Le câble de notre envoyé Sofien Rejeb
Pas de concessions en ce qui concerne la Palestine et les terres spoliées en 1967 ; le Soudan retournera à la normale et les canons se tairont ; le retour au bercail de la Syrie et la nécessité d’un nouveau positionnement ;zones de libre-échange , la sécurité alimentaire et les barrières douanières qui doivent s’assouplir : ce sont là les thèmes essentiels de la déclaration de Jeddah.
La clôture du Sommet s’est déroulée dans une atmosphère détendue, comme annonciatrice du retour aux normes basiques ayant présidé à la naissance de la Ligue Arabe. C’est l’avant-goût d’une concorde qu’il faut consolider et asseoir sur des bases solides.
L’Arabie Saoudite a vu grand. Peut-être même que ce sommet déclenchera un processus de Realpolitik, loin des habituelles incantations et loin des clichés surannés.
Et d’ailleurs, la réunion des ministres arabes des Affaires étrangères n’aura pas duré plus de deux heures. Inhabituel, et surtout que la déclaration finale s’est faite de manière soft.
Il faut dire que l’Arabie Saoudite avait pesé de tout son poids pour assurer au sommet les conditions de réussite. Depuis le retour de la Syrie, le check up établi dans le conflit pour le conflit au Soudan, le prérequis étaient assurés.
Il reste que l’inamovible focus des préoccupations arabes reste la Palestine et la manière dont Israël est en train d’emprunter les techniques d’un génocide camouflé.
Nous avons parlé du Soudan et de la nécessité d’y mettre fin à la guerre civile.
Il reste que la présence de Bachar Al Assad et le retour de la Syrie au moule originel aura été un point culminant. Le président syrien a eu des entretiens avec ses pairs, et d’autres avec ceux qui ne sont pas assez confiants en ce retour. Il n’empêche : les pays arabes, quels que soient leurs différends, doivent s’organiser en ordre de bataille pour faire face aux intrusions étrangères.
Les interventions des dirigeants arabes, précédées par l’allocution d’ouverture d’Aymen Abderrahmane, le premier ministre algérien, puis celle de Mohamed Ben Salmane, ces interventions donc, ont eu trait aux défis à relever , ce qui fait que les peuples arabes se retrouvent à la croisée des chemins.
La question palestinienne
Question centrale ayant fait l’objet des interventions des dirigeants arabes, particulièrement celle du président Kais Saied.
Le communiqué final s’est articulé autour de cette plaie saignante du monde arabe et sur l’identité arabe d’Al Qods Est, capitale de la Palestine.
Dans ce même ordre d’idées, on a axé les interventions sur la paix dans la région. Or, cette paix ne s’accomplira et la normalisation avec Israël ne sera possible que lorsque l’Etat hébreu aura restitué aux Palestiniens leurs terres spoliées et la reconnaissance de la souveraineté palestinienne en retournant à la situation d’avant juin 1967.
Il reste que la Palestine doit recouvrer ses terres, certes, mais pouvoir accueillir sa diaspora, tout comme elle doit bénéficier d’un statut de membre permanent au sein de l’ONU.
Tout cela ne suffit pas : car Israël doit répondre des crimes contre l’humanité ayant ciblé les Palestiniens. Et, toujours au chapitre des terres spoliées, le droit de la Syrie à récupérer le Golan a lui aussi été soulevé avec fermeté.
La question syrienne, justement, n’en est pas moins épineuse. Dans le sens où le retour de la Syrie dans le cercle arabe doit tout de même être entouré de réquisits. La sécurité en Syrie est une question primordiale, ceux qui s’y « réfugient » pour rejoindre les foyers de tensions et les piovra de la drogue suppose un nouveau précédé de veille. Parce que la Syrie est quand même empêtrée dans une guerre à plusieurs facettes.
Toujours en ce qui concerne les guerres fratricides, le Sommet se considère comme étant un point de départ pour l’indispensables intermédiation entre les belligérants.
En tous les cas, rien ne justifie le martyr du peuple soudanais.
Le plus important, aujourd’hui, c’est de travailler sur une trêve.
La collaboration économique
La géostratégie est nécessaire, du moins, face à un monde qui évolue, alors que les Arabes en sont encore à spéculer sur les fantasmes de leadership.
Or, le marché arabe est immense. Et, au-delà des disparités et des mécanismes concurrentiels, le cap doit être mis sur la diplomatie économique interarabe.
Pour cela, une condition essentielle : transcender les guerres intestines, la mauvaise guéguerre et les conflits futiles.
Parce que les défis de ce monde sont économiques. Et les pays arabes peuvent aspirer à une complémentarité à ce niveau.
Les zones de libre-échange ne sont plus un luxe. Aujourd’hui, c’est la logique des grands groupements d’intérêts, et les pays arabes en sont capables. Déjà, l’accord sur le transport de marchandises marque un point stratégique.
Mais, par ailleurs, il faut bien ouvrir le dossier du tourisme inter-arabe, s’orienter vers la numérisation et la digitalisation, mais, surtout, mettre les bases d’une stratégie de sécurité alimentaire, dont le nœud gordien est désormais l’eau.
Au-delà de l’écume des choses, le Sommet de Jeddah marque un tournant.
Un nouveau départ ? Sans doute. Nouvelles espérances ? Il suffirait d’y croire avec la force de l’intensité lucide.