La présidente du PDL (Parti destourien libre) Abir Moussi a réussi pendant les dernières années à faire une campagne permanente : communiqués quasi quotidiens, diffusion constante de vidéos en direct, publication récurrente sur Facebook. Toute une stratégie de communication politique, en somme, que Moussi suivait assidûment pour être toujours présente au devant de la scène médiatico-politique. En revanche, après la suspension des fonctions des députés et la dissolution du Parlement, un seul coup d’œil sur les publications de la présidente du PDL et un simple calcul du nombre de ses actions politiques suffisent à nous montrer que la participation de Abir Moussi dans la vie politique semble régresser ostensiblement. Pourtant, Abir Moussi continue inlassablement de mener son bonhomme de chemin. Dernièrement, son opposition « tapageuse » (quasi-caractéristique de Moussi) contre certains acteurs politiques a pris, décidément, une tournure bien particulière : une véritable « frénésie judiciaire », serait-on tentés de la qualifier. Tour d’horizon.
Envoi des Tunisiens vers les zones de conflit : Abir Moussi auditionnée en tant que plaignante
Auditionnée le 4 janvier par le parquet près le pôle judiciaire de lutte contre le terrorisme, en tant que plaignante, dans une affaire relative à une plainte qu’elle avait déposée, en 2018, contre des dirigeants du mouvement Ennahdha, Abir Moussi entame une bataille politico-judiciaire qui risquerait de durer pour un bon bout de temps. Dans une vidéo publiée sur sa page Facebook, Moussi a précisé que l’affaire est fondée sur des accusations d’appartenance à un organisme terroriste impliqué dans plusieurs crimes dont notamment l’envoi de jeunes tunisiens vers des zones de conflit. Le 5 décembre écoulé, le PDL avait annoncé que le parquet avait décidé, après avoir examiné les éléments de l’enquête, de revenir sur la décision de détention provisoire contre Rached Ghannouchi, Ali Larayedh, Hamadi Jebali, Habib Ellouz et le représentant légal du Mouvement Ennahdha.
Le PDL porte plainte contre Nejib Chebbi, Jawhar Ben Mbarek et Moncef Marzouki
Sur un autre front, le président du Front de salut national Ahmed Nejib Chebbi a déclaré, le 3 janvier, avoir été informé de sa comparution prochaine devant la justice aux côtés de Ridha Belhaj, dirigeant au sein de ce parti à la suite d’une plainte déposée, le 27 décembre dernier, par Abir Moussi, présidente du Parti destourien Libre (PDL).Les deux dirigeants du Front de salut national sont accusés de « formation d’une entente terroriste ». Chebbi a exprimé son « étonnement devant la rapidité de la décision du procureur de la République de donner suite après seulement 24 heures de la date de dépôt de la plainte sans vérifier son contenu et l’étendue de son bien-fondé en droit et en fait ». Le président du front du salut national a insisté que « ni lui ni Rida Belhadj ne répondront à aucune convocation de ceux qui entreprendront cette enquête », et qu’il ne répondra à aucune question qui lui sera éventuellement posée dans le cadre de cette affaire. Il a aussi prévenu les magistrats qui « seront impliqués dans ce processus qu’il les poursuivra en justice ».
Envers et contre tous ? Les actions en justice tous azimuts de Moussi n’ont pas tardé à provoquer un concert de réactions. Dans la foulée, Al Joumhouri a dénoncé les décisions de citation devant la justice des activistes et politiciens Ayachi Hammami, Ahmed Néjib Chebbi et Ridha Belhadj. De son côté, Ennahdha a dénoncé la convocation devant l’instruction de plusieurs dirigeants du Front de salut national ainsi que des hommes politiques qui s’opposent au président Kais Saied, dont l’ancien président Moncef Marzouki, Jawhar Ben M’barak, Shaima Issa, le Coordonnateur du Comité de défense des magistrats révoqués, Ayachi Hamami, Abederrazek Kilani, Lazhar Akremi et des journalistes et de blogueurs.
Pendant ce temps, le PDL en remet encore une couche : « Les activités menées par le Front de Salut National, malgré l’ambigüité de son statut juridique et le regroupement en son sein d’éléments impliqués dans des affaires terroristes, s’inscrit dans le cadre du blanchiment des organisations terroristes », accuse-t-il dans un communiqué. Et de préciser que les plaintes sont déposées en vertu de la Loi organique n° 2015-26 du 7 août 2015, relative à la lutte contre le terrorisme et à la répression du blanchiment d’argent. Le PDL prévient, enfin, que ces plaintes sont déposées non seulement contre Ahmed Nejib Chebbi, Ridha Belhaj, Jawhar Ben Mbarek, Chaima Aissa et Moncef Marzouki, mais également contre « ceux qui seront dévoilés par l’enquête ».
Ghada DHAOUADI