Lors de sa visite à Jendouba où il a inauguré une unité hospitalière, le président Kais Saied a évoqué « les malades qui ne peuvent être guéris par un médecin ». Ceux-là ce sont les « autres » qui reviennent toujours dans ses discours. C’est à ceux-là qu’il a fait allusion en parlant de pathologies politiques.
Par ailleurs, Kaïs Saïed, a déclaré encore, que la Tunisie avait besoin d’une « épuration pour la débarrasser des imperfections ». « Les autres », qu’il évoque presque systématiquement dans ses discours sont-ils ses opposants politiques ou ses détracteurs ? Car en fait il y a une nuance voire une différence entre ces deux catégories. Les détracteurs sont ceux qui sont systématiquement contre tout ce qu’il entreprend et ils agissent sciemment en appelant même à ce qu’il se désiste carrément de son poste de président de la République.
Ils le font donc, non pas pour l’intérêt général mais dans un but d’occuper le fauteuil de la présidence à sa place. Ces détracteurs ne seront pas suivis par le peuple qui cherche surtout à ce que la situation du pays s’améliore sur tous les plans. Par contre les opposants ne sont pas forcément contre la personne de Kais Saied ni le mouvement du 25 juillet par lequel il a procédé à une prise en main de la situation, après tant de trouble créé par un parlement composé par des membres pour la plupart irresponsables qui se souciaient peu de l’intérêt du pays et ne pensaient qu’aux leurs, avec des tensions partisanes et des tiraillements politiques à n‘en plus finir.
Il y en a même, ceux qui l’ont élu au départ et donc ils sont de son bord en quelque sorte, mais ils ne sont pas forcément d’accord avec certaines de ses décisions. C’est le cas par exemple de certaines organisations nationales telles que l’Union générale tunisienne du travail (UGTT), qui est contre sa stratégie actuelle, telle que le fait qu’il prenne certaines résolutions sans demander l’avis de ces organisations. Taboubi, le président de ladite centrale syndicale, ne fait pas du tout partie des détracteurs de Kais Saied. Il est parmi ceux qui ont été pour le mouvement du 25 juillet.
Seulement il lui reproche de prendre des décisions de manière unilatérale, tel que cela a été le cas avec la dernière loi de finances par exemple. Ses opposants sont surtout ceux qui lui reprochent de ne jamais s’adresser au peuple pour lui expliquer ce qu’il en est au juste de la situation actuelle. Pour Kais Saied, il n’y aura pas de flambée de prix ni de manque de certains produits de base tels que le lait ou le sucre. Mais malheureusement, la ménagère qui fait ses emplettes se rend compte du contraire. Il y a une pénurie de certains produits et une hausse des prix. Selon certains experts, il y aura davantage de hausse de prix avec l’augmentation de la TVA en vertu de la nouvelle loi de finances, qui se répercutera forcément sur le citoyen. Ce sont là des problèmes que les citoyens cherchent à comprendre par la bouche de Kais Saied.
Sévir contre ceux qui veulent du mal au pays
Ceux qui dénoncent cette situation, ce sont « eux » les autres ? ou ce sont les détracteurs qui veulent du mal au pays ? C’est plutôt ceux-là qu’il veut pointer du doigt sans les nommer. Cependant on aurait aimé qu’il soit plus explicite car ses discours peuvent prêter à équivoque, surtout lorsqu’il parle « d’épuration pour débarrasser le pays des imperfections ». Epuration est un terme qui signifie un nettoyage au Karcher. C’est peut-être un terme assez fort, car, pour certains observateurs, l’épuration peut engendrer un certain arbitraire qui est contraire aux principes démocratiques consacrés par la Constitution de 2022 dont Kais Saied a été l’artisan. Alors que d’un autre côté il tient à la primauté de la loi qui s’applique à tous sur un pied d’égalité. Son but est que « la Tunisie soit guérie de ces pathologies politiques ». Seulement il ne précise pas non plus de quelles pathologies s’agit-il ? Très certainement de celles consistant à vouloir du mal au pays et à ne penser qu’à accaparer le pouvoir. Mais ceux-là sont désormais connus et peuvent être facilement dévoilés.
Au nom de la liberté d’expression
D’ailleurs en recevant mardi dernier sa cheffe du gouvernement Nejla Bouden, Kais Saied en évoquant ceux qui le critiquent, a attiré son attention sur le fait que : « La liberté d’expression ne signifie pas qu’il faut manquer de respect à l’État et à ses symboles.
Ce n’est pas synonyme de la mise en danger de son unité et de sa sécurité et que la démocratie doit être exercée dans les institutions de l’Etat et ne saurait être exercée contre son unité ». Il ne s’agirait pas apparemment de ceux qui portent de simples critiquent mais bel et bien de ceux qui cherchent à semer la zizanie et à diviser pour mieux régner et ceux-là sont bien connus, malgré le fait que Saied ne veuille pas les désigner nommément. Quoique son attitude puisse parfois prêter à équivoque et c’est ce que lui reprochent ceux qui lui font confiance mais qui ne sont pas d’accord sur sa façon de se comporter en se renfermant parfois sur lui-même.
Par ailleurs en évoquant les législatives, Kais Saied a parlé du cas de ceux qui ont commis des falsifications lors du dépôt de leurs candidatures, en appelant « Ceux en charge du processus électoral et la justice, de sévir contre ces infiltrés qui veulent corrompre les élections ». Evidemment que l’Instance supérieure indépendante des élections (ISIE) est censée faire le nécessaire pour y sévir. Mais Kais Saied appelle d’ores et déjà au retrait de confiance de ce qu’il a appelé « les infiltrés ».
Il entend par là qu’il y a des infiltrés à part ceux qui ont commis des falsifications. Ceux-là qui sont-ils encore ? est-ce ses détracteurs ou ses opposants ? Car le prochain parlement doit-il être composé uniquement des pro-Saied ? Toute la question est là car il y va de l’efficacité du législatif qui est censé faire le contrepoids avec l’exécutif, dans un Etat démocratique comme le nôtre.
Ahmed NEMLAGHI