Le tourisme saharien est un secteur porteur et pourrait jouer facilement le rôle d’une véritable locomotive de développement économique et social dans le Sud qui fait vraiment rêver. Les dunes et les dattes ne sont pas suffisantes .Maintenant, il faudrait que nos professionnels fassent de la question du Sahara un segment à défendre , en restructurant ce produit, en faisant du lobbying promotionnel et en vantant les mérites touristiques de cette région. Attirer des touristes, des investisseurs et des habitants ne se fait pas par magie. Le marketing territorial joue un rôle essentiel dans la création d’une image positive pour les villes et dans l’amélioration de leur attractivité. C’est le cas de Tozeur ,ville aux mille coupoles, qui a été retenue pour accueillir un grand événement touristique au regard de ses atouts touristiques variés, ainsi que de son patrimoine matériel et immatériel et les traditions de ses habitants. Il s’agit de la première édition du Salon International du Tourisme Saharien et Oasien (ISSOT 2024). Cet événement prestigieux a réuni environ 500 acteurs professionnels du tourisme alternatif et durable, ainsi que des influenceurs et des journalistes, tant au niveau national qu’international. Il offre également aux participants et aux visiteurs l’occasion d’explorer la beauté de la nature saharienne et de partager leurs expériences, servant de plateforme d’échange d’idées et d’expertises dans le domaine du tourisme saharien. L’ambition de ce salon est de continuer, année après année; d’être la vitrine privilégiée et exhaustive du tourisme saharien, dans toutes ses composantes et ses évolutions. Les explications de Dora Milad, Présidente de la Fédération Tunisienne de l’hôtellerie.
Le Temps : Quelle est la spécificité de cette première édition du Salon International du Tourisme Saharien et Oasien (ISSOT 2024) ?
Dora Milad : Ce salon a essayé de faire connaître le produit saharien à un moment où cette région a perdu de sa notoriété sur les marchés émetteurs et classée zone rouge durant sept ans. Ce qui a entraîné la fermeture de plusieurs unités et la baisse de la fréquentation. Aujourd’hui, le Sud a besoin d’être revalorisé et relancé de nouveau et surtout être présent dans l’esprit des acteurs touristiques et des tour-opérateurs étrangers. C’est pourquoi plusieurs professionnels européens, chinois et canadiens ont pris part à cette manifestation. Ce salon s’inscrit dans la stratégie de la promotion de la destination et le passage d’un marketing national à un marketing régional, un processus stratégique visant à promouvoir et à améliorer l’image de la région dans le but d’attirer des visiteurs, des et des investisseurs. En attirant des TO et des décideurs, le Sud peut créer de nouvelles opportunités pour l’emploi, l’innovation et renforcer son économie régionale. Ce salon est une opportunité de communiquer sur un tourisme particulier, le tourisme saharien, qui est différent du tourisme balnéaire et là le Sud tunisien doit devenir une référence.
Mais cette région ne pourra pas décoller tant que plusieurs unités sont encore fermées ?
C’est toujours la question de l’œuf et de la poule . Ces unités ont souffert durant sept ans et n’ont aucune responsabilité dans l’interruption de l’activité touristique . Elles se battent et essaient malgré la conjoncture défavorable de survivre et de se maintenir. Il faudrait affronter la réalité et trouver des solutions pour résoudre ces problèmes structurels avec le secteur bancaire. Un plan de relance est nécessaire .Il faudrait attirer de nouveaux investisseurs et de nouveaux fonds pour la mise à niveau du secteur. Certains professionnels commencent à s’intéresser à la région et on attend à trois réouvertures d’hôtels d’ici 2025 mais il est temps d’encourager l’investissement dans cette région, faciliter les démarches administratives et financières pour conquérir d’autres marchés et booster cette niche touristique
Comment réinventer le tourisme dans le Sud tunisien ?
Le tourisme de demain mérite une approche plus qualitative qui ne se focalise pas uniquement sur l’augmentation du nombre de touristes qui fréquentent le Sud. Il doit mieux appréhender la singularité de la région, donner davantage la priorité à la durabilité , l’environnement et à la culture. Le touriste a changé. Il veut aller à la rencontre des autres et découvrir d’autres cultures, convaincu qu’il faut repenser le tourisme pour qu’il devienne durable. Et là il faut lui offrir de nouvelles expériences , d’autres attentes. Le sud tunisien reste néanmoins une région propice pour entreprendre et innover au niveau de l’offre touristique. Des investissements pertinents permettraient de réorienter les flux de touristes aujourd’hui attirés par les stations balnéaires en faveur d’un tourisme saharien valorisant les richesses naturelles et patrimoniales. Il faut développer d’autres produits touristiques. Nous citons par exemple le tourisme d’aventure, le campement, les maisons d’hôtes, la caravane, le tourisme événementiel .Faire du Sahara tunisien un relais de croissance durable pour le secteur touristique reste une belle ambition. Cependant, elle nécessite une mobilisation plus prononcée de la population locale et des acteurs institutionnels.
Comment rendre l’aéroport de Tozeur-Nefta plus attractif ?
Un seul vol reliant Tozeur à Paris, c’est un acquis mais c’est insuffisant. Pour rendre attractif l’aéroport de Tozeur il faut déjà aller le commercialiser. Il existe des salons internationaux où se rencontrent les aéroports et les compagnies aériennes. Il faudrait que Tozeur soit présente. Il y a un effort à faire pour la commercialisation de l’aéroport.. C’est un produit touristique qu’il faut booster.
L’open Sky pourrait-il avoir un impact positif immédiat sur l’aéroport de Tozeur dans la mesure où il permettra d’accueillir une clientèle additionnelle ?
L’open sky offre une bonne opportunité pour booster l’aéroport de Tozeur mais cette opération a un coût car il faut de ùoyens financiers pour attirer les compagnies low cost. Il faudrait aussi que la destination soit attractive pour que les avions se remplissent.D’où l’importance et l’urgence de signer cet accord après le grand retard accusé. Il faut saisir cette opportunité et il est grand temps d’emboîter le pas à d’autres pays.
Interview par Kamel BOUAOUINA
Photos Berrazagua