La convention sectorielle entre Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam) et le syndicat des pharmaciens d’officine (Spot) prend fin le 31 décembre et à l’heure actuelle aucun accord n’a été trouvé pour la reconduire, précisant qu’il s’agit d’une première, dans la mesure où aucun projet d’accord n’a même été élaboré et ce, moins de quinze jours avant les délais. Compte tenu de la situation actuelle du pays et dans un souci de ne pas priver les assurés sociaux de l’acquisition de médicaments, des réunions de négociations vont être entamées avec la Caisse nationale d’assurance maladie.
Le président du syndicat des pharmaciens d’officine de Tunisie, Naoufel Amira, a souligné, sur Attasia TV que « Notre syndicat a tenu à signaler ce délai et a publié un communiqué dans ce sens car notre rôle est aussi social et nous ne voulons pas que les citoyens soient lésés. Les négociations étaient en cours pour un renouvellement de la convention entre les pharmaciens et la Caisse nationale d’assurance maladie (Cnam). La convention sectorielle entre la CNAM et le syndicat des pharmaciens d’officine de Tunisie prendra fin le 31 décembre courant.Mais jusqu’à aujourd’hui la CNAM et le syndicat des pharmaciens d’officine de Tunisie (SPOT) ne sont pas encore parvenus à un accord pour renouveler leur convention sectorielle. Le SPOT est ouvert au dialogue avec les directions de la CNAM pour trouver une solution permettant d’assurer le droit des citoyens aux soins et de préserver le droit des pharmaciens à accomplir leur rôle dans les meilleures conditions . Mais cette convention permanente sera signée une fois toutes les conditions réunies, c’est-à-dire la bonne santé financière de la Cnam et le remplacement du système actuel par un système informatisé et la disponibilité de la carte Labes. Cette fois-ci on va se contenter de la carte de soins en papier .Cette numérisation ( e-cnam et la carte Labess) tarde à se concrétiser.
Crise des liquidités
La CNAM est aux prises avec une grave crise de liquidité, Elle a des dettes envers les structures de santé publique, la Pharmacie centrale et le secteur privé.Ses dettes ont commencé à s’accumuler depuis 2016. « Les dettes de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) au profit des pharmaciens s’élèvent à 80 millions de dinars (MDT), précise Naoufel Amira . Ce qui l’empêche d’honorer ses engagements avec les pharmacies. Ces dettes ne permettent pas à la Cnam d’avoir la liquidité nécessaire pour honorer ses engagements envers le secteur public (hôpitaux et Pharmacie centrale), mais aussi envers le secteur privé (cliniques, médecins …), avec des retards de paiement qui se prolongent, passant d’une quinzaine de jours à une moyenne de 90 jours.Les dettes de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS) et de la Caisse nationale de retraite et de prévoyance sociale (CNRPS) envers la caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) s’élèvent à 9 milliards de dinars. Ces dettes ne permettent pas à la CNAM d’avoir la liquidité nécessaire pour honorer ses engagements envers le secteur public (hôpitaux et pharmacie centrale) et envers le secteur privé (cliniques, médecins …)
La Cnam vit aujourd’hui de l’argent des prestataires et notamment des pharmaciens. Les délais de paiement oscillent entre 3 et 6 mois alors que les pharmaciens privés doivent payer les médicaments au comptant. Certes des réformes ont été engagées, on peut citer la récente réforme du régime de retraite qui vise à renflouer les caisses sociales dont le déficit a atteint des chiffres incroyables, préserver leurs équilibres financiers et générer des ressources supplémentaires pour améliorer les transferts au profit de la Cnam… Mais avec l’arrivée de la crise sanitaire, doublée d’une crise économique, cette solution ne semble pas suffisante, ni pour l’un ni pour l’autre, pour sauver les caisses sociales.
Le SPOT met en garde contre la gravité de la situation à laquelle fait face actuellement la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM), en raison de son déficit financier, ce qui risque de rompre la relation contractuelle entre la Caisse et les pharmaciens. Les pharmaciens ne peuvent aucunement assumer à eux seuls la charge financière, surtout en l’absence d’une solution radicale à ce problème » appelant à diversifier les sources de financement de la Cnam en augmentant les taxes sur produits nocifs pour la santé (les cigarettes, le sucre et l’alcool…), les communications téléphoniques et les assurances. C’est grâce à ces réformes structurelles qu’on peut assurer la pérennité du système et doter les Tunisiens du système d’assurance maladie qu’ils méritent, car sans réformes, le déficit de la Cnam continuera à se creuse
Compléments alimentaires : attention danger ?
Les compléments alimentaires se vendent comme des petits pains en Tunisie. Commercialisés sous forme de pastilles, de comprimés, de poudres ensachées ou d’ampoules, les compléments alimentaires inondent le marché tunisien. Rien de bien étonnant : depuis quelques années, le marché des compléments alimentaires a littéralement explosé.« Contrairement aux médicaments, les compléments alimentaires ne sont pas toujours soumis aux contrôles., précise Naoufel Amira. Pis encore : certains produits non certifiés et dangereux sont vendus en dehors des pharmacies, ce qui représente un réel danger sur la santé des citoyens. Les fabricants locaux ne sont soumis à aucune réglementation. Or, plusieurs compléments alimentaires sont destinés aux enfants, ce qui constitue un danger Les pharmaciens ne cachent plus leur gêne profonde devant ce qui semble être carrément une dégradation de la profession et même une concurrence déloyale. Ils sont impuissants devant cette vague de nouveaux venus dans le secteur.
Pour ce qui est du contrôle des produits qui se vendent dans ces espaces, le Président du SPOT a souligné que le ministère de la santé n’a pas le droit de les inspecter car ce ne sont pas des produits médicamenteux, faisant savoir que cette prérogative ne relève même pas du ministère du commerce. Il s’est interrogé sur l’origine de leurs circuits de distribution et a appelé les ministères du commerce et de la santé à intervenir pour une organisation et un contrôle rigoureux du secteur afin de contrer les risques sanitaires. Or, il existe un décret qui vise à réguler le secteur, mais il est encore dans les tiroirs des autorités, appelant à éviter de faire les achats de ces compliments en dehors des pharmacies et de se méfier des annonces tapageuses sur les réseaux sociaux qui promettent des miracles à des prix alléchants. Il en va de votre santé.
Une campagne d’information pour inciter à la consommation de génériques
Des plus bénignes aux plus graves, les médicaments génériques couvrent la plupart des pathologies. Le médicament générique , a la même qualité et quantité de principe actif, la même vitesse d’action et la même efficacité que le médicament d’origine (« princeps ») a permis des économies de plusieurs milliards aux organismes de remboursements, a souligné Naoufel Amira qui a , insisté sur l’efficacité des génériques fabriqués en Tunisien dont l’effet, selon lui, ne diffère en rien de celui des médicaments d’origine, contrairement à ce que pensent certains patients, qui rechignent à les utiliser. Les médicaments génériques doivent trouver leur place dans les pratiques de santé .Il a, en outre, pointé l’absence de campagnes de sensibilisation à l’utilisation des médicaments génériques qui, dans le monde entier, ont beaucoup contribué à baisser les coûts de la santé. « En Tunisie, le ministère de la santé n’a pas mis en place un système spécifique aux médicaments génériques. Et là il faudrait une campagne de communication pour encourager la consommation de ces génériques L’enjeu de cette campagne est donc de consolider la confiance en informant le grand public et les patients sur la qualité, l’efficacité et la sécurité des médicaments génériques.», a-t-il
Kamel Bouaouina