Par Raouf Khalsi
C’était dans l’air : à l’approche du 25 juillet dernier, des bruits de couloir couraient allègrement. On a attendu quelque chose, une restructuration du gouvernement, si ce n’est une grande lessive, mais on évitait parcimonieusement de spéculer sur un départ de Najla Bouden. Sauf que, par ailleurs, on se doutait bien que Kais Saied ne serait pas satisfait du rendement du gouvernement. Parce qu’il a toujours parlé d’harmonisation entre les structures institutionnelles. Est-ce là le motif ? Peut-être pas…C’est que les évidences n’émergent que lorsqu’on aura hiérarchisé les probabilités…
Le président ne s’est jamais embarrassé de « limoger » des ministres qu’il a lui-même nommés et dont quelques-uns étaient pourtant en symbiose avec sa vision pour « une Tunisie nouvelle ». Il se trouve aussi que Najla Bouden exécutait (à sa manière) ses directives, adhérant à son sens de l’ascèse et à toute la philosophie doctrinale de « ce que le peuple veut ».
Quelque chose aurait peut-être cassé.
C’est que la situation socioéconomique est loin d’être reluisante. Pénurie des produits de base, et des quiproquos autour de l’épineuse controverse tenant au FMI.
Kais Saied tranche : pas question de lever les subventions, pas question, non plus, de privatisations « sauvages » des entreprises publiques. Il détourne le tout par une percée auprès du Conseil de l’Union européenne, jonglant aussi sur le problème des Subsahariens, de quoi brandir une épée de Damoclès, ce qui a provoqué une grande agitation à l’autre rive de la Méditerranée.
La situation sociopolitique dans le pays n’en reste pas moins compliquée. Peut-être aussi parce que l’administration est lente à la détente.
En tous les cas, Najla Bouden a eu droit à une sortie avec les honneurs.
Il n’en reste pas moins que le président a encore réitéré sa conception de l’Etat : c’est « la continuation », la pérennité de cet Etat clochardisé durant une bonne décennie de pouvoir aux mains de ceux qui ont autant anéanti les fondamentaux de la révolution que condamné le peuple à l’affamement.
Il n’est pas dit que Najla Bouden ait failli dans sa façon d’interpréter et de concrétiser la vision qu’a Saied du sens de l’Etat. A un certain moment, on disait qu’elle était même l’extension de son bras. Sauf qu’en matière de gouvernance, il y a des constantes et des constances. Mais il y aussi la célérité et le sens de l’initiative.
Maintenant, une page se tourne. Qu’attendre donc du nouveau chef du gouvernement ?
Allons-nous vers la mise en place d’une nouvelle nomenclature gouvernementale ? Pour l’heure, il n’y a que des spéculations.
Il serait urgent d’attendre…