Les salons de coiffure et de beauté jouent un rôle essentiel dans le bien-être de nombreux citoyens. Mais leur prolifération désordonnée pose des problèmes de santé publique, de sécurité et de professionnalisme et soulève également de nombreuses questions quant à la qualité des services, la qualification des praticiens et, surtout, la santé des clients. Dans un contexte où les règles sont souvent floues ou inexistantes, l’anarchie des salons de coiffure et de beauté sans patentes devient une problématique majeure.
La multiplication rapide des salons de coiffure et de beauté dans les zones urbaines comme rurales s’accompagne d’un manque flagrant de contrôle. Il n’est pas rare de voir des salons ouvrir sans autorisation officielle, souvent dans des locaux inappropriés ne respectant pas les normes d’hygiène ou de sécurité. Ces établissements échappent à tout encadrement, mettant en danger la santé des usagères.
Les services proposés varient énormément d’un salon à l’autre, allant de la coiffure classique à des traitements de soins avancés comme les peelings chimiques ou l’application de produits capillaires agressifs. Ces pratiques, souvent effectuées par du personnel non formé, peuvent avoir des conséquences graves sur la santé des clients, notamment des brûlures, des réactions allergiques ou des infections cutanées. Le non-respect des normes d’hygiène dans de nombreux salons de beauté constitue une autre source de préoccupation. Matériels non stérilisés, produits périmés ou détournés de leur usage initial, absence de nettoyage des lieux…
Ces pratiques augmentent les risques de transmission de maladies infectieuses, telles que l’hépatite ou les mycoses. D’ailleurs, le ministère de la Santé a appelé, dans un communiqué de presse urgent, les professionnels des salons de coiffure à cesser immédiatement l’utilisation de produits de lissage brésilien contenant de l’acide glyoxylique. Ces produits, précise le ministère, peuvent provoquer des problèmes d’insuffisance rénale, des inflammations respiratoires et des lésions cutanées pouvant même causer des cancers en cas d’utilisation récurrente. Ces risques sont encourus par les clients, mais aussi par les professionnels qui les appliquent.
Des coiffeurs sans qualification
L’un des problèmes majeurs des salons de beauté est le manque de qualifications des praticiens. Beaucoup d’employés n’ont suivi aucune formation professionnelle et apprennent sur le tas, ce qui entraîne des erreurs parfois lourdes de conséquences. Par exemple, l’utilisation de produits chimiques sans respect des dosages ou des précautions d’usage peut provoquer des dommages irréversibles. Le secteur manque cruellement de normes régissant les diplômes ou certifications nécessaires pour exercer. Cela ouvre la porte à une concurrence déloyale, où des salons sans qualification offrent des services à bas prix, attirant ainsi une clientèle moins informée mais vulnérable. La présidente de la Chambre nationale de la coiffure et de l’esthétique, Faten Laâmouri, a déclaré à l’agence TAP que 50% des salons de beauté en Tunisie fonctionnent de manière illégale.
Elle a affirmé que les intrus dans le secteur opérant de manière illégale ne disposent ni d’un registre de commerce, ni d’une affiliation au système de sécurité sociale en tant qu’employeurs. Faten Laâmouri a expliqué que les salons de coiffure et de beauté légaux subissent une concurrence déloyale de la part de ces intrus qui suivent des formations accélérées dans des centres non agréés, souvent d’une durée de quelques semaines, alors que la formation professionnelle devrait durer au moins un an, insistant sur l’importance de compétences et d’une expertise approfondies pour exercer ce métier. Pour mettre fin à cette anarchie, plusieurs mesures doivent être envisagées dont la mise en place d’une réglementation stricte et l’élaboration d’un cadre juridique clair pour encadrer l’ouverture et le fonctionnement des salons de beauté. Cela inclut des normes d’hygiène obligatoires, des inspections régulières et des sanctions en cas de non-conformité. Une formation professionnelle est obligatoire dans les centres de formation spécialisés et permettra d’améliorer les compétences des praticiens sans oublier la sensibilisation des consommateurs qui doivent être informés des risques liés à des pratiques non conformes et encouragés à choisir des salons réglementés.
Kamel BOUAOUINA