Le ministère des Finances a accepté de reporter l’augmentation de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) sur les achats de biens immobiliers destinés à l’habitation auprès des promoteurs agréés de 13% à 19% à l’année 2026, a annoncé l’Assemblée des représentants du peuple dans un communiqué publié le 19 novembre.
Décidé à l’occasion d’une séance consacrée à l’examen de l’ajout d’articles additionnels au projet de loi de finances 2025, ce report a été demandé par les membres des commissions des finances et du Budget relevant de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP) et du Conseil national des régions et des districts (CNRD), a-t-on précisé de même source. Les députés ont estimé, à cette occasion, que cette mesure fiscale figurant dans le projet de loi de finances 2025 risque d’avoir des répercussions négatives sur les prix de vente des logements et le secteur de la promotion immobilière, dans un contexte marqué par la hausse des taux d’intérêt des prêts bancaires et l’augmentation continue des prix des matériaux de construction.
Ils ont également demandé un abaissement de la TVA sur les achats de biens immobiliers destinés à l’habitation de 13% actuellement à 7% pour réduire les prix des logements et améliorer leur accessibilité financière. Les représentants du ministère des Finances qui participaient à la séance de travail ont cependant fait remarquer que la révision à la baisse de la TVA ne contribuerait pas à réduire les prix des logements, notant que le principal problème auquel fait face le secteur de la promotion immobilière est l’accès aux financements.
La chambre nationale syndicale des entrepreneurs du bâtiment et des travaux publics avait exprimé ces dernières semaines ses vives préoccupations quant aux conséquences d’une éventuelle augmentation de la TVA sur les achats des biens immobiliers à usage d’habitation de13% à 19%.
« La situation du secteur de l’immobilier est déjà assez critique, et l’augmentation de la TVA ne fera qu’empirer la situation », a commenté Mehdi Fakhfak, le président de cette chambre syndicale rattachée à l’Union tunisienne de l’industrie, du commerce et de l’artisanat (UTICA), en octobre dernier.
« Le rythme des achats des biens immobiliers a baissé ces dernières années, et l’activité des promoteurs immobiliers s’en est fortement ressentie. Dans un contexte marqué par la flambée des prix des matériaux de construction et des terrains, le secteur se débat déjà dans une grave crise », a-t-il ajouté, indiquant que la chambre syndicale menait des actions de lobbying auprès des députés pour empêcher l’approbation d’une hausse de la TVA.
Hausse de l’indice des prix des actifs immobiliers résidentiels
D’après des données publiées en septembre dernier par l’Institut national de la Statistique (INS), le volume des transactions immobilières recensées durant les trois premiers mois de 2024 a enregistré une baisse de 13,6% pour les terrains, de 6,9% pour les maisons et de 23,3% pour les appartements comparativement au quatrième trimestre de l’année 2023.
Dans le même temps, l’indice des prix des actifs immobiliers résidentiels bâtis a augmenté de 3,5% en variation trimestrielle, c’est-à-dire comparé au quatrième trimestre 2023.
Par type d’actif bâti, cette augmentation résulte d’une hausse des prix des appartements de 3% et de 4,8% pour les maisons individuelles.
Toutes les régions ne sont pas cependant logées à la même enseigne. Alors que le Grand-Tunis a enregistré une légère baisse de 2,5%, les autres régions du pays ont connu une flambée des prix de l’ordre de 9,2%.
En glissement annuel, c’est à dire en comparaison au même trimestre de 2023, l’indice des prix de l’immobilier bâti a augmenté de de 3,9% durant le premier quart de l’année 2024.
Alors que des statistiques du ministère de l’Habitat montrent que 592 mille habitations sont vides, la baisse des ventes des biens immobiliers s’explique essentiellement par une forte déconnexion entre les prix et le pouvoir d’achat des citoyens. Le ratio global prix du logement/revenu annuel du ménage est estimé à 14 à l’échelle nationale. En d’autres termes, chaque ménage doit dépenser en moyenne 14 fois l’équivalent de son revenu annuel pour pouvoir acquérir un logement. Ce ratio cache, cependant, de fortes disparités entre les régions. Dans la région du Grand Tunis, le ratio prix du logement/revenu annuel s’élève à 22 alors qu’il n’est que 12 % dans le Nord-est, et de 9 % au Sud-ouest.
Selon les normes internationales, le ratio moyen du prix du logement par rapport au revenu du ménage pour lequel l’accessibilité au logement est jugée bonne est un ratio de 1 à 5, c’est-à-dire que le ménage investit en moyenne dans l’acquisition de son logement l’équivalent de 1 à 5 fois l’équivalent de son revenu annuel.
Walid KHEFIFI