• L’Italie veut des tests médicaux pour vérifier l’âge de migrants mineurs, un sujet controversé
  • · Au moins 289 enfants ont péri entre juin et août
  • · Plus de 2.500 clandestins morts ou disparus en 2023

Trois fois plus de migrants ont trouvé la mort ou ont disparu cet été en tentant de rejoindre l’Europe par la mer, a alerté l’Unicef vendredi. Selon le décompte de l’agence onusienne, entre juin et août, au moins 990 personnes ont fait naufrage en Méditerranée centrale, route maritime la plus dangereuse au monde, soit trois fois plus que les 334 migrants qui avaient perdu la vie sur la même période en 2022. Depuis janvier 2023, au moins 289 enfants sont morts lors de ces traversées, a également indiqué vendredi Nicolo dell’Arciprete, coordinateur de l’Unicef pour l’Italie, lors d’une conférence de presse à Rome.

« La Méditerranée est devenue un cimetière pour les enfants et leur avenir. Le bilan tragique des enfants morts en quête d’asile et de sécurité en Europe est le résultat de choix politiques et d’un système migratoire défaillant », déplore Regina De Dominicis, qui coordonne le sujet à l’Unicef.

Au total, plus de 2.500 migrants sont morts ou portés disparus après avoir tenté de traverser la Méditerranée vers l’Europe depuis le début de l’année, a déclaré jeudi une responsable du Haut-Commissariat aux réfugiés de l’ONU. « Au 24 septembre, plus de 2.500 personnes ont été comptabilisées comme mortes ou disparues » depuis le début de l’année, soit une augmentation de près de 50 % comparé « aux 1.680 personnes lors de la même période » de 2022, a déclaré Ruven Menikdiwela, directrice du bureau du HCR à New York, lors d’une réunion du Conseil de sécurité consacrée à la crise des migrants en Méditerranée.

« Des vies sont également perdues sur terre, loin de l’attention du public », a-t-elle insisté. « Le voyage depuis l’Afrique de l’Ouest ou l’est de l’Afrique et la Corne de l’Afrique vers la Libye et des points de départ sur la côte reste l’un des plus dangereux au monde », a-t-elle indiqué. « Les réfugiés et les migrants voyageant sur les routes terrestres depuis l’Afrique subsaharienne risquent la mort et des violations graves des droits humains à chaque étape ».

Selon ses chiffres, entre le 1er janvier et le 24 septembre 2023, au total 186.000 migrants sont arrivés dans le sud de l’Europe (Italie, Grèce, Chypre et Malte), dont 130.000 en Italie, « soit une augmentation de 83 % par rapport à la même période de 2022 ». Quant aux pays de départ, entre janvier et août 2023, plus de 102.000 migrants ont tenté de traverser la Méditerranée depuis la Tunisie, et 45.000 depuis la Libye. Sur ce nombre, 31.000 ont été secourus en mer ou interceptés et débarqués en Tunisie, et 10.600 en Libye, a-t-elle ajouté.

Les images spectaculaires des arrivées mi-septembre sur la petite île italienne de Lampedusa ont remis sur le métier le dossier brûlant de la coopération européenne en matière de gestion des flux migratoires. Avec 8.500 personnes qui ont débarqué en trois jours sur l’île, soit plus que sa population totale, les arrivées ont suscité une crise locale à Lampedusa et une tempête politique en Italie, qui multiplie les mesures d’urgence et de fermeté depuis.

Dernier exemple en date : le gouvernement de Giorgia Meloni, à la tête d’une coalition de droite et d’extrême droite, a approuvé mercredi soir en conseil des ministres un projet de décret qui ouvre la possibilité de placer les mineurs non accompagnés de plus de 16 ans dans des structures pour adultes et de leur faire passer des examens médicaux pour déterminer leur âge. La disposition est jugée « inquiétante » par l’Unicef. Si le projet doit encore être approuvé par le Parlement, où le gouvernement ultra-conservateur dispose d’une majorité absolue, le texte autorise les « mesures anthropométriques » et des examens tels que des radiographies pour déterminer l’âge des jeunes migrants. Objectif : « Il ne sera plus possible de mentir sur votre véritable âge » pour échapper à une possible expulsion, a averti Giorgia Meloni sur sa page Facebook.

Sur la scène européenne, la situation en Méditerranée a relancé les discussions à Bruxelles autour du pacte migratoire, enlisé dans les dissensions depuis sa présentation en 2020 par la Commission européenne. Le projet de réforme européenne prévoit notamment un renforcement des frontières extérieures ou encore un mécanisme de solidarité entre les Vingt-Sept dans la prise en charge des demandeurs d’asile. Les dirigeants des neuf pays méditerranéens de l’UE doivent encore se retrouver ce vendredi à Malte pour accorder leurs positions sur ce dossier. « L’adoption d’une réponse à l’échelle européenne pour soutenir les enfants et les familles » est « absolument nécessaire pour éviter que davantage d’enfants ne souffrent », insiste Regina De Dominicis.

(avec agences et médias)