En Tunisie, chaque jour, beaucoup d’élèves sont victimes de harcèlement scolaire, en primaire comme au secondaire, qui peut survenir dans la cour de l’école, à la récré, en salle de classe, sur le terrain de sport et même à la sortie de l’école. Ce harcèlement prend plusieurs formes dont la plupart de manière sévère. Si certains harcèlements sont manifestes, d’autres sont difficilement décelés ni par les responsables scolaires ni par les parents de l’élève, surtout que souvent ce dernier subit en silence les actes de harcèlement sans jamais dénoncer les malfaiteurs, de peur ou par timidité. Avec la technologie moderne, on parle de plus en plus de cyberharcèlement, ce nouveau phénomène lié à la systématisation de l’usage des smartphones, d’Internet et des réseaux sociaux, devenus à la portée des élèves d’aujourd’hui, ce qui crée davantage de situations de harcèlement plus dangereuses entre les élèves.
Le harcèlement en milieu scolaire se caractérise par un rapport de force et de domination du « harceleur » sur le « harcelé » en lui imposant ses exigences et ses caprices et cela se fait systématiquement et d’une manière répétitive, jusqu’à ce que la victime soit dans l’incapacité d’agir ou de se défendre. Selon, les sociologues, ce harcèlement en milieu scolaire se fonde souvent sur le rejet de la différence et sur la jalousie (bons élèves/ élèves médiocres) ou l’appartenance à un groupe social (élève issu d’une famille aisée/élèves appartenant à une famille défavorisée) ou encore sur des différences physiques (élève fort/élève faible). Le harcèlement pourrait avoir des implications non négligeables sur la santé mentale de la victime, sur sa conduite et sur son rendement scolaire.
Diverses formes de harcèlement scolaire
Les formes du harcèlement scolaire sont multiples. Elles se pratiquent directement, face à face, mais aussi à distance via internet. C’est généralement à l’école primaire que débutent les actes de harcèlement, ce qui pourrait engendrer des humiliations conduisant parfois à la dépression et provoquant une certaine aversion pour l’école. Le harcèlement est une violence répétée qui peut être verbale, physique ou psychologique. Elle est le fait d’un élève ou d’un groupe d’élèves à l’encontre d’une victime, souvent moins âgée et qui, surtout, ne peut se défendre. Cette victime peut être la cible de jets de boulettes ou de bouts de craie même en classe, d’accusations mensongères, d’insultes, d’intimidation et d’injures grossières, allant jusqu’à subir des menaces, des moqueries, des chantages, d’agressions physiques et de rackets dans le but de s’emparer de ses affaires scolaires ou de son argent de poche.
Les élèves ciblés sont souvent stigmatisés à cause des caractéristiques personnelles, des apparences physiques, des aspects vestimentaires (élèves richement habillés selon le dernier cri de la mode) ou d’un comportement moral (garçon jugé trop efféminé, fille jugée trop masculine). Le malheur est que ces enfants ciblés sont réduits au silence. Ils n’osent pas se défendre ni dénoncer leur cas aux responsables de l‘école ni aviser leurs parents de tels actes. A cela, on peut parler des cas de harcèlement sexuel perpétrés dans nos institutions scolaires, mais qui passent souvent sous silence, de peur du scandale ou de représailles. Le harcèlement sexuel se pratique quotidiennement, entre les élèves, filles et garçons, dans nos écoles, notamment lycées et collèges, de par le comportement des garçons envers les filles où les gros mots proférés à tout bout de champ, le langage sexuel, les attouchements corporels, les caresses et les baisers en plein public sont fréquents. En effet, il faut le reconnaître, le harcèlement sexuel pourrait se produire entre élèves dans une salle de classe, sur le terrain de sport, dans la cour ou dans les escaliers, tout comme dans une bousculade à la sortie ou à l’entrée de l’école ou durant leur groupement aux alentours de l’école. Cependant, le fait qu’on n’en parle pas ou qu’on n’ose pas en parler n’exclut pas l’existence de tant de victimes qui ont subi de tels actes lors de leur enfance ou durant leur scolarité dont certaines vivent encore traumatisées sous l’effet du choc, sans oublier les souffrances que leurs familles ont dû endurer.
Quand le net entre en jeu
Cette nouvelle forme de harcèlement scolaire est devenue monnaie courante dans nos écoles, reposant sur l’usage d’internet et des nouvelles technologies de communication (réseaux sociaux, téléphones portables, blogs, e-mails). Ce type de harcèlement est favorisé par l’anonymat et l’absence de contrôle d’identité qui permettent aux harceleurs d’agir en toute discrétion. C’est ainsi que la victime est sans cesse bombardée de propos malsains, vulgaires et de diffamatoires envoyées par des camarades de classe à travers le net. Des messages à caractère répétitif provenant de différentes sources, contenant une kyrielle de menaces, de fausses rumeurs, d’intimidations, d’insultes, de chantage ou par la diffusion d’images humiliantes qu’on a prises à son insu. Les mauvaises blagues, les moqueries, les gros mots et les mots blessants adressés à un enfant à travers le net peuvent générer en lui des traumatismes. Ils peuvent aussi créer des complexes très importants. Ces messages sont parfois accompagnés d’un rejet et d’un isolement de la victime à l’école, supposée être un lieu parfait de socialisation.
Mettre fin aux actes de harcèlement
Les conséquences de ce genre de harcèlement sont aussi graves que celui subi directement à l’école par la victime, puisque les deux formes de ce harcèlement scolaire peuvent entrainer des troubles psychologiques, une perte d’estime de soi, de l’anxiété, des dépressions nerveuses et parfois même un décrochage scolaire. Les victimes de harcèlement scolaire devront pourtant agir et dénoncer leurs « bourreaux » aussi bien à l’administration qu’à leurs parents qui devront les écouter et les soutenir. S’ils ne sont pas toujours détectés à cause de leur silence, des procédures scolaires doivent être mises en place pour venir en aide à ces victimes qui peuvent pourtant se démarquer des autres élèves soit par leur comportement, soit par leur isolement, soit par leur difficulté de s’intégrer au sein de l’école. Les parents eux-mêmes doivent apprendre à leurs enfants à être tolérants, à respecter les différences, à être solidaires avec leurs camarades de classe pour éviter tout comportement abusif des uns envers les autres.
Dire non au harcèlement aujourd’hui, c’est construire l’école de demain : une école bienveillante et vigilante qui joue la carte d’une prévention efficace et met en place des actions où chaque partenaire éducatif peut jouer son rôle contre le harcèlement. L’action des responsables scolaires est fondamentale pour détecter ce type de harcèlement. En aucun cas, le harcèlement scolaire ne devrait être autorisé.
Hechmi KHALLADI