L’épineux sujet relatif à la pénurie des médicaments en Tunisie a été soulevé à maintes reprises sur nos colonnes et dans les différents médias. Est-ce à dire que les responsables quels qu’ils soient aient planché sérieusement sur la question en lui dénichant finalement une panacée de nature à rendre la quiétude aux malades et à leurs proches parents ? Nous n’en doutons point! Mais concrètement, il suffit de faire une petite virée du côté des officines pour se rendre compte que les choses ne font qu’empirer au grand dam des malades et de leur médecin. S’agissant au fait d’un cercle vicieux dont il très ardu de s’en sortir avec brio et pour cause.
Genèse de la crise
Il ne faudrait pas chercher très loin pour comprendre les origines de de cette crise et cerner ses tenants et aboutisants. Le marasme économique mondial frappant de plein fouet tous les rouages et n’épargnant pratiquement aucun pays. Fatalement, la Tunisie accuse le contre-coup de de cette cachexie financière l’atteignant dans tous ses secteurs névralgiques. La décennie de malheur n’ayant fait qu’aggraver la situation avec toutes nos richesses, toutes nos ressources, tout notre potentiel spoliés scandaleusement par les décideurs obscurantistes ayant pioché lourdement dans nos caisses mettant le pays à genou, groggy debout. Au passage, ils se sont grassement repus et gavés au détriment de la sueur du bon peuple s’échinant, se tuant à la besogne sans jamais parvenir à joindre les deux bouts, le fruit de son dure labeur grossissant outrageusement les comptes bancaires de ces infames sangsues d’avant le 25 Juillet.
Les laboratoires étrangers ferment les vannes
La Pharmacie Centrale de Tunisie (PCT) est l’unique responsable de l’importation des médicaments et de la matière première destinée à être utilisée par les laboratoires pharmaceutiques locaux pour la fabrication de certains remèdes. Seulement voilà, la PCT est lourdement, très lourdement obérée auprès des firmes étrangères. Ces dernières sont donc passées à l’étape coercitive : L’ouverture des vannes ne se ferait désormais que contre le règlement au préalable en devises sonnantes et trébuchantes. La PCT étant elle-même profondément embourbée du moment que ses « clients » de la place (CNSS, CNRPS, hôpitaux, etc.) rechignent à gommer leurs grosses ardoises, leurs caisses rachitiques étant à l’agonie, désespérément taries. Seule une grosse intervention de l’état serait à même de faire sortir de l’impasse cette critique situation.
Qui en paie les frais?
Une situation dramatique taraudant l’esprit du citoyen moyen au quotidien. Les nantis n’en ayant cure, un simple coup de téléphone à une connaissance à l’étranger voire un voyage éclair outre-mer et leur ordonnance est dûment validée. Pour le reste, c’est la bouteille à l’eau et la sempiternelle virée de toutes les pharmacies de la cité, du gouvernorat voire du pays à la recherche du fameux sésame. Passe pour les maladies saisonnières ou aigues où souvent et en désespoir de cause le remède traditionnel grand-mère arrive à en venir à bout à juguler avec plus ou moins de bonheur les symptômes (pas toujours du reste). Mais concernant les malades chroniques, l’affaire se complique singulièrement et pour cause : Cancer, Cœur, Hypertension Artérielle, Dyslipidémie (graisse dans les vaisseaux), Diabète, Insuffisance Rénale, Asthme, Anti-vomitifs injectables, etc., circulez, il n’y a rien à voir.
Un ballet rondement codifié
Le circuit est quasi- nettement tracé. Le malade ou ses proches en désespoir de cause retournent chez le médecin prescripteur avec la doléance suivante  » Tel ou tel remède est introuvable veuillez nous en prescrire un équivalent ». C’est la version soft. Car souvent, le discours est aux antipodes fusant d’un patient éreinté par des recherches infructueuses, aigri, furax déversant toute son ire, tous son courroux, toute sa frustration, toute sa peur sur le pauvre praticien assumant avec stoïcisme cette déferlante car comprenant parfaitement ses raisons, son pénible calvaire.
Même la France en souffre !
Qui l’aurait cru ? Un médecin s’étant rendu récemment dans l’Hexagone pour rendre visite à sa fille résidente en France. Sa petite fille âgée de sept mois a présenté en sa présence une bronchite assez sévère avec une toux incessante l’empêchant de dormir, de s’alimenter. Ordonnancier en mains ; il fit le tour d’un nombre incalculable de pharmacies à Paris en quête d’un antibiotique, d’un sirop, de suppos antitussifs pour nourrissons. A sa grande surprise, uniquement deux antibiotiques sont commercialisés en France. Pas de sirops antitussifs. Un seul suppo contre la toux. Les gouttes d’un corticoïde prescrites couramment chez nous pour juguler la toux et la gêne respiratoire sont en rupture commercialisées à …40 Euros alors qu’ici la boite ne dépasse pas les cinq dinars (donner son prix exact pourrait être assimilé à de la publicité pour le produit). De retour en Tunisie, ce grand-père s’empressa d’envoyer par le truchement d’un ami les médicaments à la petite; c’est le monde à l’envers en quelque sorte !
Mohamed Sahbi RAMMAH