Au fil des pages de l’histoire, un motif récurrent émerge : les mouvements étudiants qui ont commencé avec un simple slogan, une manifestation d’un groupe d’étudiants, ou même une voix basse appelant à la justice, et rien qu’à la justice, suffisent à écrire tout un chapitre dans le livre de la résistance, de la lutte et du changement. Dans de nombreuses universités tunisiennes et à travers le monde entier, la voix de la vérité devient de plus en plus forte chaque jour. Rien ne les arrête, rien ne les effraie. Ce qui compte pour eux, c’est de soutenir une cause qui, bien que loin de leur pays, résonne profondément dans leurs cœurs.
Les campus universitaires aux États-Unis ont depuis longtemps été des bastions de la liberté académique et de la protestation politique, et l’Université de l’Indiana ne faisait pas exception. Pendant 55 ans, le Dunn Meadow avait été désigné comme son « terrain d’assemblée », une zone que l’université elle-même décrivait comme un « forum public pour l’expression sur tous les sujets ». Mais cela a changé le 24 avril, lorsque les administrateurs universitaires ont rapidement révisé les politiques en vigueur depuis 1969, lit-on sur le site « Al Jazeera ».
Alors que l’université autorisait auparavant « l’utilisation de pancartes, de symboles ou de structures » pour les manifestations sur la prairie, le changement interdisait les structures temporaires sans autorisation préalable. Le lendemain même, la police a semblé démanteler le campement – et arrêter des étudiants, selon la même source. « Des étudiants, des enseignants et des membres de la communauté se sont rassemblés sur cette prairie depuis des décennies, et cela n’a jamais été rencontré avec ça », a déclaré Benjamin Robinson, professeur d’études germaniques à l’université, qui a rejoint les manifestants le 25 avril.
Il a finalement été arrêté, ainsi qu’environ 50 autres manifestants, tous ayant reçu une interdiction immédiate d’un an de se rendre sur le campus. « Maintenant je vois cette démonstration de force militarisée, écrasante, disproportionnée », a indique Robinson à Al Jazeera. « Ça fait réfléchir : Pourquoi cette fois-ci ? Pourquoi cette fois est-elle différente ? »
Rappelons que la semaine dernière, plus de 100 manifestants ont été arrêtés après que les autorités universitaires ont appelé la police sur le campus privé le 18 avril 2024, une action qui semble avoir exacerbé les tensions et suscité une plus grande mobilisation pendant le week-end. Mimi Elias, une étudiante en travail social qui a été arrêtée, a déclaré à l’Agence France-Presse (AFP) lundi : « Nous allons rester jusqu’à ce qu’ils nous parlent et écoutent nos revendications. » « Nous ne voulons ni antisémitisme ni islamophobie. Nous sommes là pour la libération de tous », a déclaré Elias. Joseph Howley, professeur agrégé de lettres classiques à Columbia, a déclaré que l’université avait utilisé le « mauvais outil » en impliquant la police, ce qui avait attiré « des éléments plus radicaux qui ne font pas partie de nos manifestations étudiantes ».
Des mouvements étudiants qui ont changé l’histoire
Dans les moments les plus mémorables du mouvement des droits civiques aux États-Unis, les jeunes ont joué un rôle important sur le devant de la scène, mais aussi en coulisses. Ensemble, ils ont mis un terme à la ségrégation dans les écoles des États du sud où étaient appliquées les lois Jim Crow, ont défié le racisme avec les Freedom Rides et ont permis l’adoption des droits civiques. A noter que le Student Nonviolent Coordinating Committee (SNCC), l’une des organisations étudiantes les plus influentes, a mené de nombreux mouvements de protestation non violents. Il a aussi participé à l’entraînement de soldats. Farouchement indépendant, le groupe était présent sur tous les fronts et n’a jamais flanché sous la répression de l’État et les violences physiques. Animé par le rejet de la suprémacie blanche, le SNCC fut le groupe de défense des droits civiques le plus important et le mieux organisé de la nation, lit-on dans un article publie par « National geographic » sur son site officiel. Les jeunes qui ont pris part au mouvement des droits civiques ont adhéré à ce que John Lewis, élu à la chambre des Représentants et ancien président du SNCC, décrivait comme « de bons ennuis », des actions courageuses destinées à provoquer et à défier les autorités, et à faire bouger les choses.
D’une autre part, plus de deux millions de jeunes hommes ont été appelés dans l’armée américaine pendant la guerre du Viêt Nam. La mobilisation des jeunes contre le conflit n’est donc pas une surprise. Le mouvement étudiant a aidé à retourner l’opinion publique américaine contre la guerre du Viêt Nam. Ce n’était pas la première fois que les étudiants menaient des actions : dès le début des années 1960, de jeunes militants se battaient pour le mouvement afro-américain des droits civiques et s’opposaient à la Guerre froide. Pour protester contre la guerre, les étudiants ont manifesté et mené des sit-ins dans tout le pays. Ces protestations ont divisé et semé le trouble parmi l’opinion publique américaine, qui se demandait si les étudiants devaient continuer ou non leurs actions. Certaines protestations furent violemment réprimées, comme le 4 mai 1970, sur le campus de l’Université d’État du Kent. La police a tué des étudiants non armés et en a battu et aspergé d’autres de gaz lacrimogène. Des membres de quelques mouvements étaient dans le viseur du FBI : ce fut notamment le cas pour le Students for a Democratic Society (SDS), l’un des acteurs principaux du mouvement anti-guerre, lit-on encore sur le site susmentionné.
Ghada DHAOUADI