’impossibilité d’offrir aux patients, ces services de qualité, qu’a évoqués Ali Mrabet, le ministre de la Santé, mercredi, et qui relèvent du droit le plus fondamental, partant du fait que l’accès aux soins, est un droit inaliénable et qui ne doit jamais être aliéné.
Sur le « terrain », il est peut-être superflu de préciser que l’on est bien loin du compte. Et pas seulement dans les régions les plus reculées du pays. Il faut avouer que le travail de sape avait commencé depuis au moins une décennie. Qui n’a pas contribué pour peu, à détruire, méticuleusement et sûrement, ce qui constituait encore, il y a des années, un mobile de fierté pour la Tunisie. Toutes proportions gardées comme cela va de soi. Il se trouve qu’aujourd’hui, en termes d’une Santé de qualité à offrir aux citoyens, et malgré tous les efforts consentis par les professionnels : nos excellents médecins en tête, que s’arrachent tous les pays pour la qualité de la formation, irréprochable, dont ils bénéficient au sein des universités Tunisiennes, la Santé est devenu le « maillon faible » d’un système, qui n’a pas su raccorder ses moyens à ses ambitions. Et ce n’est pas faute d’un ministre, à qui il est impossible de reprocher quoique ce soit, ainsi qu’à toutes les « blouses blanches » qui ont bataillé avec lui à tous les étages, lorsque la « pandémie » faisait des ravages en Tunisie. Mais, en se fixant une politique qui puisse donner à espérer, que l’accès à des soins de qualité dans nos « murs », dans des hôpitaux qui ne seraient plus déglingués, ne soit pas que vaine utopie, il sera permis de rêver que le jour est venu, où il s’avère, désormais impensable, qu’un jeune médecin perde sa vie dans la cage d’un ascenseur désaffecté, parce que la négligence et le laisser-aller criminel, plus que les moyens qui seraient venus à manquer, auront contribué à l’offrir en sacrifice, à l’on ne sait quelle « déité » cruelle et impassible ; qui se fout comme d’une guigne que des malades meurent faute de soins dans les couloirs gris d’un quelconque hôpital, dépourvu de tout le nécessaire. Et que de jeunes « résidents » souffrent le martyr à accomplir leurs stages dans des conditions extrêmes, devant le regard, tristement désenchanté d’un Hippocrate qui songe aussi à faire sa « valise ». Et à jeter les gants.