Le conflit ouvert entre le ministère de l’Éducation et la Fédération de l’enseignement de base a pris dernièrement un tournant plutôt dangereux, augurant une escalade sans précédent sur fond de mesures punitives extrêmes décidées par l’autorité de tutelle à l’encontre des enseignants. Allant jusqu’à la saisie du salaire d’un mois de travail ou la destitution massive de directeurs d’écoles, ces sanctions extrêmes ne semblent pas dissuader pour autant le syndicat, déterminé visiblement à résister et à continuer son bras de fer avec le ministère de tutelle, sur fond de détérioration du pouvoir d’achat et des conditions du travail des instituteurs et des institutrices. En face, l’autorité de tutelle semble décidée à poursuivre sa politique d’escalade, alors que les négociations sont au point mort depuis des mois. Aujourd’hui, la situation se complique chaque jour davantage, menaçant de compromettre toute une année scolaire. La semaine prochaine sera marquée par une escalade de mouvements de protestation.
Mouvements de protestation
En effet, des sit-in de protestation seront observés devant les sièges des délégations régionales de l’éducation à partir de mercredi prochain et seront couronnés par une journée de colère nationale le 26 juillet courant à Tunis, a annoncé lundi la Fédération générale de l’enseignement de base dans un communiqué. Les premiers sit-in auront lieu le 19 juillet en cours devant les délégations régionales de l’éducation des gouvernorats de Gabès, Médenine, Tataouine, Kébili, Tozeur, Gafsa, Sidi Bouzid et Kasserine.
Les protestations se poursuivront le 20 juillet en cours à Béja, Le Kef, Jendouba, Siliana, Sousse, Mahdia, Monastir et Kairouan. Les manifestations du 21 juillet courant sont prévues à Tunis, Manouba, Ariana, Ben Arous, Zaghouan, Nabeul, Bizerte et Sfax.
Du 22 au 25 juillet en cours, des réunions seront organisées pour se préparer à la journée de colère nationale du 26 juillet en cours à Tunis, lit-on sur le site de l’agence TAP. A noter que ces mouvements de protestation seront observés en signe de protestation contre le limogeage de 350 directeurs d’écoles primaires et la saisie du salaire d’un mois de 17 000 enseignants qui ont soutenu la décision du syndicat de retenir les notes depuis le début de l’année scolaire 2022-2023, selon un communiqué rendu public.
23 mille instituteurs privés de leurs salaires
Dans les méandres de ce conflit complexe, plusieurs acteurs ont pris position l’UGTT en première ligne. « L’Union générale tunisienne du travail (UGTT) refuse catégoriquement la saisie des salaires des instituteurs qui militent pour leurs droits », avait souligné Noureddine Taboubi, secrétaire général de l’organisation syndicale, le 15 juillet 2023 à l’ouverture des travaux de la commission administrative nationale de l’UGTT organisée à Hammamet en solidarité avec le secteur de l’enseignement de base. Selon la même source, « environ 23 mille instituteurs ont été privés de leurs salaires et non pas seulement 17 mille comme le prétend le ministère de l’Education ». « Les instituteurs, dont les salaires ont été saisis, militent pour leurs droits et l’UGTT usera de tous les moyens juridiques pour les rétablir et les soutenir dans cette crise », avait-t-il ajouté.
Taboubi avait souligné l’urgence de lancer un dialogue sérieux et responsable pour aboutir à un consensus qui met fin à la crise et redonne aux instituteurs la valeur qu’ils méritent réaffirmant l’attachement de l’UGTT à l’application de toutes les conventions signées avec le gouvernement.
De son côté, le porte-parole de l’UGTT, Sami Tahri, avait indiqué dans une déclaration accordée à l’agence TAP que la commission administrative nationale abordera également plusieurs points liés à la situation générale dans le pays, à la levée des subventions, à la hausse des prix, au processus de négociation avec l’Union européenne et au dossier des migrants subsahariens. « Il s’agit également d’évaluer les actions précédentes et de se préparer à la prochaine commission administrative nationale qui étudiera plusieurs autres dossiers y compris l’Initiative proposée », d’après Tahri.
Rappelons qu’une commission administrative du secteur de l’enseignement de base s’est réunie mercredi dernier pour examiner les récentes décisions du ministère de l’éducation et a décidé de poursuivre la mesure de rétention des notes des examens, prise depuis le début de l’année scolaire par la Fédération générale de l’enseignement de base en signe de protestation contre l’insatisfaction de leurs revendications matérielles et professionnelles.
La fédération avait menacé également de boycotter la prochaine rentrée scolaire en signe de protestation contre la saisie du salaire d’un mois de 17 mille instituteurs et le limogeage de 350 directeurs d’écoles primaires ayant refusé de remettre les notes des examens des trois trimestres de l’année scolaire 2022-2023. Selon un communiqué le 10 juillet 2023 par le ministère de l’Education, cette décision intervient suite à des opérations de vérification et de tri après un ultimatum donné aux instituteurs et aux directeurs des écoles primaires pour remettre les notes des examens des élèves retenus depuis le début de l’année scolaire. La Fédération de l’enseignement de base poursuit ses mouvements de protestation, dont la retenue des notes, depuis le début de l’année en signe de protestation contre la non satisfaction des revendications des enseignants.
Ghada DHAOUADI