La chaîne tunisienne Radio Express FM a consacré toute la journée du jeudi 17 novembre au secteur des assurances en Tunisie. Des spécialistes et des experts en la matière se sont au micro pour fournir des renseignements sur le rôle joué par les compagnies d’assurances dans l’économie nationale, de l’état actuel du secteur et des perspectives d’avenir.
Disons de prime abord que le dernier rapport du Comité Général des Assurances (CGA) montre qu’au cours de l’année 2021, le taux de pénétration de l’assurance dans l’activité économique tunisienne s’est établi autour de 2,5 %. Un taux faible par rapport à ce qui est enregistré dans plusieurs pays émergents, mais également vis-à-vis de la moyenne mondiale. Elle est passée de 7,4 % en 2020 à 7 % en 2021. En ce qui concerne la part de l’assurance-vie en Tunisie, elle s’élève à 25,5 %, soit environ 60 dinars, contre une moyenne mondiale d’environ 1.096 dinars. L’assurance non-vie elle, représente 74,5 %, soit l’équivalent de 175,8 dinars, contre une moyenne mondiale d’environ 1.378 dinars.
Toujours selon le CGA, face à la crise sanitaire mondiale et suite à la conjoncture politique, économique et sociale difficile que traverse notre pays depuis plusieurs années, on constate que le secteur des assurances en Tunisie n’a pas été épargné. Néanmoins et grâce à la solidité financière des sociétés qui ont su se redresser progressivement, une reprise du secteur a été observée par rapport à l’année précédente, avec un taux moyen de croissance positif comparable à ceux réalisés au cours des dernières années précédant l’épidémie.
Cette amélioration demeure certes tributaire de l’évolution de la pandémie et du contexte économique et financier à l’échelle tant nationale que mondiale, mais il y a là aussi un espoir pour le marché tunisien de l’assurance qui dispose d’un énorme potentiel pour réaliser une croissance accrue et un plus grand saut qualitatif au cours des prochaines années. En ce sens, le secteur de l’assurance étant une composante du tissu financier tunisien, il convient de s’interroger sur l’impact des suites économiques de la crise actuelle sur les compagnies d’assurances en Tunisie. La densité des assurances, le taux de pénétration, les chiffres d’affaires, et tant d’autres indicateurs qui soulèvent de nombreuses questions sur l’état des lieux et les perspectives de croissance et de développement du secteur des assurances en Tunisie.
Analyse de la situation
Dans quelle mesure les compagnies d’assurances tunisiennes traversent-elles les aléas de l’économie nationale et comment peut-on garantir la survie de ce secteur face à la concurrence internationale ? Qu’en est-il des produits d’assurances les plus affectés par la crise ? Comment consolider ce secteur pour qu’il soit un levier puissant dans la relance économique tunisienne ? Quelles réformes juridiques sont à entreprendre pour élever le secteur au niveau des standards internationaux ? Telles sont les questions qui ont été soulevées par les experts, invités de la Radio Express FM au long de toute la journée du jeudi 17 novembre courant, en apportant des explications, des témoignages, des critiques constructives dans le but d’identifier les futurs enjeux du secteur des assurances.
L’un des invités fut Habib Ben Houssine, président de la Fédération tunisienne des sociétés d’assurances, qui a confirmé au micro de radio Express FM, que « le nombre de transactions des sociétés d’assurances s’est développé pour atteindre un niveau important, et ce, malgré la baisse du niveau d’investissement et les difficultés liées à la situation économique. Il a ajouté que les sociétés d’assurances ont progressé grâce aux nouveaux produits qu’elles ont introduits sur le marché, au développement des produits ainsi qu’aux progrès réalisés dans le domaine de l’assurance-vie. En effet, leur part s’élevant à 25 % du portefeuille des entreprises. »
Par ailleurs, il a souligné qu’il est nécessaire de développer des réseaux de distribution de services d’assurance et de s’appuyer davantage sur les moyens numériques tels que l’accès aux services d’assurance via un téléphone mobile. Et de poursuivre que la plupart des compagnies d’assurance ont créé des applications à cet effet et travaillent à leur développement de manière permanente. L’invité a expliqué que le marché tunisien comprend actuellement 24 compagnies d’assurance, plus de 1 100 mandataires d’assurance et 108 produits d’assurance-vie, soulignant que le nombre de travailleurs actifs dans le secteur est d’environ 11 700 personnes. Il a estimé en outre que la valeur des indemnisations liées au secteur des assurances a progressé de 21 % dont la plupart sont orientées vers l’assurance automobile et l’assurance maladie.
L’invité du programme Expresso a indiqué que l’inflation est un problème majeur auquel le secteur de l’assurance et ses clients seront également confrontés, déclarant que les clients sont tenus aujourd’hui de mettre à jour leurs polices d’assurance. Habib Ben Houssine a ajouté que de nombreuses usines ne souscrivent pas d’assurance bien qu’ils soient tenus de le faire, comme c’est le cas pour l’assurance incendie et l’assurance bâtiment. Et de confirmer que les compagnies d’assurance ont beaucoup travaillé sur le développement de leurs produits, notamment dans le domaine de l’assurance incendie. Il a ajouté que les investissements des compagnies d’assurances se sont élevés à 7.550 millions de dinars au cours de l’année 2021, dont plus de 40% d’entre eux proviennent de l’assurance-vie, qui ne représente que 25% du nombre de transactions.
De l’utilité de l’assurance-vie
Parmi les autres invités, Lotfi Hadj Kacem, le Directeur Général de la compagnie d’assurance vie et de capitalisation « Assurances Hayet », filiale de la COMAR, qui a indiqué que « Le secteur tire son importance par son rôle dans le financement de l’économie nationale, au côté du secteur bancaire, directement à travers la création de la richesse grâce à ses entreprises et la participation au capital des sociétés opérant dans plusieurs secteurs, ou sa contribution dans le financement du budget de l’Etat via les souscriptions ou le financement des entreprises. »
Il a également souligné que « l’importance de l’assurance vie, incontournable selon lui, pour son rôle socio-économique, puisqu’elle offre plusieurs couvertures, dont notamment la retraite complémentaire. » Il a fait savoir que le taux de pénétration de l’assurance vie varie aujourd’hui entre 6 et 10%, et a évolué depuis 2000 grâce aux privilèges fiscaux encourageant la souscription des contrats d’assurance vie, à côté du rôle joué par les banques à cet effet. Il est devenu quasi nécessaire pour le citoyen de souscrire à une assurance-vie pour se prémunir contre les aléas du temps. En effet, certains évènements, imprévisibles parfois, peuvent entrainer, lorsqu’ils se réalisent, une chute brutale du revenu et par conséquent du niveau de vie. Ainsi par exemple, le décès prématuré d’un chef de famille a pour conséquence la disparition d’un revenu ou d’un salaire. Grâce à l’assurance vie, la famille pourra être indemnisée et disposer de ressources financières en vue de protéger son niveau de vie. Dans le même ordre d’idée, un départ à la retraite peut se traduire par une baisse sensible du revenu : Comment garder le même niveau de vie si la pension de retraite servie par le régime de Sécurité sociale ne représente que 60% du dernier salaire ? Là aussi, l’assurance vie peut constituer une solution. Par la technique de la capitalisation, un contrat d’assurance vie permet de garantir des prestations (capital ou rente) permettant de faire face aux limites des régimes obligatoires de sécurité sociale. Enfin, l’assurance vie est une solution pour qui veut épargner en vue de financer divers projets futurs (financement des études supérieures des enfants, acquisition de logement…)
Hechmi KHALLADI